Une classe de CM2 a fait 7 séances de géométrie dynamique, trois au premier semestre, quatre au second semestre de cette année scolaire. Nous nous proposons d’analyser les pratiques des élèves et d’étudier l’évolution des représentations de la géométrie par ces élèves et leur enseignante.
Une classe de CM2 vient de terminer un cycle de 7 séances de géométrie dynamique (GD). Illustré de vidéos de l’ensemble de la séquence, cet article aborde plusieurs questions, dont celle de la représentation de la géométrie chez les élèves et leurs enseignants. On verra aussi, à travers les échanges entre pairs associés à la manipulation directe, le glissement progressif de certains élèves vers “la géométrie des propriétés des objets” que préconise l’équipe ERMEL, mais aussi la difficulté à engager une attitude géométrique chez d’autres. Nous terminerons par un regard critique sur notre séquence et les modifications à y apporter.
Spécial « Parcours d’été 2021 »
Cet article date de 2011, il a donc 10 ans. Depuis, la géométrie dynamique a progressé. Le logiciel utilisé, CaRMetal, garde pourtant encore sa spécificité pour les outils uniques, fortement utilisés par les élèves ici, en particulier ce que l’on a appelé « le Monkey ». Son interface a pu s’enrichir depuis qu’il a été repris en main par Patrice Debrabant, mais l’enrichissement sera transparent en primaire (car la programmation est davantage orientée vers le lycée). Signalons que CaRMetal est écrit en Java, il nécessite donc une installation de Java sur ordinateur ... et ne permet pas d’utilisation en ligne. Depuis 2013, l’auteur initial de CaRMetal, Eric Hakenholz, a écrit un autre logiciel, DGPad (tutos), utilisable en webApp mais aussi en local (MaJ avril 2011) (sous Windows, Linux, Mac OS). Vous trouverez de nombreux articles dans MathémaTICE sur DGPad (évitez ceux de 2013, le logiciel était juste naissant).
La géométrie du cycle 3 de l’école primaire est qualifiée d’instrumentée au sens où l’usage des instruments est une première étape pour s’affranchir de la simple perception. La pratique de classe semble toutefois souvent la transformer en géométrie de la mesure au sens où d’une part la règle graduée est omniprésente et surtout, d’autre part, l’utilisation des propriétés géométriques est peu mise en œuvre.
L’ouvrage de géométrie de l’équipe ERMEL, publié en décembre 2006, se propose de modifier les pratiques car, pour l’équipe ERMEL, si on instrumente les élèves (plus que la géométrie) c’est parce que la géométrie du cycle 3, au moins du CM1 et du CM2, est un géométrie « des propriétés des objets », et que les instruments sont un premier outil de validation de cette géométrie. L’avantage didactique de cette étape instrumentée est de rester dans le monde sensible (du cycle 2).
L’usage d’outils du monde sensible est aussi un obstacle - précision, manipulations éphémères et non reproductibles - qui peut aussi être mis à profit, préconise l’équipe ERMEL, pour proposer aux élèves de s’affranchir du perceptif et essayer de raisonner plus directement sur les propriétés des objets : les limites de l’instrumentation des outils est ainsi l’occasion de rentrer dans cette « géométrie des propriétés des objets », au niveau de précisions que l’on peut proposer en CM2.
1. Introduction
Dans le cadre d’un projet de recherche au sein de l’équipe EDIM, nous travaillons sur l’utilisation de la géométrie dynamique à différents niveaux de scolarité, et pour ce qui nous occupe ici, au cycle 3 de l’école primaire.
Les enjeux de la géométrie dynamiques au cycle 3, à la lumière de la position de l’équipe ERMEL et de quelques activités d’instrumentation - ont déjà été présentés dans cet article de l’IREM de La Réunion.
Une argumentation sur le choix du logiciel retenu, CaRMetal (nouveau site de mai 2021), ainsi qu’une prise en main de ce logiciel orientée pour l’école sont présentées dans cet autre article.
Cet article rend compte d’une séquence de 7 séances effectuées dans la classe de CM2 d’Hélène Lefèvre, à l’école élémentaire Alain Lorraine (La Possession), mise en œuvre par Isabelle Payet, enseignante à l’IUFM de La Réunion. Trois séances ont été faite au premier semestre, et quatre au second semestre.
Parmi les séances du premier semestre sur l’instrumentation des objets droites et segments, nous avons repris une activité d’investigation de l’ouvrage ERMEL de Géométrie, l’activité « faisceaux de traits ». Nous avions déjà expérimenté cette activité plusieurs fois, dans l’environnement informatique et dans l’environnement papier-crayon, à la fois en CM1 et en CM2. Ceci a fait l’objet d’un premier article d’Isabelle Payet, disponible en ligne dans le numéro 35 de la revue Expression.
Parmi les séances du second semestre, une autre activité de l’ERMEL de Géométrie a été reprise (celle intitulée « le cercle et les cercles »), et adaptée à l’environnement informatique. Elle avait déjà été testée l’an passé, et a fait l’objet de cet article (Isabelle Payet) sur le site de l’IREM de La Réunion.
C’est pour cela que ne reprendrons pas ces activités dans les analyses proposées ici.
Les 7 séances effectuées
S1. (5 novembre 2010) : Instrumentation sur les points, segments, droites. Tableaux de fils.
S2. (26 novembre 2010) : Faisceaux de traits (adapté d’une activité ERMEL).
S3. (10 décembre 2010) : Construction d’un rectangle et problème ouvert associé - nombre d’intersections d’une figure comportant un rectangle et deux cercles distincts.
S4. (11 février 2011) : Instrumentation sur les cercles.
S5. (18 février 2011) : Le cercle et les cercles (adapté d’une activité ERMEL).
S6. (25 février 2011) : Deux programmes de construction du pentagone régulier.
S7. (25 mars 2011) : Analyse géométrique et reproduction d’une figure mettant en jeu la construction de carrés.
Comme indiqué ci-dessus, les séances S1, S2, et S5 ont déjà fait l’objet de compte rendus, dans d’autres articles. Nous ne détaillerons donc que les autres.
Particularités de la mise en œuvre
CaRMetal a cette particularité de travailler avec des classeurs contenant plusieurs figures. L’environnement de chaque figure peut être paramétré individuellement, en particulier en décidant des palettes disponibles pour cette phase de la séance, et dans chaque palette des outils disponibles aux élèves. Cela permet d’éviter une surcharge - mais aussi un éparpillement - aux élèves en ne ciblant que les quelques outils spécifiquement utiles pour la tâche. Les élèves voient très vite qu’ils n’ont pas les mêmes outils en changeant de figure dans le classeur de la séance.
Du côté des élèves un outil est systématiquement utilisé, l’outil Monkey, qui, comme l’indique son propre feedback, permet de secouer la figure.
Comme cet outil déplace aléatoirement tous les objets de base, on verra dans certaines vidéos, quand les élèves ne démarrent pas sur une figure vide, que certains points ne bougent pas : dans la préparation des figures, nous avons parfois choisi de bloquer ces points pour que l’on puisse plus facilement interpréter les mouvements à l’écran. Mais en pratique c’est assez rare, car l’essentiel des figures sont entièrement faites par les élèves et on n’a pas travaillé l’aspect qui consiste à fixer les points.
On notera que suite à cette séquence, nous avons demandé à l’auteur du logiciel, Eric Hakenholz, de pouvoir ralentir le Monkey, trop rapide pour des figures élémentaires de l’école primaire. Et ce paramétrage est disponible depuis la version 3.6 (avril 2011) dans la palette Taille.
Par défaut il est réglé à 15, on peut le mettre à 4 ou 6 pour une utilisation en CM2.
Ayant deux adultes autres que l’intervenante en classe (l’enseignante titulaire et l’auteur de l’article), les séances ont été filmées à trois caméras (dont une souvent fixe) ce qui permet de relever de nombreux comportements, de nombreuses prises d’initiative que l’on ne repèrerait pas nécessairement quand on est seul avec sa classe en salle informatique.
L’article a été écrit essentiellement pour partager cette prise d’information sur les pratiques d’élèves de CM2 découvrant la géométrie dynamique et éventuellement pour inciter les collègues de cycle 3 à commencer à utiliser cet outil fabuleux pour l’apprentissage de la géométrie.
Organisation technique de l’article
Chaque séance est rédigée dans un système d’onglets, le premier, toujours affiché par défaut, présente soit la fiche de travail, les consignes, ou quelques commentaires généraux sur la séance. Chaque autre onglet contient un extrait vidéo commenté sur un point intéressant de la séance.
La séance S4 contenant trois phases bien distinctes, comporte à elle seule trois systèmes d’onglets.
S3. Construction d’un rectangle
Introduction de propriétés euclidiennes
Cette séance est la première où l’on va construire une figure ordinaire,- au sens de connue des élèves - mais de manière dynamique. En effet, dans la deuxième séance, nous avions travaillé essentiellement des questions d’alignement, il n’y avait pas d’orthogonalité.
L’activité commence par la construction d’un rectangle puis se poursuit par l’ajout de deux cercles (distincts) pour que la figure (rectangle et deux cercles) ait un maximum de points d’intersection. Cette activité a déjà été proposée dans le cinquième onglet (Problème ouvert) de cet article d’introduction à la géométrie dynamique à l’école primaire.
La construction attendue
S3.a - Construction dynamique d’un rectangle
Dans les activités de la séance précédente, le déplacement des points servait certes à valider la figure, mais cette figure étant abstraite pour les élèves (deux triangles et des droites), sa non validation par le mouvement n’était pas aussi parlante que la non validation immédiatement perceptive, comme cela va être le cas ici : fabriquant un rectangle, si les angles droits disparaissent, les élèves s’aperçoivent immédiatement de leur erreur.
Même si la figure paraît élémentaire, elle a vraiment posé des problèmes aux élèves. Et il est intéressant de s’arrêter un moment sur cette difficulté.
