Les nouvelles technologies pour l’enseignement des mathématiques
Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Un portable ça n’est pas une calculatrice.... non c’est bien plus !
Article mis en ligne le 23 juin 2011
dernière modification le 6 octobre 2021

par Abdellatif Kbida

Voir aussi : Yéaah !! mon prof de math nous a fait sortir nos portables en cours !

Une réaction de Bernard Parisse en Ps, en fin d’article.

« Aurèline range ton portable ! Tu crois que je ne te vois pas sous la table.
Mais qu’est-ce que vous pouvez bien faire avec ça, qu’est-ce qui est si important pour que vous écriviez un texto en cours ?
Et comment vous réagiriez si moi je sortais le mien et que je commençais à Twitter ? », associant le geste à la parole, je mime : « Je fais les complexes avec mes TS, ils comprennent rien MDR !! »
Rires dans la classe.
« J’aurais tué pour avoir un outil comme ça à votre âge, on peut faire tellement de choses … … plutôt qu’envoyer des sms futiles ».
Un élève me répond « d’un autre côté c’est fait pour ça et qu’est-ce vous voulez qu’on fasse d’autre ? »
je lui réponds des maths par exemple, bronka de réprobation dans la classe.
« Je vous montrerai un de ces jours pour l’instant on reprend. »

Voilà comment l’idée d’utiliser un smartphone à germé dans mon esprit, j’ai commencé à chercher ce qui se faisait comme application en maths. Premier constat : il existe de nombreuses applications plus ou moins utiles, intéressantes et pertinentes mais quasiment toutes en anglais.

À titre personnel, j’ai principalement testé des applis formulaires, des grapheurs, des exerciseurs (souvent calcul mental) et du calcul formel. J’attends avec hâte le portage de certains logiciels comme GeoGebra par exemple. Il était grand temps de tester ça in vivo.

En fin d’année scolaire, la dernière séance en fait, j’ai proposé une révision générale au bac à mes élèves de terminale S, une séance pour laquelle je leur ai demandé d’apporter leurs smartphones.

 Le déroulement et un peu (beaucoup) de technique :

Tout d’abord qu’est-ce un smartphone ? Une traduction littérale de ce terme serait « téléphone intelligent » cela donne une petite idée mais associer le terme intelligent à un objet est plutôt l’idée d’un département marketing qu’un centre de recherche en intelligence artificielle. La dénomination « ordiphone » utilisée par nos cousins québécois me semble plus proche de la réalité. Un ordinateur certes petit mais un ordinateur tout de même, doté de toutes les fonctionnalités de télécommunication actuelle (Wifi bluetooth GPRS EDGE etc). Ce sont d’ailleurs ces dernières qui font couler tant d’encre et qui entretiennent la polémique.

Tout comme les ordinateurs, les smartphones disposent d’un système d’exploitation, un OS (Operating system) différent en fonction des modèles. Actuellement trois principaux OS dominent le marché RIM/BlackBerry, Google Android et Apple iOS.
Il est important de bien avoir cela en tête au moment du choix d’utilisation d’une application. Il est préférable de choisir une application existant pour les différents OS, ou tout du moins une application dont des équivalents existent pour les différents OS. Ceux qui ont aimé jongler avec les différentes calculatrices TI et Casio apprécieront …

Une autre chose importante à savoir, certaines applications ont un fonctionnement autonome mais certaines nécessitent obligatoirement une connexion internet. Il faut le vérifier préalablement car on ne s’en rend pas forcément compte tout de suite.

Je me suis appuyé sur Wolfram|alpha, pour cette séance de révision, c’était l’occasion de travailler avec un logiciel de calcul formel ce que j’ai rarement fait avec eux.

Les élèves travaillent sur un sujet de bac et utiliseront le smartphone comme des annales avec des éléments de correction pour permettre le travail en autonomie.

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Il s’agit d’une application payante qui existe pour Android Goole et iOS/Apple mais qui peut aussi être utilisée gratuitement via un navigateur. Elle nécessite un accès internet, or tous les abonnements n’incluent pas l’accès illimité à l’internet. J’ai donc décidé d’utiliser la connexion du lycée pour ceux qui n’ont pas d’accès directement à internet. Pour permettre d’utiliser la version en ligne de wolfram|Alpha ( http://m.wolframalpha.com/ ), on connecte donc les smartphones via un routeur wifi et on renseigne les paramètres relatifs au proxy et à l’authentification sur le réseau pédagogique. Cette opération est relativement simple pour les Iphones mais elle se révèle assez délicate pour les téléphones sous Android (car non prévu nativement).

J’ai noté au tableau les différentes étapes et paramètres

  • Pour le wifi :
    ssid nomduréseauwifi
    wpa/wpa2 psk : motdepasse
  • Pour le proxy :
    adresse : x.x.x.x
    port : xxxx
    Auth : nomdedomaine\identifiant et mdp

Le moment de la configuration et de la mise en place est toujours délicat à gérer, le professeur est très sollicité et doit s’adapter à des situations toutes différentes.

Tout le long de la séance j’utilise un video-projecteur relié à un ordinateur auquel est relié le smartphone. Cela me permet de faire des saisies d’écran régulières via l’Android SDK. Cette méthode se révélera fastidieuse, au final je choisis d’utiliser directement Wolfram|Alpha via le navigateur de l’ordinateur.

Ci-dessous le texte de l’exercice

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La partie A est une ROC, on l’a traite normalement cela nous permet de revoir rapidement le cours. Ça tombe bien nous sommes en période de révisions, j’en profite pour rappeler que les exercices de type ROC sont constitués d’une démonstration, d’un résultat de cours et d’une application de ce résultat.

