L’auteure de l’article, Virginie Gallien, est membre de l’équipe Planète Maths et Interlocutrice Académique pour le Numérique, dans l’académie de Grenoble.
L’équipe Planète Maths comprend aussi : Jérôme Cargnelutti (Inspecteur d’Académie), Vincent Huvelle, Karine Bethenod et Ulrich Picaud (enseignants Mathématiques).
Voir aussi :
- Dix ans de ressources mathématiques publiées sur le site de l’académie de Nantes
- Les pépites du site pédagogique de l’académie de Limoges
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INTRODUCTION
Le professeur de Mathématiques, tel un peintre, dispose d’une large palette pour éveiller la curiosité de ses élèves et pour les former à une démarche scientifique.
Les couleurs sont nombreuses : un peu de Geogebra, un peu de programmation, des applications en ligne, un peu de tableur, …, des couleurs qui traversent le prisme des Mathématiques.
Le pinceau n’est plus le seul outil utilisé par l’artiste : le multimédia prend toute sa place. De nombreuses applications, telles PlayArt ou PlayOpéra, existent aussi pour faire découvrir les arts aux enfants.
Il en est de même pour le professeur de Mathématiques, le crayon à papier, la gomme, le compas ne sont plus les seuls outils indispensables aux apprentissages : les applications sur tablette sont de plus en plus courantes et la programmation de robots a le pouvoir d’émerveiller son public. Vous pouvez consulter à ce sujet une expérimentation avec le robot Edison, projet réalisable en cycle 3, cycle 4 et lycée, pour initier les élèves ou les perfectionner à la programmation. La démarche de recherche, le tâtonnement par essai-erreur, la manipulation du robot, facilitent une nouvelle approche des sciences du numérique.
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(Auteur photographies et ressource : Virginie GALLIEN)
Pour illustrer chaque couleur et chaque outil cités plus haut, nous allons prendre comme exemples quelques-unes des ressources en ligne sur Planète Maths, site disciplinaire dans l’académie de Grenoble, pour vous montrer que le numérique est au service des Mathématiques.
Seulement quelques-unes des ressources sont présentées, n’hésitez pas à naviguez sur notre planète pour consulter d’autres thèmes !
1) Scratch : pour programmer une œuvre artistique (Niveau : cycle 4, outil : Scratch)
L’artiste et l’enseignant scientifique ont des points communs, de même que l’art et les mathématiques ne sont pas si éloignés. On parle d’une « belle » démonstration mathématique, d’un « beau » raisonnement, d’une « belle » figure géométrique. La géométrie est justement un domaine où l’on peut exploiter cette vision artistique.
Nous allons commencer par vous présenter la ressource 548 du site Planète Maths, intitulée « Art algorithmique avec Scratch », proposée par Vincent Huvelle, pour les élèves de la fin du cycle 4.
Le but de cette activité est de produire un fichier Scratch qui sera « une œuvre d’art » !
Scratch est un logiciel libre conçu pour initier les élèves dès l’âge de 8 ans à des concepts fondamentaux en mathématiques et en informatique. Développé par le groupe de recherche Lifelong Kindergarten auprès du laboratoire Média du MIT, le langage Scratch facilite la création d’histoires interactives, de jeux, de constructions géométriques et permet une approche ludique de l’algorithmique.
Dans cette activité, Vincent Huvelle propose un diaporama pour sensibiliser les élèves sur l’art abstrait et l’art algorithmique à travers deux artistes : Piet Mondrian et Véra Molnar.
Piet Mondrian est un peintre d’origine néerlandaise. Au début de sa carrière, il peint des tableaux réalistes, essentiellement des paysages de la Hollande. Mais, très vite, Mondrian simplifie ses tableaux : il simplifie les formes et les couleurs.
Vera Molna est d’origine hongroise mais vit à Paris depuis 1947. Elle est considérée comme une précurseuse de l’art numérique et de l’art algorithmique. C’est une peintre abstraite « géométrique ».
La problématique proposée aux élèves est la suivante : « pour amalgamer les deux artistes avec Scratch, on pourrait partir d’une construction géométrique minimaliste bien « droite » à la Mondrian puis mettre du désordre, la répéter... à la Vera Molnar ».
Scénario :
A l’aide d’un logiciel de dessin ou de retouche photos (Paint, Photofiltre, The Gimp...), l’élève construit une pièce à la Mondrian, carrée, de côté 14p. Ensuite, il importe cette pièce dans Scratch comme Lutin. Dernière étape : l’élève doit écrire un script qui permet d’estampiller ce lutin dans tout le pavage afin de construire une œuvre d’art !
Un exemple de création :
2) L’art du pavage avec les transformations du plan (Niveau : cycle 4, outil : GeoGebra)
Après le voyage vers nos deux artistes : Piet Mondrian et Vera Molnar, nous voici partis sur les traces du célèbre Escher.
Maurits Cornelis ESCHER est un dessinateur graveur Hollandais (1898-1972).
Escher associe perfection d’exécution et imagination. Il abuse de nos sens visuels, joue avec notre raison, invente de nouvelles représentations spatiales et de nouveaux mondes qui n’existent que par le dessin.
