Les nouvelles technologies pour l’enseignement des mathématiques
Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Interopérabilité des logiciels de géométrie dynamique : le projet intergeo
Interoperable Interactive Geometry
Article mis en ligne le 4 décembre 2007
dernière modification le 4 janvier 2008

par Christian Mercat

À l’opposé des guerres de clochers, rendre interopérables les logiciels de géométrie dynamique et centraliser des ressources utiles et de qualité

Ceux qui ont manipulé des logiciels de géométrie interactive comprennent l’intérêt que ça peut avoir dans l’enseignement des mathématiques : une notion abstraite est visualisée, rendue préhensible et concrète, manipulée même par l’élève, qui se construit une représentation mentale de la notion d’une manière souvent plus prégnante qu’un dessin statique. Au début surpris par la réaction de la figure quand il en manipule les éléments libres, il finit par s’en faire une idée en repérant les invariants de la construction, ce qui lui permet de comprendre les relations sous-jacentes et d’amorcer une réflexion mathématique, d’émettre des conjectures, de restreindre ses mouvements pour vérifier telle hypothèse, d’observer qu’une propriété « résiste », bref de faire des mathématiques.

Nous connaissons cependant tous un bon nombre de barrières à l’utilisation de la géométrie interactive dans les classes. Même quand on a résolu les problèmes techniques de l’ordinateur et du vidéoprojecteur, ou de la salle d’ordinateurs personnels, il reste bien du chemin à parcourir :

 trouver un logiciel adapté, s’y former, le maîtriser,
 trouver des ressources pour ce logiciel, adaptées à sa classe, d’une qualité adéquate.

Bien entendu les deux questions sont liées et en cherchant sur internet, on peut tomber sur des ressources bonnes a priori mais pour un logiciel dont on n’a pas la licence ou qu’on ne maîtrise pas. Et quand on essaye une ressource, on peut très bien s’apercevoir, a posteriori, en plein cours, qu’elle n’est pas si bien adaptée que ça, que c’était trop court, ou trop long, ou trop technique, ou pas assez profond.

Le projet européen inter2geo se propose de diminuer la hauteur de ces barrières en

 définissant un format de fichier commun pour tous les logiciels de géométrie dynamique partenaires (Cabri géomètre/3D, Geoplan/Geospace, TracEnPoche, Geogebra, cinderella, geonext, CaR/ZuL, Wiris),
 centralisant des ressources éducatives utilisant ce format commun,
 testant en classe un certain nombre de ressources pour évaluer leur qualité et commencer un cycle d’amélioration de leur qualité.

Pour qui ?
Pour vous, les enseignants européens du secondaire en mathématiques. Nous avons dans l’idée de déborder de ce cadre à terme et toucher les autres sciences, le primaire et l’université, mais ce projet se concentre sur un objectif réalisable car relativement restreint : proposer des ressources éducatives couvrant une large partie du secondaire en mathématique.

Pour les élèves finalement, qui bénéficieront d’une base d’activités où ils pourront se former, découvrir, jouer s’ils le désirent, et où vous pourrez les envoyer vers une liste que vous aurez établie.

Quoi ?
Nous vous proposerons des ressources éducatives librement utilisables et largement adaptables à votre contexte pédagogique particulier. Ces ressources seront de deux types,
 des figures nues aussi internationales que possible, pouvant être ouvertes avec n’importe quel logiciel de géométrie partenaire,
 des documents faisant intervenir ces figures, une page html avec une figure intégrée, un fichier texte, une présentation multimédia...

Par qui ?
Par vous, les enseignants du secondaire en mathématique. Nous avons recruté des collègues qui proposent du contenu intéressant, dont ils sont l’auteur ou dont ils ont demandé l’autorisation à l’auteur, pour lesquelles une licence de distribution a été choisie parmi une liste établie par le projet.

Vous êtes donc tous cordialement invités à contribuer à ce projet, dès que le site de contribution sera en place en déposant des ressources, puis, dès l’année prochaine, en testant des ressources en classe, en rapportant vos expériences dans la classe, en faisant une critique constructive des ressources testées, en participant à leur évolution, en parlant autour de vous de votre expérience.

À l’issue du projet, en octobre 2010, le projet devra s’auto-entretenir à l’exemple de wikipédia et d’autres sites collaboratifs, autour d’une communauté d’enseignants européens qui ne font pas que l’utiliser en consommateurs mais l’alimentent et accroissent sa richesse et sa pertinence.