En effet, on pourrait penser que les élèves ayant déjà été plongés deux fois dans cet environnement dynamique, une première expérience aurait dû être acquise. Mais en fait, si les élèves ont bien été plongés dans un environnement dynamique, ils l’ont été en conservant leurs représentations géométriques préalables à cette expérience.
Or cette fois, les élèves vont être perturbés non seulement dans leurs représentations, mais surtout dans leurs schèmes d’action : ils vont effectuer les gestes ordinaires de leur géométrie papier-crayon, largement validés par des années de pratique, et cette fois, ces gestes vont être invalidés.
La déstabilisation est importante, et il va falloir plusieurs étapes pour arriver à produire un vrai rectangle dynamique.
En pratique la figure terminée est vidéo-projetée au début de la séance. L’intervenante montre que l’on peut déplacer A et B dans tout le plan (tout l’écran), et C seulement sur une droite.
La construction demandée correspond à ceci :
– On prend un segment [AB]
– On trace des perpendiculaires à [AB] en A et B
– Sur celle issue de B on prend un point C
– La perpendiculaire à C en cette droite coupe la droite issue de A en un point que l’on nommera D.
Dans les onglets suivants on va voir la progression des productions des élèves sur cette activité au cours de la séance.
Suite à quelques problème de disque dur, seule la première vidéo est dans un format correct. Exceptionnellement les autres vidéos de cette barette d’onglets sont dans un petit format.
Démarche perceptive
S3.b - Les premières démarches
Dans cette première vidéo, on voit que les élèves n’investissent aucunement l’orthogonalité des segments consécutifs, mais qu’ils utilisent en revanche plus naturellement le parallélisme. L’élève qui parle est dans un registre totalement perceptif.
La vidéo suivante est l’occasion de soulever une question qui a probablement été une source de problème ou de confusion chez plusieurs élèves.
La difficulté en question est qu’un rectangle est constitué de segments et que les élèves n’ont probablement jamais construit de rectangle avec des droites. Or ici il va falloir construire des droites perpendiculaires, donc des droites à la place de segments.
En géométrie dynamique, segment [AB] et droite (AB) sont deux objets différents, au sens de feuilles d’arbres différentes dans l’arborescence interne de la figure, et donc le segment [AB] n’est pas inclus dans la droite, alors que cette inclusion est naturelle chez les élèves : un peu plus loin dans la séance, un élève a utilisé la gomme comme une gomme papier-crayon en essayant d’effacer les parties de la droite extérieures au segment. D’autres logiciels de dessin (que les élèves peuvent avoir utilisés dans leur vie non scolaire) ont bien une gomme agissant comme celle du monde sensible. Il y a donc un apprentissage spécifique à faire. Nous avions cru que cela avait été fait lors de la séance 2, sur l’activité faisceaux de traits. Ici comme ailleurs, l’apprentissage d’un nouvel environnement de travail est à penser dans la durée ...
Même si l’enseignante en a parlé et a bien insisté, les élèves n’apprennent véritablement cette différence que devant un problème : il faut que leurs représentations soient perturbées, que leurs schèmes d’action soient mis en défaut pour qu’ils commencent à écouter ceux qui essaient de les prévenir.
Cela illustre que l’erreur est un chemin naturel dans les phases d’apprentissage (et surtout de changement de cadre radical comme ici). Ce comportement de l’apprenant a souvent été évoqué, et il me revient cette analogie de Roland Charnay : quelque soit la puissance des outils de votre boite à outil, quelque soit la pertinence de ce que vous proposez, un élève testera d’abord si ses propres outils ne permettent pas de résoudre le problème avant de commencer à jeter un œil sur ce que vous proposez. C’est exactement ce qu’il s’est passé pendant cette séance.
Démarche affine
S3.c - Démarche affine
L’extrait suivant, remarquable à bien des égards, illustre cette fois la prégnance de l’affine sur l’euclidien : l’élève ne construit que des parallèles pour construire son rectangle.
Il est acquis que les propriétés affines (l’alignement en particulier) sont perçues par les élèves bien avant les propriétés euclidiennes (ici l’orthogonalité). On sait également que dans le domaine géométrique, comme dans le domaine numérique, il y a un décalage important (de 1 à 2 ans selon le concept) entre le moment où un concept est acquis comme objet et celui où il peut être utilisé comme outil dans une situation donnée (par exemple de raisonnement géométrique). Nous sommes probablement dans cette situation là.
Dans un premier temps, on pourrait penser qu’ici, l’orthogonalité des côtés adjacents d’un rectangle relève de la définition du rectangle, et que l’angle droit est essentiellement du registre de l’objet mathématique, et certainement pas du côté outil. Pourtant le discours de l’élève - qui ne mentionne pas l’orthogonalité - pose question. Il peut s’agir d’un élève qui est resté dans la perception affine (car en fin de l’extrait, il ne voit pas la non orthogonalité).
Il est possible aussi que le fait de devoir tracer des droites pour construire un rectangle place quelques élèves de la classe dans « le monde des droites », c’est-à-dire de l’affine (apprentissage de l’alignement). D’où la possible perte de référence à l’orthogonalité. Si c’est le cas, la modification profonde des schèmes d’actions des élèves (devoir tracer des droites là il faut, au final, des segments) serait alors plus perturbante qu’on pourrait l’imaginer.
Cet extrait vidéo est un concentré d’informations :
– L’élève a un vocabulaire géométrique très précis.
– De plus il dit exactement ce qu’il a fait (et non pas ce qu’il croit avoir fait comme c’est souvent le cas) : le rapport à la géométrie semble clair.
– L’élève se situe complètement dans un registre affine
– Alors qu’on voit à l’écran une forme de parallélogramme, l’élève confirme qu’il s’agit bien d’un rectangle.
– La discussion se déplace alors sur le fait qu’une droite ne passe pas par A.
– L’élève n’y voit alors qu’une question secondaire :« ah oui, il n’est pas bien attaché ».
Il est clair que, pour cet élève - qui sait parler de géométrie avec précision - le rectangle, objet géométrique fréquenté comme forme depuis la maternelle, n’engage pas du tout l’orthogonalité (ni comme objet ni comme outil) mais seulement le parallélisme (comme outil).
Là encore, dans un environnement papier-crayon, on n’aurait pas pu percevoir ni même imaginer ces difficultés puisque, perceptivement l’élève dessine un rectangle.
Démarche euclidienne
S3.d - Démarche euclidienne
La résolution de cette activité a commencé, pour tous les élèves, par une phase perceptive, puis une seconde phase où les élèves ont compris qu’il fallait utiliser des droites, avec l’illustration (extrême) ci-dessus. Les élèves ont généralement mélangé parallélisme et orthogonalité avec plus ou moins de sucés.
Dans ce dernier extrait, nous allons voir que les élèves finissent, dans un troisième essai en général, par construire un rectangle dynamique correct.
On notera une difficulté non négligeable pour cette séance : comme les segments et les droites sont des objets distincts, une fois les droites utilisées pour construire les sommets du rectangle, il faut ensuite cacher les droites (et non pas les supprimer) et construire enfin les rectangles.
Le premier groupe a produit un rectangle comme attendu : on voit bien que les points A et B peuvent parcourir l’écran et le point C a un autre degré de liberté.
Le deuxième groupe a une production assez surprenante : la direction de [AB] est horizontale. Ceci n’est possible que si B a été pris comme point sur objet d’une droite horizontale passant par A. C’est bien entendu possible, mais reste surprenant avec la palette disponible. La seule possibilité est qu’ils aient commencé par construire une droite horizontale et ensuite on fait une parallèle à cette droite passant par un point qui sera le point A.
Le troisième groupe a bien utilisé l’orthogonalité, mais est dans la phase 2 de beaucoup de groupes : la finalisation a été partiellement perceptive (au sens où un objet n’a pas été associé à l’un des objets déjà construit).
On retiendra de cette séance qu’il convient de réécrire la phase de construction du rectangle pour que le déroulé de l’activité prenne à sa charge une partie de la difficulté rencontrée par les élèves. Une meilleure option serait déjà d’orienter vers la construction des sommets du rectangle avant de passerau rectangle lui-même pour que la vision des segments ne soit pas un parasite permanent à la construction dynamique.
S4. Instrumentation du logiciel sur le cercle et activation des propriétés du cercle
Les activités précédentes utilisaient essentiellement des segments et des droites et les propriétés de parallélisme et d’orthogonalité. On se propose désormais de travailler avec les cercles. Cette séance est donc orientée vers une instrumentation des outils associés au cercle. On a choisi, dans la phase 3, une démarche assez technique, avec comme objectif de mettre en évidence la recherche d’invariants dans la manipulation.
– Phase 1 : le dessin d’une néphroïde, pour revenir dans l’interface du logiciel (après les grandes vacances d’été de La Réunion). Fiche orientée aussi vers la dévolution de la géométrie dynamique.
Fiche élève
S4 - Phase 1 - Fiche élève
On peut être surpris de la fin de la fiche. En fait nous avions déjà vu, dans les séances en CM1 de l’an dernier (avec une autre classe), l’importance pour les élèves de jouer avec les couleurs en temps réel sur la palette de couleur de la fenêtre. Cette fois-ci, nous avons supprimé cette palette dans le gestionnaire d’environnement, mais nous avons choisi de préciser sur la fiche de travail le principe d’activation d’une trace colorée en animation, ce principe ayant été trouvé empiriquement par quelques élèves lors de la troisième séance en décembre, il s’agissait de la rappeler et de la partager.
C’est un choix délibéré de dévolution du logiciel par la compétence technique. En effet seuls les élèves ayant réalisé correctement la figure peuvent produire quelque chose d’intéressant avec l’animation et les traces : c’est donc une motivation supplémentaire à faire la figure correcte, et rapidement.
(les vidéos de la phase 1 sont dans les onglets suivants)
Opportunité en GD
S4 - Phase 1 - Opportunité en GD
En pratique de classe, on remarque très régulièrement l’opportunisme du dessin géométrique qui se traduit, souvent avec la complicité implicite de l’enseignant, par un usage des outils de la géométrie instrumentée comme des outils de dessins géométrique, au sens où, dans les constructions, le perceptif est largement présent, car l’on n’implique pas suffisamment, dans l’acte de construction, les propriétés géométriques engagées.
