par Alexis Lecomte
Cet article relate une expérimentation de l’usage d’une tablette en cours de Mathématiques, en évoquant les apports pédagogiques ainsi que les contraintes techniques pour sa mise en oeuvre.
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Un important Ps. avec des compléments figure au bas de l’article.
Depuis plusieurs années, je dispose d’un TNI (tableau numérique interactif) fixe dans ma salle de cours. Les avantages en sont maintenant bien connus, à savoir la possibilité de manipuler directement devant les élèves des logiciels ou émulateurs de calculatrice, sans être « coincé » derrière l’ordinateur, ou encore les fonctionnalités du logiciel lié au TNI, qui permettent entre autres de prendre des photos de l’écran pour l’annoter ou encore d’enregistrer le travail en cours pour le reprendre au même endroit la séance suivante (et de pouvoir revenir sur le travail précédent) puis de joindre le contenu du cours au cahier de textes numérique.
Cependant, le TNI étant excentré sur le mur (pour laisser la place au tableau blanc au centre) l’inconvénient principal à mes yeux était que je me sentais relativement éloigné des élèves et devais régulièrement revenir au centre de la classe pour capter leur attention et les faire participer davantage. Avec l’émergence des tablettes numériques, je voyais bien la possibilité de pouvoir se retrouver au centre de la classe tout en rédigeant le cours sur la tablette, mais les quelques tests que j’avais effectués n’étaient pas concluants, je trouvais l’écran bien trop petit pour avoir une écriture satisfaisante.
En juillet 2012, un ami m’a montré sur la célèbre tablette de la marque pommée [1] une application de saisie de notes disposant d’une zone de texte zoomée en bas de la page permettant d’écrire de manière tout à fait satisfaisante, le contenu de cette zone étant immédiatement affiché au dessus, en plus petit.
Je pris alors conscience que ce que j’avais imaginé était réalisable, puisqu’avec cette application et un stylet j’arrivais à écrire de manière habituelle et avec un rendu acceptable sur l’écran.
Bilan de l’expérimentation :
En terme d’usage, la mobilité escomptée en cours est très satisfaisante, l’affichage à l’écran se faisant de façon quasi instantané quel que soit l’endroit où se situe la tablette dans la classe (le léger temps de latence est dû à l’application de prise de notes plutôt qu’à la transmission du signal). On peut aisément faire participer les élèves en leur prêtant la tablette sans qu’ils aient à se déplacer, le temps d’adaptation à la prise de notes étant rapide. Cela permet de faire participer des élèves timides qui n’osent pas se déplacer au tableau (à l’usage, j’ai pu observer que certains préfèrent le tableau, d’autres la tablette). On peut aussi envisager cette solution pour faire participer des élèves souffrant d’un handicap moteur les empêchant de se déplacer au tableau.
La caméra intégrée à la tablette lui permet également de jouer le rôle de visualiseur : il est possible à tout moment de prendre une photo d’un énoncé, d’un travail d’élève, et de l’annoter par la suite dans l’application de saisie de notes.
Sans avoir pu de mon côté explorer toutes les possibilités de la fonctionnalité de visualiseur portable, on peut assez facilement envisager les potentialités d’un tel usage : mise en parallèle de deux (voire plus) travaux d’élèves sur une même question pour débat en classe ou encore, lors de travaux en groupes, prise de photos pour une présentation orale des élèves par la suite, avec explicitations des démarches par essai-erreur.
A noter que la photo d’un énoncé peut être pris en amont du cours, afin de préparer celui-ci et de gagner du temps. Une différence notable entre un TNI et une tablette est que celle-ci est emmenée par l’enseignant à son domicile, lui permettant d’avoir à tout moment la trace écrite facilement accessible. De plus, lors de la correction d’un contrôle, l’enseignant peut photographier une copie d’élève sur une erreur récurrente pour s’appuyer dessus au moment de la correction, ou encore montrer une démarche originale, comparer des méthodes différentes...
Concernant les imports de documents autre que les photos, comme les fichiers au format pdf, l’Ipad ne possédant pas de système de fichiers comme un ordinateur classique, on peut passer par l’usage de solutions externes de stockage en ligne depuis l’application de saisie de notes, comme Dropbox par exemple, et ainsi accéder à ses documents personnels pour une inclusion éventuelle. On peut également utiliser ce même principe pour exporter les notes, au format pdf, afin de les insérer par exemple dans le cahier de textes numériques.