Ce qui est effectivement le cas ici, on attaque donc la partie B avec le smartphone.

1. On applique directement le théorème démontré dans la partie A et on vérifie la condition initiale, par curiosité on soumet l’équation différentielle à l’appli :

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On commente le résultat obtenu et on le compare avec ce que l’on a fait, un élève me demande ce que signifie Alternate form. J’en profite pour faire remarquer que la forme privilégiée dans la partie A est $y’=ay+b$ et que l’équation différentielle de la partie B n’est pas écrite sous la même forme au niveau rédaction il convient donc de l’écrire cette « autre forme ». Qu’en est-il de la constante ? Il faudrait préciser la condition initiale à l’appli, on réalisera que c’est possible en saisissant 10v'+v=30$ and $v(0)=0.

2. a) Pour déterminer le sens de variation de la fonction les élèves peuvent dériver la fonction, l’appli est anglo-saxonne (intéressant pour la DNL-math) « dérivée » se dit derivative. Sans accent dois-je préciser après le premier « ça marche pas M’sieur ».

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À noter le bouton Show steps qui permet d’avoir accès aux étapes de calculs commentées. On étudie sans difficulté le signe de la dérivée.

2. b) Pour la limite en plus l’infini, le résultat avec la rédaction via le bouton Show steps :

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3. Pour la question 3 il suffit de saisir Solve(30(1-e^(-t/10))<0.1)

4. Pour déterminer la distance parcourue pendant les 35 premières secondes, il suffit de calculer l’intégrale de v entre 0 et 35.

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Cette question est celle qui a posé le plus de difficultés aux élèves, ils avaient la réponse mais des doutes sur la méthode à appliquer pour l’obtenir. Intégration par parties ou passer par une primitive, le débat argumenté entre élèves permettra de trancher. Justement pour déterminer les primitives de v, il suffit de saisir integrate(30(1-e^(-t/10)) sans préciser de bornes.

Conclusion

Cette séance a été l’occasion de faire du calcul formel sans se déplacer en salle informatique. Certes la mise en place technique fut relativement complexe mais on peut espérer qu’avec l’évolution des OS et avec le temps ce genre de configuration devienne aussi banal que raccorder un ordinateur à un videoprojecteur.

Dans cette classe de terminale :

  • 2 élèves sur 22 possèdent une calculatrice formelle (une TI 92 et un Class pad 300 Casio 100),
  • le jour de cette expérimentation il y avait 17 téléphones portables plus quelques Ipod touch capables de faire tourner l’application. Les élèves ont trouvé l’expérience intéressante et ont participé volontiers, une séance de révisions avant le bac ne se refuse pas.

Certains ont quand même émis des doutes ne trouvant pas l’outil très pratique « intéressant oui mais, ce n’est pas demain la veille que je vais me mettre à faire des maths sur portable ». Pour la plupart d’entre eux le téléphone portable est associé aux loisirs et aux relations sociales, peut-être que dans leur future vie professionnelle ils verront les choses différemment. Pour l’éducation et les mathématiques en particulier, tout reste à faire, imaginer des activités qui exploitent les spécificités du smartphones, utiliser le GPS pour récolter et exploiter des données expérimentales, utiliser l’appareil photo pour photographier une arche d’un pont pour en déterminer l’équation d’une parabole ou encore exploiter l’accéléromètre pour faire de la géométrie dans l’espace.

Annexe : Wolfram|Alpha de quoi s’agit-il ?

On ne peut pas parler de Wolfram|Alpha WA sans évoquer son créateur le controversé Stephen Wolfram.

Stephen Wolfram est un physicien et mathématicien anglais, ses travaux concernent les automates cellulaires et la physique des particules. Il est surtout connu pour avoir mis au point le logiciel de calcul formel Mathematica sur lequel est basé WA.

La volonté de Stephen Wolfram en créant WA n’est pas de créer un simple logiciel de calcul formel en ligne mais d’ y associer un système de Questions-Réponses capables d’interpréter et de répondre à des questions posées en langue naturel. Ce genre d’application repose sur un cloud de superordinateurs qui utilise des techniques de traitement automatique des langues pour comprendre la question puis y répondre. Ci-dessous un exemple de question factuelle :

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Actuellement beaucoup de recherches et de travaux sont consacrés à ces systèmes de questions-réponses, tout comme en 1997 Deep blue avait affronté le champion d’échecs Gary Kasparov récemment c’est Watson (logiciel développé par IBM) qui a remporté plus d’un million de dollar au jeu télévisé Jeopardy. Ainsi WA n’a pas de syntaxe figés qu’il serait nécessaire de s’approprier avant de sans servir, d’autre part WA est non seulement capable de répondre à une question mais aussi de la détailler.

Lancé en Mai 2009 sous la forme d’un site internet WA connait aujourd’hui plusieurs déclinaisons pour les appareils mobiles smartphone et tablettes. L’application pour les mobiles est payante 1.99$, le smartphone ou la tablette sont utilisés comme des terminaux, ils servent à saisir la question et afficher la réponse les calculs sont effectués sur les serveurs de Wolfram Resarch sur le principe du cloud computing ou informatique dans les nuages.

Si l’on ne souhaite pas acheter cette application il est possible d’accéder gratuitement au site version mobile via un navigateur web à l’adresse http://m.wolframalpha.com/, dans les deux cas un accès internet est indispensable.

En savoir plus sur les systèmes de Questions-Réponse :