Cette vidéo très courte est là pour rappeler à la vigilance et à la prudence quant au passage sur un logiciel : l’opportunisme des constructions existe aussi en géométrie dynamique.
Sur cette vidéo on voit un élève qui, tirant le cercle vers le haut, allait placer son rayon de manière perceptive. Mais l’écran n’étant pas assez grand, il change de stratégie, redescend et s’approche du point, qui changeant de statut (il devient jaune, c’est-à-dire sélectionnable par l’outil en cours d’utilisation - invite l’élève à cliquer : l’élève fait donc une figure juste de manière assez aléatoire : c’est en cela que l’on parle d’opportunisme en géométrie dynamique.
La question se pose alors de savoir si ces gestes sont aussi porteurs d’apprentissages géométriques, s’ils sont conceptualisant, si, dans des cas comme celui-ci, l’engagement direct participe de l’appropriation des propriétés géométriques engagées (ici définition du cercle) ou si l’élève est seulement dans un contrat didactique construit dans les premières séances quand on mettait en relief l’importance d’attendre qu’un point soit surligné pour cliquer dessus. Dans ce dernier cas, l’élève perçoit essentiellement un apprentissage technique de l’utilisation d’un item.
L’utilisation de la géométrie dynamique peut participer à l’apprentissage et à l’appropriation de la « géométrie des propriétés des objets » (ERMEL) que si on est vigilant sur ces gestes opportunistes qui, comme certaines activités en environnement papier-crayon, peuvent ne rien construire de l’ordre du géométrique.
Dévolution et apprentissage
S4 - Phase 1 - Dévolution
Cette vidéo illustre la maitrise (assez générale dans la classe) par les élèves de l’usage des traces et des couleurs. On entend la maîtresse de la classe apprendre des élèves les manipulations à faire pour arriver à ces résultats.
On notera la remarque de l’élève qui dit que quand on modifie les couleurs à la souris « ça [l’animation] va moins vite ». Ce qu’il ne sait pas, c’est que la palette des couleurs de la figure se construit en même temps et qu’elle est vite importante.
mettre une copie d’écran ici de la palette
– Phase 2 : une construction avec 5 cercles. Utilisation des propriétés du carré pour vérifier qu’un quadrilatère est un carré. 2 ou 3 vidéos
La construction est totalement statique. C’est une construction préliminaire qui valide l’apprentissage de la manipulation des cercles par centre et point dans le logiciel et prépare l’activité de la phase suivante, bien plus technique.
Fiche élève
S4 - Phase 2 - Travail demandé
ce qui donne tout simplement cette figure
On notera la dernière question sur l’animation : c’est une autre option pour vérifier que la figure est correcte plutôt que le« Monkey » qui fait modifier aussi le centre du cercle initial et son rayon.
En effet, dans cette classe, le « Monkey » est systématiquement utilisé, peut-être un peu trop par les enfants qui semblent juste fascinés par le déplacement mais ne peuvent pas analyser véritablement ce qui se produit dans cette action (sinon que la figure est fausse, ça ils voient tout de suite)
Une question de désignation
S4 - Phase 2 - Sur la désignation des objets
Cette vidéo met en relief la subite déperdition d’attention entre celle nécessaire à la construction de la figure et son relâchement quand la construction est terminée ... mais pas l’activité.
La fiche élève part d’un cercle de centre O et d’un point A sur le cercle. Ce groupe de deux élèves ayant activé le nommage automatique des points, a eu un centre de cercle qui s’est appelé A.
On remarquera que les élèves ont bien fait la figure, cela veut dire qu’ils ont su translater tous les noms de le figure (le point A s’appelant B etc ...). On entend une certaine aisance : quand la maîtresse de la classe revient sur le fait que le centre s’appelle O, on entend un des deux élèves dire « oh, ça n’est pas important ».
Et pourtant, juste après (la vidéo est en temps réel), pour l’animation, ils oublient cette translation et ne comprennent pas la consigne d’animer le point A qui pour eux est le centre du cercle. Il faut l’intervention de l’enseignante de l’IUFM, auteur de la séquence, qui adapte tout de suite la phrase que lisent les élèves au contexte de la figure réalisée.
– Phase 3 : version dynamique de l’activité précédente, recherche d’une conjecture sur un cas particulier.
Cette fois-ci, au lieu de prendre des cercles de diamètre le rayon du cercle initial, on veut construire quatre cercles de rayons variables, mais identiques. L’objectif final étant de faire chercher une propriété d’une configuration particulière de la figure, et d’inciter les élèves à proposer une conjecture sur la solution de cette configuration particulière.
Présentation
S4 - Phase 3 - Introduction
Il n’y a pas de fiche élève, mais une alternance - pour le début de l’activité - entre un travail de présentation de l’intervenante, et une réalisation des élèves.
Les élèves ouvrent le troisième onglet de leur classeur de travail, ils se retrouvent avec la figure précédente partiellement commencée : il n’y a que le cercle initial, deux diamètres perpendiculaires et les milieux des 4 rayons.
L’intervenante précise bien que c’est la même figure, même s’il n’y a plus de noms aux points et que les points sont bien les milieux des rayons.
Puis elle commence par construire un cercle de rayon fixe, le nomme cbase et décoche l’aspect fixe de ce rayon, en montrant qu’alors on peut modifier le rayon du cercle à la souris en cliquant sur le cercle. Puis elle demande aux élèves de faire de même sur la figure de leur nouvel onglet.
Une fois ceci fait, elle présente le premier objectif de l’activité : faire une figure qui a 4 cercles de même rayon, sans être fixe comme dans la phase 2, mais variable en manipulant le premier cercle. Pour faire cela, elle explique le procédé dans un discours compréhensible par les élèves de CM2.
Pour construire un cercle de rayon fixe de même rayon que le précédent (cbase) , il suffit de donner le nom du cercle (cbase) dans le champ rayon. On voit sur le montage suivant [avec un discours « enseignant »] qu’un cercle de rayon fixe quelconque prend comme rayon celui du cercle cbase, si on donne à son rayon la valeur numérique cbase.
Explications et remarques
• Du côté de la pratique du logiciel : les noms des objets peuvent aussi être des variables algébriques qui ont une valeur numérique précise. Ainsi le nom d’un segment est une variable numérique qui représente sa longueur (dans le système d’unités du logiciel). De même le nom d’un cercle est une variable qui désigne sont rayon.
• Utiliser ce procédé en classe de CM2 doit rester dans un champ d’opérationnalité immédiate. Il ne peut se faire que dans un discours qui se situe seulement du côté de la désignation : on détermine le rayon d’un cercle par le nom du cercle de référence.
• Il est clair qu’il en résulte une représentation assez floue de ce qui se passe, car les nouveaux cercles ont bien un nom qui leur est propre, mais leur rayon prend une valeur déterminée par un autre cercle. C’est un peu ce qui se passe lors des premiers adressages indirects avec des étudiants sur un tableur, avec une différence : ici on reste dans une démarche opérationnelle, on n’essaie pas du tout de conceptualiser la démarche.
Dans les onglets suivants de cette phase 3, on voit les différentes étapes réalisées par les élèves
Constructions
S4 - Phase 3 - Construction des quatre cercles
Les élèves commencent par construire le premier cercle, le décochent, puis construisent les autres. La vidéo se poursuit par des montages sur l’activité de recherche suivante, décrite par une question assez imprécise (car ne voulant pas donner de pistes) du caméraman - aussi auteur de cet article - question assurément trop conceptuelle .
La vidéo (à 1’ 03 s) se termine par un binôme interrogé par l’enseignante titulaire de la classe qui demande « où est-ce qu’il faut s’arrêter ? ». Posée pendant l’action de l’élève sur le cercle cbase, la question est cette fois bien opérationnelle et c’est peut-être cela qui a enclenché la discussion entre les deux élèves. On entend un des deux dire « au milieu », et l’autre lui demander « au milieu de quoi ? du carré ? ». La maîtresse n’entend pas le dialogue et demande de faire une animation.
On est probablement là dans un exemple de zone proximal de développement, où l’élève, par une question directement accessible car opérationnelle, va pouvoir aller plus loin que les autres groupes.
Consigne terminale
S4 - Phase 3 - la question du contact
La maîtresse a déjà indiqué la consigne finale, la partie à réaliser après la construction du carré, elle demande aux élèves de réinterpréter sa consigne
L’élève qui prend la parole, généralement à l’aise à l’oral et en mathématique a du mal cette fois-ci à exprimer avec précision ce qui est demandé, et se fait souffler l’expression « cercle collés » qu’il reprend.
La fin de la vidéo est laissée pour illustrer, en formation, la difficulté que l’on peut parfois avoir pour passer une consigne claire quand elle n’a pas été bien préparée en amont : manifestement nous n’avions pas assez travaillé ce point précis, alors que tout a été construit pour rechercher la conjecture finale. Nous y reviendrons dans l’onglet Analyse.
Choix d’ingénierie
S4 - Phase 3 - Choix d’ingénierie
Nous sommes sur la mise en commun de cette fin d’activité. L’élève qui passe au tableau n’a pas vraiment exprimé ce qui était attendu, comme un des élèves du groupe final de la vidéo précédente ...
Il commence par « coller les cercles » selon son expression (vidéo plus bas), construit les segments du carré des milieux (on sait que c’est un carré car cela a été étudié dans la phase 2) et commence à prendre des intersections, comme ceci :
On voit clairement sur cette copie d’écran vidéo que l’élève sélectionne l’intersection à la fois des deux cercles et du segment, et donc le point cherché « est là » (selon son expression). Nous sommes encore dans le perceptif, malgré les possibilités de manipulation directe de la figure
Par ailleurs, un utilisateur habitué des logiciels de géométrie dynamique peut être surpris qu’il n’y ait pas d’ambiguïté. A priori on s’attend au comportement reconstitué et reproduit ci-dessous :
Tout d’abord en approchant la souris, il y a surlignage des 3 objets,
puis un clic de la souris propose de lever une ambiguïté.