Le projet rassemble dans un « consortium » (mot ronflant, la communauté européenne les adorant, signifiant « équipe ») dix partenaires, de six pays d’Europe (Espagne, France, Luxembourg, Pays-Bas, Allemagne, Tchéquie), de différents types,
 des éditeurs de logiciels, Cabri géomètre/3D, Geoplan/Geospace, TracEnPoche, Geogebra, cinderella, geonext, CaR/ZuL, wiris, souvent associés à une université ou une association d’enseignants,
 des universitaires didacticiens comme l’INRP ou un équivalent allemand le DFKI

Le projet est organisé en groupes de travail autour d’un thème,
 Agrégation de contenu sur le site
 Intégration de contenu dans le format commun
 Mise en place du site web
 Animation des communautés de pratique
 Test en classe du contenu
 Communication

Sous quelles conditions ?
Les licences proposées autoriseront au minimum une utilisation libre en classe, mais nous promœuvrons des licences plus libres encore, en particulier une adaptation possible aux différents contextes pédagogiques, comme par exemple une traduction dans une autre langue ou pour un autre public que celui de départ. L’auteur de la ressource devra toujours être clairement identifié, il pourra être individuel ou collectif, personnel, associatif ou institutionnel, nom de plume ou nom d’usage.

De nombreux auteurs pensent à tort qu’une licence libre les prive de leur droit, c’est au contraire une manière de revendiquer une paternité que de choisir une licence adaptée. D’autres préfèrent qu’aucune adaptation ne soit apportée à leurs créations, c’est un choix qui se respecte mais j’espère que nous verrons de multiples versions autour de mêmes thèmes, avec de riches filiations et perspectives subtiles. Je vous renvoie au site de CreativeCommons et CeCILL pour des exemples de licences, libres ou moins libres.

Comment ?
La question se pose, comment allons nous nous y retrouver ? En utilisant des métadonnées. Comment naviguerez vous dans les ressources existantes ? Il y aura essentiellement deux façons, en entrant une requête dans un moteur de recherche, ou en naviguant dans une liste de concepts ordonnés, comme le programme du journal officiel ou la table des matières de votre manuel préféré. Vous remplirez une fois pour toute votre profil, vos classes, d’où vous venez, avec quel manuel vous travaillez, votre logiciel préféré, etc, ces informations seront utilisées pour pondérer les recherches faites par le moteur de recherche. Vous pourrez très bien trouver dans la recherche une construction faite par un hollandais.

Pour rendre cela possible, nous associerons à chaque ressource, à chaque ligne du programme, et à chaque page de la table des matières d’un manuel, une liste de compétences, organisées sous la forme (verbe+concepts), comme par exemple (reconnaître + proportionnalité). Cette liste de mots-clefs organisés en hiérarchie s’appelle une ontologie. Nous sommes en train de construire une ontologie adaptée aux mathématiques du secondaire et d’associer des compétences aux lignes du programme officiel de plusieurs pays européens. Nous inviterons les éditeurs de manuels à faire de même pour leurs tables des matières.

Une ontologie n’est pas la panacée, il est préférable de travailler avec des compétences qui soient une phrase en Français, comme Reconnaître si une situation relève de la proportionnalité, mais si cette compétence apparaît comme telle dans le programme officiel français, elle ne sera pas forcément facile à associer à une compétence du programme officiel anglais. Une ontologie, par contre, est plus facile à internationaliser : chaque verbe et chaque concept sera traduit dans les langues des différents pays de la communauté Européenne. Ainsi des compétences proches pourront être plus facilement mises en concordance d’un pays à un autre.

Comment ?
Mais du côté de l’auteur qui contribue une ressource, n’est-ce pas horriblement compliqué ? La réponse est non :
Quand vous téléchargerez une ressource sur le site en tant qu’auteur, vous pourrez, en naviguant dans le programme officiel, choisir la ou les ligne(s) qui lui correspondent et c’est tout ce que vous aurez à faire pour que votre ressource soit facile à trouver, partout en Europe. Si vous êtes pointilleux, vous pourrez affiner les compétences associées à votre ressource manuellement, en ajoutant ou retirant des concepts à une compétence existante, ou en ajoutant/retirant une compétence. Vous pourrez aussi éditer les valeurs par défaut du format LOM/SCORM qui seront associées automatiquement à votre ressource en fonction de vos préférences utilisateur.

Conclusion Le projet a démarré en octobre 2007 et sera financé pendant 3 ans. Pour qu’il soit un succès il faudra qu’une communauté d’utilisateurs le fasse vivre après ce lancement initial. Nous espérons que ce projet deviendra le votre et vous sera utile, nous comptons sur vous !