Les nouvelles technologies pour l’enseignement des mathématiques
Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Boîte noire en géométrie dynamique
Mise en place et utilisation d’une boite noire avec Tracenpoche.
Article mis en ligne le 29 novembre 2006
dernière modification le 30 novembre 2020

par Benjamin Clerc

Où l’on va voir, après avoir expliqué l’intérêt de l’utilisation d’une telle activité, comment construire une boite noire avec le logiciel Tracenpoche et comment la rendre accessible aux élèves.

Au collège, les mathématiques contribuent, avec d’autres disciplines, à entraîner les élèves à la pratique d’une démarche scientifique. L’objectif est de développer conjointement et progressivement les capacités d’expérimentation et de raisonnement,
d’imagination et d’analyse critique. Elles contribuent ainsi à la formation du futur citoyen.
À travers la résolution de problèmes, la modélisation de quelques situations et l’apprentissage progressif de la démonstration, les élèves prennent conscience petit à petit de ce qu’est une véritable activité mathématique : identifier et formuler un problème, conjecturer un résultat en expérimentant sur des exemples, bâtir une argumentation, contrôler les résultats obtenus en évaluant leur pertinence en fonction du problème étudié, communiquer une recherche, mettre en forme une solution. (programmes du collège - 2006)

Qu’est-ce qu’une boîte noire ?


Lors d’une première séance avec un logiciel de géométrie dynamique, tout enseignant insiste sur la conservation
des liens entre les objets géométriques : le milieu d’un segment restant le milieu de ses extrémités lors du
déplacement des points ; il voit avec plaisir les élèves faisant leur “animation”.
Cette activité propose aux élèves de reconnaître les liens entre les objets d’une figure produite par l’enseignant, de proposer une telle figure dans un deuxième temps, puis de résoudre un même problème posé par des camarades.
Une boîte noire en géométrie dynamique, au sens qui lui est donné dans cet article, est une figure géométrique composée d’objets initiaux et d’objets finaux, dont la construction et le déplacement sont liés aux objets initiaux, la construction de ces objets étant cachée, d’où l’appelation de boîte noire. L’activité qui peut être mise en place avec ces boîtes noires consiste à demander aux élèves de les résoudre, c’est-à-dire de trouver une construction des objets finaux à partir des objets initiaux (construction qui doit bien entendu résister aux déplacements des objets libres de la figure).
Le travail demandé à l’élève relève de la démarche scientifique, la curiosité et le désir de réussir incitent l’élève à résoudre la boîte noire. Dès qu’il voit le résultat de la boîte noire, l’élève fait des conjectures. Pour valider ou invalider ses conjectures, et parvenir à découvrir la boîte noire,
le travail de l’élève va consister à :

  • tirer de sa mémoire, ou de ses connaissances mathématiques une situation en rapport avec celle qui le préoccupe ;
  • déplacer les points de base ;
  • construire des droites passant par deux points, des cercles, des milieux, des intersections, des droites parallèles ou perpendiculaires ..., en un mot enrichir la figure, et la faire sienne en nommant ces objets.
  • mesurer des segments, des distances ou des angles.

Comment créer une boite noire avec Tracenpoche ?


Les exemples ci-dessous sont présentés à l’aide du logiciel Tracenpoche mais ils peuvent être construits avec n’importe quel logiciel de géométrie dynamique permettant de cacher des constructions avec impossibilité pour l’élève de les rendre à nouveau visible. Ceci peut être réalisé de deux manières, soit en utilisant la fonctionnalité « cacher/montrer » présente dans de nombreux logiciels et en configurant le logiciel de manière à ce que l’élève n’y ait pas accès, soit en utilisant les macro-constructions. [1]
Ce qui suit montre l’utilisation de la fonctionnalité « cacher/montrer » dans Tracenpoche mais cela aurait pu être réalisé avec les macro-constructions.
Un premier exemple ci-dessous, les objets initiaux sont les points A, B et C et les segments [AB], [BC] et [CA], l’objet final est le point M.

boîte 1
La trace du point M peut être demandée en cliquant sur la figure tout en appuyant sur la touche « A ».

Pour construire une boîte noire avec Tracenpoche, il faut construire la figure, puis cacher les traits de construction que l’on ne veut pas donner à voir aux élèves à l’aide du bouton que l’on trouve dans le menu , ou encore en utilisant les options des objets (i ou invisible pour masquer un objet). Vous pouvez vous y essayer en cachant les traits de construction de la figure suivante :

boîte 2
Utiliser le bouton « cacher/montrer » pour dissimuler les constructions intermédiaires.

Enfin il faut cacher le script sans quoi la boîte noire n’est pas activée, le plus simple étant de cliquer sur le bouton prévu à cet effet  [2], on enregistre alors la figure dans cette configuration.
Pour cela, il faut cliquer sur le bouton , que l’on trouve dans le menu , qui permet d’obtenir le texte complet de la figure Tracenpoche, important ici pour enregistrer la configuration dans laquelle on veut que Tracenpoche s’ouvre.