Or ce n’est pas du tout ce qui se produit, en fait, on a une prise d’intersection de deux objets.
Or si on revient sur la copie d’écran vidéo précédente, on voit tout de suite l’explication : pour cette activité les élèves n’avaient pas à leur disposition l’outil intersection. C’est un choix qui a été fait ici et qui, à l’analyse n’est probablement pas pertinent. Si l’intersection a plusieurs fois été présente dans les activités antérieures (en particulier en S3), les élèves n’avaient jamais eu à lever une ambiguïté dans la figure (au sens d’une ambiguïté construite comme telle). Mais en fait, à cause de quelques maladresses de manipulation, pratiquement tous les groupes d’élèves avaient eu à lever spontanément des ambiguïtés, y compris dans cette séance, sans difficulté.
On aura compris en écoutant cette vidéo que le premier surpris de la situation a été l’auteur de cet article, qui comprit, au troisième clic de l’élève, qu’il n’y avait pas d’outil intersection dans la palette de construction .... ce qu’il n’avait pas vu avant, tant il été occupé par la construction du milieu des côtés par les élèves !!!
Dans cette vidéo, on notera la surprise de l’élève quand il diminue la taille du cercle cbase et que son intersection « là » (vidéo) n’est pas invariante comme il se le représentait. C’est l’occasion de remarquer aussi que l’acceptation de sa réponse dans un environnement papier crayon, sans plus de précision (c’est assez assez courant), construit de fait, peu à peu, un contrat didactique implicitement plus près du perceptif que de la géométrie des propriétés des objets.
L’extrait vidéo se termine (on voit qu’il est en temps réel) par la remarque d’un élève qui précise le point cherché comme le milieu « d’un côté du carré ».
La séance s’est terminée par un argumentaire sur le fait que les cercles ayant même rayon, sur un côté du carré le point de contact est bien à même distance des deux extrémités du côté, même si la question de l’alignement n’a pas été abordée. La séance s’est donc terminée sur un réinvestissement de propriétés élémentaires du cercle, du milieu de deux points, dans un agencement assez nouveau pour les élèves.
En pratique deux groupes seulement avaient vu ce lien invariant entre le point de contact des cercles et le milieu d’un côté du carré. Cela peut provenir à la fois de la difficulté de percevoir les propriétés géométriques, mais aussi d’une consigne pas suffisamment claire.
Analyse
Analyse de la séance S4
Cette séance a été construite dans le but de travailler les deux types de cercles disponibles dans le logiciel, le cercle par centre et point et le cercle de rayon fixe. Il s’agissait aussi d’introduire naturellement une situation où l’on devrait « défixer » le cercle de rayon fixe et utiliser ainsi un cercle dont le rayon est directement manipulable à la souris, sans qu’il soit défini par un point. Enfin, même s’il s’agissait d’une séance d’intrumentation autour du cercle, nous voulions la terminer par une question d’investigation permettant de faire fonctionner les propriétés du cercle, essentiellement sa définition.
La phase 1, on l’a déjà dit est essentiellement une reprise de contact avec le logiciel, après les vacances australes - 5 semaines en décembre janvier au milieu de l’année scolaire - avec une réactualisation, institutionnalisée par la fiche de travail, de la dévolution produite par les animations.
La phase 2 est une instrumentation du cercle. Une partie mathématique importante, non rendue en vidéo (car lente et donc longue), a été la vérification collective, avec les outils de test du logiciel, que le quadrilatère BCDE est un carré. La vérification est du niveau CM2 : énumération par les élèves des propriétés à vérifier, et vérification au vidéo projecteur. Même si l’enseignante peut orienter la réflexion, il n’y a pas de recherche d’optimisation, par utilisation effective d’une caractérisation précise du carré (on verra en S7 un exemple précis de justification acceptée en classe de CM2, mais dont la validation relève de la classe de 4°). Il en résulte, à la surprise de la titulaire de la classe elle-même, que la géométrie des propriétés des objets a été largement activée chez les élèves.
La seule partie délicate de cette phase a été l’apprentissage de l’outil test « point équidistant » et son utilisation à un sommet (C) et aux deux sommets adjacents (B et D) pour vérifier que les longueurs de deux côtés adjacents (on a dit « consécutifs ») sont égales. Toutefois, le rapport au cercle de centre C passant par l’un ce ces deux points est l’occasion d’un changement de cadre original qui permet de comprendre autrement la définition du cercle.
Cette partie, même si elle a été collective, au vidéo projecteur, n’en a pas moins été porteuse de sens dans deux directions : la formulation mathématique des propriétés du carré et l’usage d’outils de vérification. L’usage simplifié des tests logiciels participe à la prise de sens de l’outil physique comme instrument de validation d’une propriété (essentiellement équerre et compas).
La Phase 3 est techniquement plus ambitieuse avec la construction d’une figure dynamique d’un nouveau genre pour les élèves : des cercles vont changer de rayon, de façon explicitement prévue, en fonction d’un autre cercle. C’est une figure d’un type nouveau au sens où l’on n’explore pas une situation géométrique donnée (pour mettre en évidence une nouvelle propriété d’objets géométriques déjà identifiés), mais on construit une figure dynamique pour elle-même, avec les contraintes spécifiques, « comme on a voulu » dira un élève. Autrement dit, on est sur une ébauche de simulation d’un processus. Ensuite, une fois réalisée, cette figure porte son propre questionnement mathématique.
L’aspect technique, abordé par étape, a été bien réussi. Tous les groupes sont parvenus à la figure avec les 4 cercles dynamiques. Toutefois cette réussite est purement opératoire. Les élèves ayant vu ce qu’il faut produire, et la figure étant attrayante en soi, ils recommencent jusqu’à la réussite : ils rencontrent essentiellement des erreurs de frappe dans la recopie du nom du cercle. Cet aspect purement opérationnel aurait pu être équilibré par une présentation partiellement plus explicative, voire conceptuelle de la démarche, même s’il est clair qu’on est à la frontière du possible.
La partie d’investigation finale, la recherche du point de contact à partir du carré ne s’est pas déroulée comme prévu. Comme déjà mentionné, la consigne collective n’a pas été claire sur ce point, mais un autre facteur a probablement aussi joué : le comportement des trois adultes dans la classe. En effet l’enthousiasme que nous avons montré devant la réussite assez rapide de la construction a probablement laissé percevoir aux les élèves, que, la figure faite, l’essentiel du contrat didactique a été accompli. Nous n’avons pas maintenu la distanciation face à cette réussite qui aurait été nécessaire à la poursuite de l’activité de manière concentrée, et seuls deux groupes ont vu la relation aux côtés du carré.
Cette phase 3 a donc été essentiellement une expérimentation sur une démarche de simulation. Au regard des séances suivantes, même si elle va être réinvestie par certains élèves, on peut dire que cette partie de la séance n’a pas été véritablement utile pour la suite et qu’au contraire, il a manqué une partie d’instrumentation de l’outil compas (la troisième façon de construire un cercle avec le logiciel) qui aurait pu servir à faire plus vite une partie de la figure de la séance 7.
S6. Évaluation diagnostique sur l’instrumentation du logiciel
Cette évaluation s’est faite à travers deux constructions du pentagone régulier :
– l’une avec seulement un cercle intermédiaire (celle que l’on utilisait quand on faisait les calculs trigonométriques associés en TS, par exemple avec les complexes ... mais ce n’est plus au programme) ;
– l’autre, plus complexe avec plusieurs cercles intermédiaires.
La rédaction de la seconde fiche a été un peu plus complexe à comprendre pour les élèves, car il fallait lire les phrases jusqu’au bout avant d’avoir toute l’information sur la construction en cours. Ce second plan de construction mériterait d’être réécrit, au moins avec un avertissement.
On a retenu comme définition d’un polygone régulier (implicitement convexe), une définition qui n’implique pas les angles : c’est un polygone inscrit dans un cercle dont les côtés sont de même longueur. C’est la raison pour laquelle les deux constructions sont inscrites dans un cercle.
Lors de la première correction collective, on a pris soin de vérifier avec les mesures que les côtés étaient de même longueur. On aurait pu le faire avec le « test d’équidistance », mais des élèves ont exprimé le désir de « voir les mesures » comme s’ils voulaient vérifier eux-mêmes et ne pas laisser la vérification à un outil « boite noire » sur lequel on n’a aucune information et auquel il faut faire entièrement confiance.
Les programmes de construction
S6.a - Les deux programmes de construction
Correction élève
S6.b - Correction de la construction sur l’instrumentation des cercles
Le programme de construction est lu phrase par phrase par une élève, une autre élève fait la construction en temps réel sur l’ordinateur relié au vidéo projecteur. Trois caméras sont ainsi disposées : une sur le plan de projection, une sur l’écran de l’ordinateur où travaille l’élève, la troisième sur les deux élèves.
Commentaires sur la vidéo
a) On remarque que l’élève commence un peu avant. Ayant mis le nommage automatique le centre de son premier cercle, sans plus de précaution s’appelle A au lieu de O. Au lieu de corriger dans l’inspecteur d’objet, l’élève efface sa construction et reprend la figure en anticipant le nom de O. Ce procédé paraît remarquable, mais comme on va le voir, il est systématiquement utilisé - certes de manière efficace et rapide - ce qui est aussi un signe de non expertise : l’expert pour les maths à l’école primaire est celui qui dispose, selon Brissiaud, de plusieurs procédures pour accomplir une tâche, ce qui n’est pas le cas ici.
b) On notera au tout début (à 27 s) de la construction, alors qu’il y a deux points placés à l’écran, O et M, que la phrase « la droite (O) recoupe le cercle en B » ne pose pas de problème, et n’en n’a posé à personne. Cela paraît complètement naturel. De même (à 56 s) quand l’élève dit « la perpendiculaire à la droite (OM) en O recoupe le cercle en C et D », là non plus la construction ne pose pas de problème.