L’idée dans cette nouvelle ressource 556 (Auteur : Virginie GALLIEN) que nous allons vous présenter, intitulée « Transformation, pavage et art », est de faire preuve d’imagination, de création, après une phase de réflexion, de raisonnement. Qu’est-ce qu’un pavage ? Comment réaliser une telle œuvre à l’aide du numérique ?
Mathématiquement un pavage est un recouvrement complet du plan sans trou ni superposition. Le motif de base s’appelle une « tuile ». Les déplacements de ces tuiles consistent à étudier les différentes transformations du plan : la symétrie axiale, la symétrie centrale, la rotation et la translation.
On retrouve ces pavages dans la nature, dans les décorations des monuments... Ci-dessous, voici des motifs de pavage utilisé au palais de l’Alhambra de Grenade, en Andalousie.
Source : document de l’APMEP
Scénario :
Dans cette ressource, on pourra tout d’abord trouver une présentation sur le thème des pavages : origine, définition, artistes …
Les élèves, à l’aide d’une tablette, mais de préférence sur ordinateur, vont réaliser deux pavages avec GeoGebra : le « pavage fleuri » et le « pavage chinois ». Les étapes de constructions sont assez bien détaillées.
Rappelons que GeoGebra est un logiciel dynamique de mathématiques réunissant géométrie, algèbre, tableur et calcul. Un outil pour réaliser de nombreuses créations et développer de nombreuses compétences ! Il a été développé dans un but éducatif pour le secondaire par Markus Hohenwarter, de l’Université de Salzburg.
Pavage « fleuri » :
Etape : Construire un pétale | Etape : Construire une fleur à l’aide de rotations | Etape : Assembler les fleurs à l’aide de translations |
Pavage « chinois » :
Etape : Construire le demi-personnage et utiliser la symétrie axiale | Etape : Utiliser les rotations | Etape : Utiliser les translations pour recouvrir le plan |
C’est l’heure du concours les beaux-arts Mathématiques ! Il est intéressant de consacrer un temps pour la création : les élèves qui maitrisent l’outil et les transformations peuvent essayer de créer leur propre pavage. Osons les formes et les couleurs !
D’autres exemples de pavages réalisés avec GeoGebra :
3) L’art de jouer en faisant des Mathématiques (Niveaux : cycle 4, seconde, outil Learning Apps)
A-t-on fait le tour de l’art Mathématique ? Si l’on regarde la définition, l’art regroupe les œuvres humaines destinées à toucher les sens et les émotions du public. Il peut s’agir aussi bien de peinture que de sculpture, vidéo, photo, dessin, littérature, musique, danse…
Les logiciels qui suscitent la curiosité, la motivation des élèves, tout en combinant apprentissage et réactivation de connaissances, peuvent être des œuvres numériques à utiliser sans modération en classe ! Voici pour continuer les exemples de beaux-arts Mathématiques, une autre forme d’art : l’art d’enseigner les mathématiques en jouant !
Karine Bethenod dans sa ressource N° 554 , intitulée « appli/jeux calcul littéral » propose une sélection de treize jeux ludiques créés avec Learning Apps : des jeux exécutables sur tablettes pour s’entrainer au calcul littéral.
Les utilisations peuvent être variées : base pour questions flash, différenciation en classe (Accompagnement Personnalisé), mais aussi à la maison (classe inversée). Ils permettent un auto-positionnement de l’élève et sont donc à visée formative. Les types de jeux sont variés afin de diversifier le plus possible (cliquer ; glisser ; compléter...)
Pour chaque jeu proposé, l’auteur décrit :
– les objectifs visés ;
– un descriptif de l’activité (pédagogique et ergonomique) ;
– des liens internet pour visualiser le jeu ;
– un QR code pour flasher directement le jeu (utilisation de tablettes en classe, smartphone/tablettes à la maison).
Exemple de jeux :
– Réduction d’expression avec des coefficients entiers :
– Réduction d’expressions littérales avec des coefficients entiers relatifs :
– Développement et factorisation :
4) L’art des fractales programmées en Python (Niveau : Terminale, outil : Python)
Les beaux-arts scientifiques ne s’arrêtent pas aux pavages qui captivent et aux jeux qui motivent. Nous allons maintenant vous présenter un nouvel art, passionnant à explorer : l’art fractal. Attention, vous allez être transportés dans des univers à la fois abstraits et familiers, complexes et plein d’originalité, mais surtout dans un univers créatif.
Le concept de fractal a été introduit par Benoît Mandelbrot en 1975 dans le but d’étudier les processus et les formes irrégulières ou / et fragmentées.
Diaporama avec des images fractales de toute beauté :
Source : futura-sciences.com
Comment crée-t-on des images fractales ? Ce sont en général des images calculées par ordinateur en répétant à l’infini des calculs. Il est possible de dessiner des fractales à la main, mais compte-tenu de la grande quantité de calculs nécessaire (une image fractale peut requérir des milliers de milliards d’opérations de calcul !), les ordinateurs sont les outils les plus adaptés. Ils permettent, en outre, d’obtenir une grande précision et des détails graphiques extrêmement fins.
