Comment réagir et assurer la continuité de l’enseignement en cas de crise sanitaire dans une école rurale de la Nièvre ?. Qu’en retenir après un retour à un peu de normalité ? Cristine Géobard raconte...
par Cristine Géobard
Cristine Géobard est professeur des Écoles à Millay, petite commune rurale de la Nièvre. Elle enseigne en CM1/CM2.
Elle a répondu au point n°1 de notre appel à contributions (2020/2021). Elle nous a envoyé un premier texte qui est l’introduction de l’article qui suit. Elle l’a ensuite développé en trois composantes, annoncées dans l’introduction :
- L’utilisation d’Etherpad
- Les enregistrements audio
- Les capsules vidéos
La démarche de temps de crise n’a pas été balayée par un retour en classe. Cristine Géobard explique dans l’article pourquoi et comment elle a conservé certaines pratiques du temps de crise dans la classe retrouvée.
La frontière entre présentiel et distanciel est plus poreuse qu’il n’y paraît.
Voir aussi : Enseigner de nouveau à distance. Qu’en retenir pour les périodes à venir ?
Enseigner c’est cheminer ensemble, c’est construire une relation d’échange. Le langage tient donc une place centrale dans l’enseignement : il permet à l’élève de verbaliser ce qu’il a appris et il permet à l’enseignant d’avoir accès à l’activité de l’élève et de mesurer l’appropriation des notions.
Enseigner à distance, c’est se priver d’un levier important pour l’enseignement : le langage.
Il a donc fallu réinventer la classe pour sortir d’un mode « classe consommation » (cours + exercices pour l’élève/ correction pour l’enseignant) à un mode classe participative.
La classe participative, en temps de crise, doit donc utiliser les outils numériques. Ils doivent à la fois permettre d’établir un lien entre l’enseignant et l’élève mais aussi favoriser les échanges.
Les outils suivants, complémentaires, ont permis cela.
L’utilisation de « Etherpad » (un service web de traitement de texte collaboratif et en temps réel) permet de faire de l’écriture collaborative, de réaliser des exercices sur la langue française mais aussi du calcul mental, de la résolution de problèmes. Cela permet à l’enseignant d’avoir accès, en temps réel, au cheminement de ses élèves, de pouvoir les accompagner de manière individualisée et de proposer un savoir spécifique en fonction des besoins de chacun. Les élèves peuvent aussi interagir et proposer des corrections ou une solution à leurs pairs.
Les enregistrements audio permettent aux élèves de travailler en retrouvant des situations de classe. En effet, les élèves, surtout les plus jeunes, restent attachés à leurs habitudes et se sentent en sécurité lorsqu’ils retrouvent les mêmes conditions de travail. L’enseignant va recréer l’atmosphère de la classe, les mêmes codes mais à distance. Cet outil convient bien aux dictées, aux défis de calcul mental mais il peut aussi être utile en langue vivante. Il établit le lien mais les échanges seront différés.
Les capsules vidéo permettent aux élèves de se retrouver en situations d’apprentissage. Ces capsules peuvent intervenir à différents moments de la séquence d’apprentissage. En situation initiale ou de découverte, lors de l’institutionnalisation ou en étayage sur un point spécifique de la leçon qui n’est pas encore acquis.
La visioconférence permet plus d’interactivité à condition que la connexion soit de qualité bien sûr et le réseau non saturé !
Aujourd’hui, le retour en classe permet, enfin, les échanges. Cependant, certains outils numériques, utilisés en temps de crise, sont entrés durablement dans la classe.
C’est le cas de la capsule vidéo. Elle est utilisée en « classe inversée ». Elle permet à l’élève d’entrer sereinement dans une nouvelle notion à son rythme, à la maison. Elle est faite sur mesure par l’enseignant et elle est accompagnée d’une fiche de mission que l’élève renseigne après avoir regardé la vidéo. Cette fiche de mission, écrit de travail de l’élève, permet à l’enseignant de mesurer les acquis de l’élève et de construire un parcours au plus près des besoins de chacun.
La fiche de mission sert de point de départ en classe. Elle permet le débat entre pairs. Elle est complétée et comporte même une trace écrite sous forme de carte mentale. La classe est plus participative car tous les élèves sont impliqués. En effet, la capsule vidéo a réactivé ou construit des savoirs et les échanges sont donc plus fructueux.
L’utilisation de « Etherpad » permet de réaliser des projets d’écriture ou des défis avec d’autres classes. Cet outil est intéressant car la connexion n’est pas nécessairement en simultané. Il est possible de travailler en différé : une classe laisse un écrit que l’autre corrige ou améliore.
La crise a invité la « créativité » dans la façon de faire la classe. Cette créativité doit permettre de faire évoluer nos pratiques de classe et de se réinventer même en dehors de la crise.
On peut suivre les activités de l’École de Millay sur Twitter