Remarque technique : on a laissé l’écran vidéo projeté sur cette partie pour illustrer qu’il peut y avoir des configurations (de carte graphique ?) pour lesquelles l’engagement direct de la construction de la droite avant le second clic, que l’on verrait sur l’écran n’apparait pas au vidéo projecteur.
c) Malgré les remarques d’aisance décrites au point précédent, alors qu’il y a deux cercles, deux droites et 6 points sur la figure, la phrase (à 1 min 45 s) « la droite (BI) coupe le cercle ... » perturbe l’élève qui officie, et d’une manière générale elle a perturbé tous les binômes. Dans les première phrases, la référence à une droite était implicitement procédurale, il était implicite qu’il fallait la construire. Cette fois, la figure commençant à être complexe, on cherche la droite avant de la tracer. Ce qui est alors surprenant c’est que, ne la trouvant pas, il n’est pas si naturel que cela de la construire. Pendant le travail individuel, les élèves ont été perturbés, et il a fallu dire explicitement à plusieurs binômes de construire la droite (BI). Il serait intéressant de reproduire cette situation dans des contexte différents bien définis pour voir si c’est la longueur de la consigne qui a perturbé les élèves ou le début de complexité de la figure (ou les deux...).
d) On voit (vers 2 min 20 s) que là encore - comme en S4 - les élèves utilisent l’outil point pour les intersections à la volée, en particulier parce qu’ils n’ont pas l’outil intersection. On sait que pour les logiciels de géométrie dynamique, l’intersection à la volée, en terme de continuité des intersections, quand il y en a deux comme ici, est toujours plus précise que l’outil intersection. C’est la raison de la réaction un peu « réflexe » de ne pas donner l’outil intersection, mais sur des figures aussi simples il n’y aurait pas de problème de continuité (qui se traduirait dans des situations plus délicates, par l’échange des points E et F par exemple).
e) La construction de deux points P et Q du pentagone se déroule vers 3 min. Vers 3 min 50 s, alors que l’élève manipule les outils avec aisance, on voit qu’une forme d’instrumentation n’est pas tout à fait aboutie : l’élève place correctement le point N, mais avec un outil cercle au lieu d’un outil point. Elle aurait pu tout à fait cliquer sur l’outil point pour placer son point R, mais elle a effacé la dernière construction (bonne instrumentation de cette pratique) avant de recommencer avec l’outil point. On aurait pu apprendre aux élèves que ce n’était pas nécessaire. L’attitude est intéressante à observer : alors qu’il ne s’agit que de l’intersection de deux cercles, on voit qu’il y a cette prégnance de l’environnement papier-crayon dans cette manipulation, à savoir qu’il faut effacer quand on n’a pas utilisé le bon outil. Cette attitude, cette prégnance ne sont pas propres aux jeunes enfants de CM2, on la retrouve en formation initiale des futurs maîtres. Il faut un travail d’appropriation du nouvel environnement pour que l’on développe des schèmes d’action qui lui sont propres et qu’on ne reproduise pas les schèmes d’un autre environnement, un peu comme quand un pianiste pose ses doigts sur un clavier de clavecin ou d’orgue, il doit (fortement) adapter son toucher.
De cette séance S6, la troisième consécutive à un rythme hebdomadaire, on retiendra une instrumentation de bonne qualité. Les élèves n’ont pas le même niveau d’instrumentation sur les mêmes outils. Certains utilisent très systématiquement l’inspecteur d’objets, alors que dans la vidéo présentée dans cette séance, il n’est jamais utilisé.
Le rythme hebdomadaire de ces trois séances a certainement joué un rôle déterminant dans l’efficacité de cette instrumentation.
S7. Un travail d’investigation des élèves
sur le thème de la reproduction d’une figure
Il s’agit de la dernière séance programmée dans l’année. Elle est centrée sur la reproduction d’une figure, avec analyse collective de la figure avant sa reproduction. La figure comprend deux carrés concentriques, celui à l’extérieur étant de côté double (CAPMaths CM2).
La présentation faite aux élèves est la suivante : la partie droite de la figure est reprise d’un ouvrage, c’est comme une figure papier à reproduire. Le segment [$A_1$$B_1$] est une copie de [AB] (même longueur) comme sur votre propre feuille de papier : comme vous pouvez déplacer et tourner votre feuille en travaillant, on peut déplacer $A_1$ et faire tourner $B_1$1.
Il s’agit tout d’abord de déterminer les propriétés de la figure de droite, qu’il faut analyser avec les outils du logiciel, pour déterminer les quadrilatères à reproduire sur le segment [$A_1$$B_1$], puis de reproduire la figure.
Une partie importante de la séance (12 min), non reproduite ici, a donc consisté à justifier (collectivement) que les deux quadrilatères sont des carrés, et à justifier la dimension du plus grand par rapport au plus petit. En pratique les élèves font des propositions et l’intervenante soit exécute les tests proposés soit encore suggère des pistes si nécessaire.
Par exemple le fait que le grand carré ait pour longueur de côté le double de l’autre a suscité cet argument chez un élève « c’est le double car sinon ça serait trop compliqué à faire ». La question du double est posée en même temps que, implicitement, la complexité des décimaux pour les élèves. Mais l’argument doit être mathématisé ... D’une manière générale, le rapport entre les deux longueurs a tout de suite été perçu comme de l’ordre du multiplicatif et non pas de l’additif (mais on a souvent déplacé A dans la présentation).
En pratique le premier quadrilatère vu par les élèves a été ... le troisième, celui non mentionné, le losange, ce qui a rallongé cette partie de la séance car nous avons d’abord dû valider que l’on avait affaire à un losange (ce qui n’était pas prévu). D’un autre côté, une nouvelle utilisation de l’outil test d’équidistance a permis de le réactiver pour le carré : le traitement des deux carrés sera plus rapide.
Là encore des élèves ont demandé - pour le losange - à voir les mesures des longueurs comme pour valider eux-mêmes le test d’équidistance.
On peut penser que le test d’équidistance est trop abstrait. Mais on peut aussi penser que c’est une expression de la prégnance de la mesure dans la pratique géométrique : sans autre habitude que de mesurer pour vérifier l’égalité de longueurs, alors que le compas est un outil aussi naturel et plus précis), les élèves peuvent avoir besoin de transférer leurs schèmes d’action.
Choix divers
S7.1 - Les choix de la séance
Le choix des variables didactiques
Entre une figure comme celle proposée pour cette séance et un dessin dans un manuel scolaire il y a une grande différence, celle des objets initiaux de la figure. Cela signifie qu’en géométrie dynamique, il y tout un choix de variables didactiques à faire, dont il faut bien prendre conscience, car ces choix conditionnent les propriétés qui vont être en jeu, et la difficulté de l’activité.
Par exemple, on a choisi de donner aux élèves un côté de carré, alors que la figure à reproduire est modifiable par centre et sommet. C’est un choix pour travailler essentiellement sur les côtés des quadrilatères en général et du carré en particulier.
Si on avait choisi de donner le centre et un sommet du carré, l’activité aurait été très différente, on aurait eu à travailler sur les propriétés des diagonales. On a préféré ici s’en tenir aux définitions des rectangles, carrés, losanges, plutôt qu’à les propriétés caractéristiques des diagonales. D’autant que le fait que ces propriétés caractérisent mathématiquement ces quadrilatères n’est qu’au programme de 5°.
On a surtout choisi de donner aux élèves le côté du plus petit carré. C’est un choix lourd qui complexifie l’activité, car il va falloir construire des symétriques. Dans notre analyse a priori, nous avons fait ce choix pour activer les propriétés du cercle avec les objets rayons et diamètre : la longueur d’un diamètre est double de celle d’un rayon, d’où une construction possible avec des cercles. Si on avait choisi, au contraire, un côté du grand carré comme donnée initiale, les élèves auraient eu à construire essentiellement des milieux, l’activité aurait été bien plus simple à réaliser, engageant moins de propriétés mathématiques, et probablement moins riche d’enseignement.
Le choix des constructions acceptables
On a choisi de bien distinguer :
– la phase d’analyse de la figure, dans laquelle nous attendions un vocabulaire précis, et sinon une rigueur, au moins un argumentaire pour justifier des propriétés des quadrilatères.
– la phase de construction pour laquelle des constructions exactes mais largement non justifiables mathématiquement sont validées sans réserves.
En effet, les élèves ont une forte tendance à reproduire la procédure qui fonctionne sans voir qu’une fois une première procédure engagée, elle ouvre d’autres voies. Cette tendance n’est d’ailleurs pas propre aux élèves de cycle 3, elle est largement partagée par tous les apprenants à tous les niveaux de scolarité.
Une fois construits deux côtés consécutifs d’un carré avec un cercle (partie gauche), on s’attend à la construction qui consiste à ajouter une perpendiculaire. Pour la justification de la construction du carré, un discours mathématique cohérent consisterait à dire que les trois angles droits justifient que c’est un rectangle (propriété supposée déjà vue ou admise) et deux côtés consécutifs égaux (autour de B) justifient le carré, comme rectangle ayant deux côtés consécutifs de même longueur.
On n’attend pas une logique aussi précise, dégagée individuellement (cela relève du début de collège). Mais dans le cadre d’une mise en commun, ce genre de preuve peut se dégager collectivement, même si l’enchaînement hypothético-déductif ne sera généralement pas perçu comme tel : pour des élèves de CM2, l’enchaînement des arguments relève plus de la narration que de la logique. C’est par le discours qu’on peut faire sentir, chez certains, qu’une argumentation mathématique est différente d’une narration. Selon l’implication de la classe en géométrie, selon sa pratique, on peut aussi plus simplement utiliser le logiciel pour explorer et valider, de manière instrumentale, les propriétés ou des relations entre les propriétés à partir de la construction.