Certains logiciels informatiques permettent la création d’art fractal. Mais la ressource que nous allons vous présenter cible la programmation.
Les objectifs de cette ressource n°568, intitulée « Constructions de fractales avec des matrices » sont :
– de découvrir que les matrices peuvent représenter des transformations géométriques. Certaines transformations sont connues (comme les symétries), et d’autres sont plus complexes (comme les glissements).
– de voir comment la répétition de transformations, intégrées dans des algorithmes puis programmées avec Python, permet de tracer ces figures géométriques appelées fractales.
Le principe de la programmation de fractales est de créer un point, de faire appel à des fonctions déplaçant ce point, puis les nouveaux points. La succession de points ainsi tracés laissera apparaître de surprenantes fractales !
Exemples de fractales programmés et dessinés dans l’activité :
– Le dragon de Heighway
– La fougère de Barnsley
Il est intéressant de modifier la variable qui compte le nombre de points tracés. Pas assez de points : la fougère ne sera pas bien dessinée, trop de points : elle sera trop touffue !
5) Geogebra, l’art de modéliser un problème en 3D (Niveau : lycée, outil : GeoGebra)
En développant des savoir-faire, des techniques, l’artiste va pouvoir élargir ses champs de création, ses champs de compétences.
Nous vous avons déjà présenté un aperçu géométrique de GeoGebra, mais ce logiciel ne s’arrête pas à cet art visuel : grâce à ses différentes fenêtres, il allie dessins géométriques, données et calculs analytiques.
En s’appropriant les fonctionnalités de ce logiciel complet, le professeur de Mathématiques va utiliser ses créations en classe pour observer, conjecturer, démontrer, visualiser, … De quoi éclaircir un côté obscur des élèves : la résolution de problème !
Pour terminer cet article, illustrons cette nouvelle forme d’art avec la ressource N°524 du site Planète Maths, intitulée « Utilisation du numérique comme aide à la résolution de problèmes ». Cette ressource proposée par Thibaut DUGUA s’adresse à des élèves de seconde ou de première.
Résumé du problème « Aménager les combles » : Marc désire aménager les combles sous un toit en construisant une pièce d’habitation. Le toit est représenté par un prisme droit. La pièce est représentée par un pavé droit dont la face de devant est le rectangle DEFG. (Des longueurs sont données.) Où placer le point D pour que le volume de la pièce soit maximal ? |
« Représenter » des objets, des visages ou en tout cas des formes ou des solides est un premier niveau de représentation commun entre autres aux mathématiques, à la géographie, aux sciences et aux arts. En représentant en modélisant un problème (deux compétences centrales en Mathématiques), l’élève va pouvoir maitriser l’abstraction et débuter la démonstration.
En effet, dans plusieurs situations, la manipulation d’une figure dynamique est une aide importante débloquant, pour certains élèves, des soucis de traduction ou de conceptualisation d’un énoncé. C’est là qu’intervient l’artiste professeur en créant la figure 3D, puis les artistes élèves en visualisant et modifiant la figure dans l’espace, ce qui pourront les amener à une solution.
Dans cette activité « Aménager les combles », on utilise le numérique comme aide à la résolution de problèmes. Geogebra 3D est utilisée pour expliquer la situation et le travail. La figure est d’abord projetée au tableau. Les élèves ont ensuite accès à la figure, sur une tablette, pour la modifier, déplacer le point D par exemple. Ils peuvent ainsi observer les variations concernant le pavé droit de la pièce à vivre.
Retour d’expérience :
Où placer le point D ? La figure dynamique a permis aux élèves de s’approprier le problème, de comprendre une résolution graphique et aussi la solution d’une inéquation avec le tableur du logiciel.
Dans cette capture d’écran, trois représentations sont visibles : la représentation graphique du toit, la courbe représentative qui représente le volume du toit, et enfin la représentation tableur. L’utilisateur constatera alors que ces représentations sont complètement liées les unes aux autres d’une manière dynamique : la moindre modification dans une représentation affectera toutes les autres.
Venez découvrir dans cette ressource d’autres scénarios pédagogiques avec d’autres figures dynamiques !
Conclusion :
Des chercheurs de l’University College de Londres ont observé que lorsque l’on médite devant une belle formule mathématique ou lorsque l’on contemple une œuvre d’art, les mêmes zones du cerveau sont activées. Cette zone : le cortex préfrontal (appelée aussi le cerveau émotionnel) est stimulée dès que l’on regarde une belle peinture ou que l’on écoute un morceau de musique.
Alors ne nous privons pas, observons ces belles figures géométriques, ces belles résolutions d’équation, et utilisons ces outils numériques pour enseigner les beaux-arts Mathématiques !
« [Les mathématiques] donnent dans une absolue perfection cette association, caractéristique de grand art,de liberté divine, avec le sentiment d’une inévitable destinée, parce qu’en réalité cela construit un monde où tout est parfait et vrai. »
Philosophe et mathématicien Bertrand Russel, extrait de son autobiographie de 1967
Virginie GALLIEN, le 16 Mai 2019