Pour résoudre une boîte noire, les élèves ont à leur disposition tout ou partie des fonctionnalités de Tracenpoche, suivant l’objectif fixé, il peut être judicieux de ne pas donner accès à certains boutons initialement présents dans le logiciel en configurant différemment le menu du logiciel [3]. Une autre fonctionnalité de Tracenpoche peut être bien utile, l’outil « trace » qui permet d’obtenir la trace d’un objet lors du déplacement d’autres objets qui lui sont liés, voir l’exemple ci-dessous dans lequel la trace du point M a été initialement proposée par le professeur dans le script de la figure (On peut taper sur la touche F9 du clavier pour actualiser le script et faire disparaitre les traces parasites en cas de nouveau déplacement sélectionné).

boîte 3
La trace sur le point M est activée, taper sur F9 pour effacer les traces.

Il est également possible de n’avoir la trace du point M qu’à la demande, c’est le cas dans la première figure proposée dans cet article, cliquer sur la zone de dessin de Tracenpoche et en même temps sur la lettre « T » du clavier pour activer ou désactiver la trace du point M. Et enfin, il est bien sûr possible de laisser le choix à l’élève d’activer lui-même la trace sur l’objet de son choix grâce au bouton dans le menu , vous pouvez vous y essayer avec la boîte noire ci-dessous :

boîte 4
On peut demander la trace du cercle vert.

Mise en place dans la classe

L’utilisation de boîtes noires a été testée en classe en 2002 avec Cabri-Géomètre. La mise en place des boîtes noires dans cette expérimentation utilisait les macros constructions de Cabri-Géomètre. Ce qui est proposé ci-dessus est plus simple à mettre en oeuvre, bien que Cabri-Géomètre puisse aussi être utilisé de cette manière. Enfin, Tracenpoche n’était même pas dans les esprits de ses concepteurs à l’époque de cette expérimentation. Sous forme de défis entre groupes distants, trois classes de troisième, dans trois établissements différents résolvent d’abord les boîtes noires préparées par les professeurs de chacune de ces classes. Ensuite, les élèves sont invités à créer leur boîte noire, cette étape est soumise à certaines règles afin de ne pas créer des boîtes noires insolubles :

  • Les objets initiaux sont deux points ;
  • L’objet final est une droite ou un cercle ;

Pour obtenir cet objet final, les élèves ne peuvent tracer, au maximum, que :

  • trois droites, passant par deux points connus, ou perpendiculaire à une droite connue passant par un point connu, ou parallèle à une droite connue passant par un point connu ;
  • trois cercles de centres et rayons fixés par les objets déjà construits ;
  • Les élèves ne peuvent utiliser que des points obtenus par intersection de ces droites ou cercles construits précédemment ;

les seuls outils mis à leur disposition sont :
point ,
point d’intersection , point d’intersection évitant un point existant , droite , droite perpendiculaire , droite parallèle , milieu , cercle défini par centre et rayon et cercle .
Cette boîte noire a ensuite été envoyée à un groupe distant qui a eu à la résoudre.
Chaque groupe a ainsi reçu une boîte noire qu’il a eu à résoudre par la suite.

Ce travail en groupe (binômes ou trinômes) a été proposé sur 3 heures de cours, résolution des 3 boîtes noires proposées par les professeurs et compréhension des règles du défi en première heure, confection des boîtes noires (avec contrôle professeur avant validation) et envoi aux groupes distants en deuxième heure, résolution des boîtes noires en troisième heure.

Ce travail n’est pas de tout repos dans la classe, l’émulation est forte dans les groupes (la possibilité de mettre un message avec les prénoms des élèves lors de l’envoi des boîtes noires n’y était pas étranger), le travail des élèves est riche en tentatives et conjectures.

Un exemple de boîte noire proposée par un groupe d’élèves :

boîte élève
Le texte suivant accompagnait la figure :
Sarah, Jérémy, Romain et Gérald vous souhaîtent bonne chance, même si on est sûrs que vous n’y arriverez pas !

Il est à noter que certains groupes n’ont pas respecté le contrat ci-dessus, rendant impossible la résolution de leur boîte noire, à chaque fois l’erreur commise était la même, la construction d’un cercle de centre connu mais de rayon non lié aux éléments présents sur la figure. Il y a là une difficulté à suivre la consigne, ils ont tous bien respecté le nombre maximum de droites et de cercles utilisés, les objets initiaux, l’objet final était bien une droite ou un cercle (parfois cependant un ou deux points étaient également donnés dans les objets finaux, ce qui dénaturait quelque peu l’exercice).
Toutes les boîtes noires bien construites ont été correctement décryptées, les élèves qui avaient à résoudre une boîte noire qui ne respectait pas les règles édictées ont beaucoup cherché. Ils étaient déçus de ne pas pouvoir la solutionner, mais rassurés de voir que ce n’était pas de leur faute puisque leurs camarades n’avaient pas suivi les consignes.
Enfin, quelques boîtes noires étaient vraiment trop simples, les élèves les ayant construites étaient pourtant satisfaits du degré de difficulté ... ceux qui avaient à les résoudre se sont vus proposer d’en résoudre d’autres, car en quelques minutes ils avaient terminé leur travail.