En fait aucun élève n’a fait la construction envisagée comme étant la plus simple (mathématiquement) a priori. Tout le monde a fait cette construction, en reproduisant la procédure du premier cercle sur le second sommet :
La justification que les angles en C et D sont droits, et que [CD] est de même longueur que les trois autres côtés, est alors bien plus complexe, et n’est pas du tout envisageable ni en CM2 ni même en début de collège. Elle relève de la classe de 4°, de l’utilisation de Pythagore pour justifier que les diagonales sont de même longueur. On peut poursuivre par des propriétés sur le centre du cercle circonscrit d’un triangle rectangle ou selon la démarche, utiliser des propriétés angulaires des triangles isocèles.
Note culturelle
Cette figure est connue comme étant un cas particulier du quadrilatère de Saccheri, utilisé (1733) pour étudier le fameux postulat d’Euclide sur les parallèles. Cette figure, toute banale qu’elle puisse paraître, n’est pas triviale et a fait travailler, sur les fondements de la géométrie, plusieurs générations de mathématiciens.
On comprendra mieux l’attitude de validation implicite, c’est-à-dire une attitude opératoire, car pour les élèves, la grande différence conceptuelle entre les deux constructions n’a tout simplement pas de sens. Didactiquement, on peut dire que l’on construit en géométrie des schèmes d’actions corrects, mais qui ne seront validés que quelques années plus tard, et qu’on a cette attitude car la perception de gestes mentaux (pourtant si) différents dans des cas comme celui-ci n’est pas clair pour les élèves.
L’organisation de la partie construction
Après un travail collectif d’analyse de la figure, la séance s’est déroulée ainsi :
– Étape 1 : construction du point C1 (et du carré)
– Étape 2 : correction de la construction de C1
– Étape 3 : construction du carré A1B1C1D1 individuellement
– Étape 4 : recherche de la construction de M1
– Étape 5 : correction de la construction de M1
– Étape 5 : construction individuelle du second carré, fin de la figure
– Étape 6 : correction de la fin de la figure.
Les vidéos des onglets suivants illustrent les différentes voies de réflexion, d’errement ou de réussite des élèves
Perceptif
S7.1 - Première approche, perceptive ou naïve
Ces deux extraits très brefs montrent que, même après un quart d’heure de mise en commun sur les propriétés du carré et du losange, la première reprise de contact de certains élèves avec le problème est encore la voie perceptive.
Si nous avons choisi de montrer ces deux extraits, c’est pour illustrer à nouveau, à quel point la prégnance du perceptif chez certains enfants est très forte, et comment l’opportunité de ne représenter que des formes est toujours présente. Autrement dit, dans l’environnement papier-crayon, on n’utilise très souvent les outils de la géométrie que comme des instruments de dessin géométrique, sans la valeur ajoutée des propriétés géométriques que les programmes proposent d’y mettre.
Ces premières approches, perceptives ou naïves, montrent aussi l’intérêt que peut avoir l’usage d’un logiciel en géométrie : il n’est pas couteux, pour les élèves, de supprimer leurs premières figures et de reprendre une autre piste, ce qui est beaucoup plus couteux dans l’environnement papier-crayon : c’est l’une des raisons fréquente pour lesquelles les élèves « n’aiment pas » la géométrie (la difficulté de faire une figure propre et correcte avec l’instrumentation papier-crayon).
Il ne s’agit pas de proposer le passage au tout numérique en primaire (l’instrumentation, les constructions dans le monde sensible sont un objectif du cycle 3), mais de montrer que le passage par le numérique et la géométrie dynamique (quelques séances y suffisent) peut efficacement réconcilier des élèves avec la pratique géométrique (et leur permettre d’appréhender les propriétés des objets autrement.
Réinvestir S4
S7.2 - Tentative de réinvestissement de la phase 3 de S4
Dans la troisième partie de la séance 4, les élèves avaient utilisé le nom d’un cercle (cbase) pour produire des cercles de même rayon. Nous avions bien dit qu’il était délicat de construire une représentation correcte en CM2 (on utilise le nom pour désigner la longueur) et que les représentations construites autour de cette activité ne pouvaient être que floues, d’où la proposition d’abandonner cette partie de la séance pour l’avenir.
Nous ne nous attendions pas - pas du tout - dans l’analyse a priori de cette séance - que des élèves puissent avoir l’idée de réinvestir cette démarche, comme on va le voir dans la vidéo suivante. Cette vidéo contient deux parties qui vont être analysées : l’idée de reprendre le nom s28 d’un segment pour reproduire la même longueur, puis la fin de vidéo où un élève propose une autre démarche.
Tout d’abord, l’idée de reproduire le nom montre une appropriation assez sophistiquée du logiciel, au moins quant à ses potentialités. Bien entendu, il y a confusion entre la désignation et la fonctionnalité (la relation à la variable) du nom comme longueur, mais compte tenu de la façon dont s’est passée la séance S4, c’est incontournable.
Dans l’environnement du monde sensible, une des difficultés à faire émerger les procédures géométriques vient de ce que les élèves ont des actions correctes, mais généralement tellement furtives, tellement prises dans d’autres considérations, qu’ils ne les voient pas - ou ne s’en rappellent pas. Il en résulte que que ces procédures, ou attitudes, ne peuvent pas être conceptualisées, ni même partagées : elles restent un savoir individuel, éventuellement ponctuel et temporel.
On peut alors faire la même analyse - critique - de la pratique de notre phase 3 de S4. La façon dont a été présentée la construction des cercles de « rayon cbase » a été trop furtive pour les élèves pour qu’elle puisse effectivement être conceptualisée. On aurait pu passer plus de temps sur cette question, mais ce n’était pas le but non plus de la séance (car trop éloignée des objectifs géométriques du cycle 3).
On retiendra que les analyses (ERMEL géométrie) sur les aspects d’impermanence des procédures géométriques peuvent parfois, partiellement, s’appliquer à la pratique de la géométrie dynamique. Là encore, la différence est dans la plus grande facilité à reproduire l’expérience, l’élève n’ayant qu’à manipuler la souris en fait : il peut donc être plus facilement sollicité à reproduire son geste que dans un environnement qu’il perçoit comme plus lourd et difficile.
Analyse du s28*
Les élèves voient le nom s28 du segment à reproduire perpendiculairement, parce que leur inspecteur d’objet est ouvert. Comme il y a difficulté à envisager cette reproduction (un élève dit « je vois pas comment »), l’idée vient de reprendre s28 comme on avait repris cbase. L’autre élève dit « on a qu’a le nommer s28, car comme ça il sera COMME s28 ».
Les élèves sont dans une démarche en acte, comme chacun de nous dans une attitude exploratoire, et ne voient pas qu’ils sont sur une droite, pas un segment, et ils renomment donc la droite s28. Le logiciel met automatiquement une * à un nom déjà utilisé pour signaler à l’utilisateur une possible confusion, d’où l’apparition de s28* à l’écran.
Deux remarques mathématiques sur cette situation :
– Les élèves ont l’habitude de travailler sur les droites numériques, et d’y placer des points d’abscisses données (sur les fractions et écritures fractionnaires CM1, les décimaux CM2 par exemple). Il est possible que pour cet élève, dans sa démarche en acte, implicitement il s’agissait de reporter s28 sur la droite, comme s’il plaçait une abscisse.
– Techniquement, avec l’interface du logiciel, la tentative ne pouvait aboutir de cette façon, car il faut à la fois la longueur s28, par exemple dans l’onglet numérique d’un segment, mais aussi sur la perpendiculaire au segment initial : mathématiquement on est au cœur de l’essence même de l’euclidien (la reproduction d’une longueur dans une direction donnée) par rapport à une démarche affine, et donc au cœur même de la nécessité d’un cercle. Cette remarque, qu’on pourrait croire a priori technique ou d’interface, montre bien que la construction d’un carré est une situation caractéristique de la géométrie euclidienne et qu’il n’est pas possible de se passer d’un cercle.
« Essayer indéfiniment »
Suite à l’essai précédent infructueux, les élèves font une autre tentative, ils cherchent l’outil « équidistant », ils semblent hésiter à le prendre, et l’extrait vidéo se termine par ce fabuleux « on a qu’a essayer indéfiniment ».
Pour un élève (c’est le même, on reconnait sa voix) qui a essayé de placer la longueur s28 sur la perpendiculaire, la remarque, même si elle fait sourire, est porteuse de sens - l’élève ne plaisante pas en disant cela : c’est un autre tentative. Le sens implicite, là encore « en acte », est probablement celui d’une démarche non pas approximative comme dans l’onglet précédent, mais plutôt celui d’approximations successives, avec cette image bien intégrée, par diverses pratiques d’exercices sur les décimaux : comme avec les exercices d’encadrement, où les décimaux permettent d’approcher de plus en plus certains nombres, ici la mesure de s28 doit pouvoir approcher, puis atteindre, ce nombre décimal que l’on voit à l’écran 2,03254.
Une hypothèse qui peut être faite à ce sujet (elle demanderait à être étudiée plus en avant dans d’autres séances, dans d’autres situations) est que pour certains élèves, l’affranchissement des contraintes techniques de réalisation ouvre à l’opportunité de s’exprimer plus conceptuellement sur les tâches à accomplir. En effet l’expression est purement conceptuelle, l’élève n’envisage pas réellement « d’essayer indéfiniment », et par ailleurs elle n’a strictement rien d’opérationnel car il n’envisage pas non plus de procédure pour cela, du fait que les élèves de CM2, s’ils travaillent souvent sur des encadrements, n’en produisent pas eux-mêmes, cette activité demandant une bonne pratique des calculs est laissée au collège.
Du fait du réglage d’environnement de cette figure - la longueur d’un segment est affichée par défaut - un nombre apparaît à l’écran, un nombre qui a plus de décimales que ceux utilisés en classe, et bien plus que ce que produirait une lecture directe avec un double décimètre sur un cahier. Nous sommes au début d’une activité de géométrie et pourtant cette situation provoque chez un élève une expression qui illustre, a minima, des appropriations conceptuelles certaines sur les décimaux. Cette expression là, et le sens qu’elle porte, n’auraient jamais émergé dans un environnement papier-crayon, compte tenu de la richesse de l’environnement qui l’a permise.