Mise en œuvre technique :
Faisant parti du pôle Tice académique, je fis part de mon souhait de tester un tel dispositif lors de notre première réunion annuelle, le conseiller Tice du recteur étant présent, il m’a proposé d’adresser ma demande à la mission Tice académique. Au mois de décembre, je recevais un mail me précisant que je pouvais emprunter le matériel demandé :
– une tablette Ipad et une housse
– une appleTV
– un stylet numérique
– un câble HDMI
D’un point de vue technique, l’objectif était de connecter la tablette et l’appleTV à un même réseau Wifi pour que cette dernière puisse afficher le contenu de la tablette, et la transmettre au vidéoprojecteur via le câble HDMI. En parallèle, mes recherches sur Internet m’ont permis de trouver une configuration plus simple, à l’aide d’un logiciel , AirServer (4 dollars la licence), qui permet d’afficher sur l’écran d’un ordinateur l’écran de la tablette, pour peu que l’ordinateur et la tablette soient sur un même réseau Wifi (voir Post Scriptum, au bas de l’article). Dans un premier temps, j’utilisais mon smartphone pour générer un réseau wifi depuis ma connexion 3G, ainsi que mon ordinateur portable personnel, qui disposait d’une carte wifi, contrairement à l’ordinateur fixe de la salle de cours. Par la suite, je connectais mon ordinateur macbook au réseau pédagogique via le câble RJ45, ce qui me permit de générer un réseau wifi (les ordinateurs apple disposent nativement de cette fonctionnalité) et d’y connecter la tablette. Il me restait à relier mon ordinateur portable au videoprojecteur de la salle. Tout ceci prenait un temps important d’installation et n’était évidemment pas satisfaisant. Une carte wifi (coût approximatif : 30 euros) a été installée sur l’ordinateur fixe de ma salle, et en utilisant un logiciel gratuit – Connectify Me – je retrouvais la fonctionnalité de création d’un hotspot wifi à partir de la connexion filaire au réseau pédagogique. Pour résumer, voici l’équipement supplémentaire installé sur l’ordinateur de la salle ainsi que les coûts approximatifs :
- Une carte wifi (30 euros)
- le logiciel AirServer (4 dollars la licence)
- le logiciel Connectify Me en version gratuite
Une fois tout ceci en fonction, il suffit en trois clics d’activer le hotspot wifi, le logiciel AirServer, et depuis la tablette de demander de cloner l’affichage sur l’écran de l’ordinateur, qui se retrouve vidéoprojeté.
Synthèse : L’usage de la tablette en classe permet bien une mobilité accrue de l’enseignant dans la salle de cours. Son usage de visualiseur est également pertinent. Ces fonctionnalités ne sont en rien spécifiques aux mathématiques et sont transposables dans d’autres matières, en particulier les langues vivantes pour lesquelles on peut également utiliser des applications de dictaphone pour enregistrer le son puis le diffuser sur des enceintes de manière quasi instantanée.
Les limites de l’usage proviennent de l’absence de logiciels spécifiques, comme les émulateurs de calculatrice pour lesquels il est nécessaire de basculer l’affichage sur l’ordinateur de la salle. Cependant, des applications pour tablette se développent (GeoGebra par exemple) et l’on a accès à toutes les ressources sur internet (WoframAlpha, XcasEnLigne, ou encore le récent logiciel de géométrie dynamique DGPAD (voir DGPad - Une approche tactile spécifique de géométrie dynamique sur tablettes) spécifiquement conçu pour utiliser les gestures liées à l’usage des tablettes), on peut raisonnablement espérer un développement de ces logiciels. Pour terminer, notons le coût de l’équipement relativement raisonnable, qui s’élève à environ 600 euros pour le matériel décrit dans cet article.
Le choix de l’usage de l’Ipad a été expliqué, tout complément d’information sur d’autres tablettes est bienvenu !
Remerciements :
- la DANE (délégation académique au numérique éducatif) de Rouen pour
le prêt du matériel - Virginie Erinion, chef des travaux du lycée Maurois à Elbeuf, pour
son soutien - Eric Elter, pour son accompagnement sans faille
- M.Maurau pour son accueil chaleureux et sa tarte aux pralines...