On voit donc que, dans certains cas, le plongement dans un environnement riche, dynamique, peut aider à des expressions verbales au niveau de cette richesse, révélatrices de conceptualisations éventuellement avancées ou en cours de construction.
Cette analyse là n’augure rien des capacités de production de la tâche demandée : ces élèves vont réaliser le carré, mais vont mettre eux aussi du temps pour y arriver.
Diagonales
S7.3 Utilisation inappropriée des tests
Le court extrait suivant pose la question de l’instrumentation des tests, et montre que celle effectuée dans cette séquence n’a pas été optimale, au sens où des élèves vont l’utiliser dans un contexte où elle ne peut être opérante pour des questions de précision.
L’idée de ce binôme est intéressante a priori, et elle montre une réelle familiarité avec les propriétés géométriques du carré. Elle consiste à construire un rectangle avec un degré de liberté (le fameux point C) et ajuster ce point en testant si les diagonales du rectangle sont perpendiculaires : on aurait alors un carré.
Hélas, cela ne peux pas fonctionner. En effet en déplaçant un point à la souris sur une droite on va (grossièrement) de pixel en pixel, donc la précision est assez grossière. Or les tests de parallélisme sont précis à un millième de milliardième, donc sans commune mesure avec la précision en manipulation directe. Autrement dit si on ne construit pas - exactement - la solution, les tests ne valideront pas une construction approximative. On comprend bien la démarche, le test doit valider une construction exacte.
Dans l’instrumentation des tests, il faut donc préparer les élèves à cette réalité, car une utilisation comme ils l’envisagent ne peut qu’être décevante a priori pour eux : ils font l’effort d’utiliser une caractérisation d’un carré et cette caractérisation est inopérante en pratique.
En fait, il faut comprendre que passer par les diagonales déplace le problème : il faut arriver à construire les diagonales effectivement orthogonales.
SoluceC1
S7.4. Correction de la construction du point C1
Cette vidéo a été présentée pour montrer le vocabulaire spontanément utilisé par les élèves. Au moins voit-on que certains élèves ont dû inventer un vocabulaire personnel assez éloigné du vocabulaire usuel de l’environnement papier-crayon...
On notera le vocabulaire généralement assez précis sauf une fois : à la question « pourquoi une perpendiculaire ? », l’élève répond (21 s) dans le monde perceptif « pour voir un angle droit » en non pas « pour avoir un angle droit » comme on aurait pu s’y attendre dans un contexte de propriétés géométriques et comme le reprend l’enseignante.
FinCarré
S7.5. les constructions élèves du carré
Le point C1 ayant été construit par un élève devant un groupe classe, voici les constructions réalisées par les élèves pour le carré final. On y voit que tous les groupes ont utilisé deux cercles.
La vidéo montre aussi (à 26 s) que des élèves ont utilisé le cercle de rayon fixe pour le report de longueur. Il en résulte que la figure construite est un rectangle (on le voit avec le Monkey). Mais on voit aussi que le point D est pris sur le cercle de manière perceptive, ce qui produit une figure délicate à interpréter par les élèves d’autant que, là encore, la prise perceptive d’un point sur objet peut être, pour ces élèves, un acte furtif qui peut avoir été oublié.
Cela n’a pas été fait dans cette classe, mais dans un environnement où l’enseignant peut projeter l’écran des postes des élèves, il serait intéressant de projeter ce type d’erreur et de montrer en temps réel comment l’action du Monkey permet d’interpréter ce qu’on fait les élèves.
Cette attitude peut-être particulièrement efficace en terme de méta-cognition géométrique et d’appropriation des définitions (parfois des propriétés) des objets géométriques. Voici par exemple une copie d’écran de la vidéo précédente, lors de l’utilisation du Monkey :
On y voit clairement que l’élève a, successivement :
– utilisé les cercles de rayon fixe (2 cercles de même rayon, différent de la longueur $A_1$$B_1$.
– construit correctement $C_1$ (intersection du cercle et de la perpendiculaire en $B_1$).
– comme il n’y avait pas la perpendiculaire en $A_1$ à ($A_1$$B_1$), il a ensuite pris de visu un point $D_1$ sur le cercle de centre $A_1$, ce point correspondant perceptivement à la solution dans la configuration écran.
– enfin, il a pris la perpendiculaire en $C_1$ à la droite ($B_1$$C_1$)
On voit cet ordre, car cette droite est bien tangente au cercle centré en $A_1$ mais ne passe pas par $D_1$.
On voit surtout que cette démarche aurait été validée dans l’environnement papier, ce que nous avons appelé, en commentaire à la première vidéo, l’opportuniste du dessin géométrique.
La vidéo se termine par ce qui est autorisé aux élèves qui ont pris un peu d’avance .... même si cela n’a rien de mathématique, c’est alors de l’instrumentalisation du logiciel, phase qui peut éventuellement servir à renforcer certaines instrumentations.
Milieu et symétrique
S7.6. Retrouver les symétrique à partir des milieux
Les élèves découvrant un logiciel de géométrie dynamique s’approprient à leur façon la richesse des outils mis à leur disposition. Ils font des expériences en mettant en œuvre les outils à leur disposition avec une imagination certaine. Même si leurs démarches et leurs expérimentations, toutes nouvelles, ne peuvent aboutir géométriquement, mathématiquement, elles sont porteuses d’une réflexion intéressante. Là encore ce qu’on va voir ici (les 45 premières secondes de la vidéo) aurait mérité, si la salle avait été équipée, une projection collective de la démarche pour un analyse qui déboucherait sur une méta-cognition intéressante. On aurait pu aussi copier la figure sur une clé USB, ou simplement reproduire la démarche, mais cela n’a pas été fait. Psychologiquement, prendre la main sur un poste pour le projeter est plus signifiant, on présente le travail original - et donc l’idée originale d’un élève, on ne la reproduit pas.
Nous sommes dans la phase finale de la construction, il s’agit de construire le point $M_1$, c’est-à-dire un point du grand carré. Chacun a vu, en préambule, collectivement, qu’il faut construire $M_1$ tel que $A_1$ soit le milieu de $O_1$ et $M_1$, car A est le milieu de O et M. On imagine voir intervenir la relation entre un rayon et un diamètre, et donc l’usage d’un cercle.
Mais l’engagement direct de l’outil milieu qui permet de voir le milieu pendant sa construction donne d’autres idées à un groupe d’élève :
Ces élèves prennent le milieu du centre du carré, $O_1$, et d’un point en cherchant à faire coïncider le milieu avec le point $A_1$. La démarche est intéressante, ils inventent "le milieu à l’envers", ce qui sera la symétrie centrale au collège.
Mais en « secouant la figure » (Monkey) les élèves voient que le point placé se déplace et donc que les sommets du carré qui vient d’être construit ne sont pas les milieux attendus. En tant qu’enseignants anticipant ce qui va se passer, on peut être perturbé par les traces alors que pour les élèves cela peut être un autre type d’information : le « carré » se déforme. Une autre culture que la nôtre s’installe ...
Il est intéressant de remarquer également que pour les élèves, il n’y a pas vraiment d’erreur (mathématique, de raisonnement), ils sont dans un registre opérationnel, pour eux, ce qu’ils viennent de faire est juste une procédure qui ne fonctionne pas. De fait, ces élèves - ceux de ce binôme - sont dans un apprentissage de type procédural, le questionnement mathématique n’est pas spontanément engagé. Il commence à l’être quand les procédures immédiates, perceptives comme celle-ci, sont mises en échec.
Cette attitude qui consiste à essayer quelques manipulations avant de commencer à s’engager dans une réflexion mathématique, semble assez partagée. Elle milite en faveur de l’usage de la géométrie dynamique, car pour que la réflexion émerge à la suite d’une série de voies sans issues, il faut que ce travail préliminaire soit peu couteux pour que les élèves aient envie de commencer à entrer dans la réflexion mathématique. Dans l’environnement papier crayon, après deux tentatives infructueuses, la lourdeur des constructions, la noirceur de la feuille parfois, amènent souvent à l’abandon d’une nouvelle tentative. Par ailleurs l’usage du monkey, quand la figure n’est pas trop complexe, avec un peu de pratique, permet de corriger ses représentations.
Une autre réflexion pourrait être envisagée ici, en dégageant un invariant entre l’utilisation précédente, elle aussi, d’une certaine façon « à l’envers » du test d’orthogonalité, et ici l’utilisation « à l’envers » du milieu. Cet invariant pourrait être que la dimension fonctionnelle des outils, si elle est acquise de manière opérationnelle, n’est pas perçue de manière conceptuelle.
Certes, on peut dire aux élèves que le milieu est un objet construit à partir de deux autres, et que ce n’est pas là ce qu’ils font : ils perçoivent bien que ce n’est pas la même chose (surtout quand le monkey le confirme), en particulier parce qu’ils voient bien que le geste n’est pas le même : ils ajustent le milieu. Pour autant, la différence conceptuelle n’émerge pas, et c’est probablement pour cela que la symétrie centrale n’est qu’au programme du collège.
Relation entre connaissance et savoir
La suite de la vidéo est un interview d’élève qui a su construire le point M1, et qui sait pourquoi ce qu’elle a fait est juste. Mais comme chez un expert qui ne sait pas pourquoi il sait ce qu’il sait (en référence aux exemples de connaissance opérationnelle de Vergnaud en didactique professionnelle), elle n’arrive pas véritablement à conceptualiser mathématiquement son expertise : ce qu’elle sait est une connaissance personnelle. Cette connaissance personnelle devient un savoir, transmissible, quand il est dépersonnalisé, décontextualisé. Ici quand on l’aura relié à des propriétés géométriques. C’est le rôle de la mise en commun puis de l’institutionnalisation par l’enseignant.
On voit bien ici le rôle de l’enseignant qui permet ce passage de la connaissance personnelle (même assurée) au savoir, capitalisable, ré-exploitable dans d’autres situations.
TestValidation
7.7. Exemple d’auto-évaluation par usage des tests
Dans ce dernier extrait vidéo, un élève utilise les tests du logiciel pour confirmer son hypothèse que la construction faite par son camarade est fausse. Contrairement aux autres, cet extrait vidéo n’est pas en temps réel : on voit la construction du point D1 d’un premier élève, puis sa construction du carré à partir du 3° côté (le saut temporel est là). La réaction du second élève se fait à la construction du 4° côté du carré : le lecteur est invité à observer lui aussi que l’on voit bien, à la création de ce 4° côté, que l’on n’a pas affaire à un carré. C’est l’échange suivant qui est intéressant.
État de la construction avant l’extrait vidéo
Le point M1 a été construit après la mise en commun. Comme la droite (O1A1) a été construite, on peut penser que le point P1 est lui aussi bien construit (là encore de manière opportuniste, parce que la droite a été tracée).
Comme la droite (O1B1) n’a pas été tracée, il est clair que le point nommé B1* est posé sur le cercle de manière perceptive.
La vidéo commence quand l’élève construit, correctement, le dernier cercle avant la construction du carré.
Cette vidéo illustre la bonne instrumentation des tests (au moins orthogonalité et parallélisme), avec une utilisation effective des raisons pour lesquelles ces outils ont été construits, contrairement à ce qu’on a pu voir dans un extrait précédent.
Elle illustre aussi l’entrée, par l’aisance d’utilisation des outils, dans une démarche de validation d’une argumentation par les instruments. Les instruments sont ici plus conceptuels que ceux du monde sensible, et donc l’élève entre dans une approche de fait plus conceptuelle des propriétés des objets.
Bilan et analyse de la séquence
Le bilan de cette séquence est largement satisfaisant, mais on peut être un peu exigeant et voir avec précisions tous les points qui n’ont pas été optimum. Bien entendu il a de nombreuses retombées positives, mais on a aussi vu plusieurs fois en direct les limites ou parfois même les insuffisances de notre ingénierie : dans le même laps de temps, avec le recul d’une première expérimentation, on devrait pouvoir faire mieux. Voyons pourquoi et comment.
Les points positifs organisationnels
Être en binôme sur les postes installe de fait une communication entre les élèves, qui utilisent naturellement un vocabulaire géométrique, au départ pas nécessairement précis, et au fil des séances de plus en plus précis.
Avoir des fiches de travail permet de faire alterner les tâches entre l’élève qui agit sur la souris et celui qui contrôle ce qui est fait ou conseille son associé. Là encore voir et observer en direct un autre faire une activité mathématique participe de la méta-cognition sur les objets géométriques.
Alterner plusieurs fois par séance les phases collectives et celles en binômes permet :
– de focaliser l’instrumentation du logiciel sur des points précis
– d’institutionnaliser les pratiques, dont certaines pratiques personnelles d’élèves.
Les séances duraient 1 h 30 (le vendredi de 10 h à 11 h 30) ce qui permet de prendre du temps pour les phases collectives, que ce soit d’exploration avec les outils tests, de validation des propriétés, de correction par des élèves, tout en proposant des séances significatives.
Le fait que 3 séances au second semestre se sont déroulées trois vendredis de suite a été un facteur de stabilisation de l’instrumentation du logiciel et des outils de test.
Forces et faiblesses de la mise en œuvre
Tout d’abord l’alternance des phases collectives et en binômes a été particulièrement efficace pour atteindre son objectif d’institutionnalisation des pratiques.
Le choix de faire l’apprentissage collectif des outils de test, avec une réflexion mathématique associée aux objets en jeu dans l’activité, a été un moment fort d’apprentissage dans chaque séance où cela a eu lieu. Et les outils de test ont ensuite été largement réutilisés par les élèves
Officialisée dans la fiche de la première séance du second semestre, l’instrumentalisation des traces et couleurs (comme dans la seconde vidéo) trouvée en décembre par des élèves, a eu un effet positif sur l’engagement dans les tâches par les élèves en général : un savoir faire spécifique, propre à des élèves, avait été partagé et chacun pouvait l’utiliser.
Tous ces points ont montré une efficacité certaine. Ce qui a moins bien fonctionné est le dosage, dans chaque activité, de la tâche purement opérationnelle et - selon l’activité - de son accompagnement conceptuel ou de l’implication de conceptualisation demandée, généralement trop faible.
Peut-être parce que nous voulions, même inconsciemment, des résultats tangibles, mais aussi tout simplement par manque d’expérience de cette situation, nouvelle pour tout le monde, plusieurs fois l’accent a été mis sur l’instrumentation pour elle-même alors qu’elle pouvait s’accompagner, par quelques manipulations supplémentaires, d’explicitations conceptuelles « en actes » qui pouvaient ouvrir à plus de compréhension mathématique. En définitive, c’est dans la subtilité du geste non fait, comme illustration, de quelques secondes, pendant la construction, du dynamisme conservé par exemple que l’on perçoit en temps réel, que l’efficacité opérationnelle a été parfois obtenue au détriment d’un apprentissage conceptuel en parallèle.
Ce point est souligné ici pour dire que la géométrie dynamique ne fonctionne pas « toute seule », qu’elle n’est qu’un environnement dont le potentiel est à disposition certes, mais qu’il faut s’approprier. Autrement dit, il faut être vigilant, dans la préparation de sa mise en œuvre, à ne pas transférer, subtilement, la statique de l’environnement papier crayon, au dynamisme de l’environnement, pour éviter de figer l’ouverture conceptuelle que permet la richesse de cet environnement.
La tache est délicate pour l’enseignant : ne pas en rester au niveau opératoire du logiciel, accompagner la réflexion mathématique implicitement sous-jacente aux gestes effectués, tout en respectant les démarches personnelles des élèves parfois encore fragiles quand ils viennent l’exposer à la classe. À l’école primaire, où la conceptualisation des objets géométriques commence tout juste à être ébauchée, nous avons une nouvelle attitude à explorer et à installer pour mener cette tâche complexe avec pertinence.
On peut penser qu’il fallait cette première année exploratoire pour voir les potentialités à la fois opérationnelles et conceptuelle d’une telle séquence et voir, en direct, les moments où nous avons pu passer à côté de certaines opportunités de conceptualisation.
Mieux utiliser la richesse de l’environnement de CaRMetal
Le problème du passage à la conceptualisation n’est pas nouveau, il existe aussi dans l’environnement papier crayon, mais l’environnement étant plus riche, il est à repenser à réinventer. Par exemple, l’analyse en séance des constructions erronées, et la recréation - collective - de l’historique de la construction par utilisation du monkey, pourrait être une piste intéressante à creuser pour la prochaine expérimentation : ce dispositif est l’occasion, tout en étant dans un registre opérationnel pour les élèves - on recherche les gestes faits - de questionner les objets mis en jeux (définition, propriétés, en lien éventuellement avec les items du logiciel, pour accéder à une réflexion sur la pratique géométrique abordable par des élèves de CM2 et enrichissante pour eux.
A la lumière de ce qui a été fait cette année, une réorientation de la mise en œuvre des séances, et une réécriture de la séquence devrait permettre de conserver un bon niveau d’instrumentation tout en développant mieux l’émergence d’une réflexion conceptualisante au cours des activités ou lors de leurs correction.
Quelques pistes d’amélioration
Voici quelques réflexions en vu d’améliorer la séquence et son efficacité.
– une séance initiale d’instrumentation qui traite à la fois des segments et des droites, mais aussi des cercles pour une meilleure efficacité de la séance 3.
– conserver la séance « faisceaux de traits », proposée comme problème ouvert, qui ne concerne que des points, segments et droites, avec analyse collective des erreurs des élèves.
– conserver la séance 3 (création d’un rectangle et intersections avec deux cercles) : en faire une séance d’argumentation.
– réécrire entièrement la séance 4, remplacer la phase 3 (proposée par l’auteur de l’article) par un travail sur l’outil compas comme report de mesure et construire différents carrés dans cette séance 4.
– réécrire la séance 5 (non présentée ici, un autre article lui étant consacré) : l’activité choisie dans ERMEL, après deux tentatives différentes, ne se transcrit pas de manière pertinente dans un environnement dynamique.
– enrichir la séance 6 sur les pentagones qui a été jugée trop facile par les élèves.
– conserver la séance 7, que l’on peut décliner, au sein de la classe, en plusieurs versions (paragraphe S7.1 sur variables didactiques) selon l’aisance des élèves.
Ces notes sont données à titre indicatif, comme réflexion sur notre pratique, il est évident que tout est à adapter en fonction du niveau où l’on enseigne et de sa propre pratique de classe.
Prolongation de l’expérimentation
Dans les paragraphes précédents, l’analyse un peu distante et froide de l’enseignant chercheur - qui place peut-être la barre un peu haut - ne doit pas masquer l’enthousiasme qu’a suscité cette expérience, chez tous les participants, que ce soient les élèves ou l’enseignante qui nous accueillait, sans laquelle rien n’aurait été possible. Deux anecdotes significatives à ce sujet.
Lors d’une séance, un élève, malade depuis plusieurs jours, devait être absent. Il a insisté auprès de son père pour qu’il l’amène à l’école le vendredi de 10 h à 11 h 30, pour ne pas rater le cours de géométrie dynamique : il a donc été présent cette partie là de la semaine.
Devant l’engagement verbal des élèves sur les propriétés des objets (carré et losange) et la pertinence de leurs propos, Mme Lefèvre, titulaire de la classe, est allée prendre la classe d’un collègue pour qu’il viennent, une quinzaine de minutes, « voir comme ça se passe », et « ce que ça donne ».
L’an prochain nous reprendrons une nouvelle séquence, au minimum retravaillée comme indiqué ci-dessus, à la lumière de cette première année d’expérience, dans deux classes de CM2, et nous commencerons un nouveau cycle, dans la même école, à partir du CE2, avec une ingénierie prévue pour trois années consécutives, du CE2 au CM2.