Les nouvelles technologies pour l’enseignement des mathématiques
Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Mathématiques avec Xcas
Article mis en ligne le 28 septembre 2007
dernière modification le 14 juin 2012

par Bernard Parisse, Christiane Serret, GROUPE-IREM / Maths avec X-CAS, Michèle GANDIT, Renée DE GRAEVE

Xcas est un logiciel libre de mathématiques, développé à l’Université J. Fourier de Grenoble, il peut être téléchargé en recherchant Xcas sur Google ou directement depuis ce site.

Cet article a été repris dans le n° 468 du BV de l’APMEP.

Ce logiciel que nous utilisons dans nos classes de lycée et à l’université, combine les fonctions de tableur, de géométrie dynamique (en deux ou trois dimensions), de calcul formel et de programmation. Cette dernière, la programmation, peut être initiée dès le Collège par un module spécial, « la tortue », qui permet les premiers pas dans la compréhension d’une démarche algorithmique.

Une session de Xcas est une suite de niveaux de différents types : calcul formel, graphes de fonction, tableur, géométrie, etc.

Illustration 1 : une session Xcas

Grâce au module de calcul formel, Xcas peut effectuer les calculs en précision arbitraire (y compris dans le tableur ou en géométrie). Il propose de nombreuses fonctions pouvant être utilisées à différents niveaux, du développement et factorisation d’expressions algébriques, à l’arithmétique des entiers et des polynômes (PGCD, identité de Bézout, factorisation...), aux simplifications (fractions rationnelles, fonctions trigonométriques...) ; le logiciel permet la résolution d’équations ou de systèmes linéaires ou polynomiaux, le calcul de dérivées et de primitives, de limites et de développement de Taylor et asymptotiques. Les utilisateurs d’autres logiciels de calcul formel (Maple, MuPAD, TI89 ou Voyage 200) peuvent choisir un des modes de compatibilité de Xcas qui leur facilitera la prise en main.

Les modules de géométrie 2-d et 3-d permettent de construire des figures en utilisant la souris pour la plupart des objets, ou par l’intermédiaire de commandes analogues à celles du calcul formel : par exemple pour tracer un segment reliant deux points A et B , on peut sélectionner le mode segment et cliquer sur les deux extrémités, ou saisir la commande S :=segment(A,B). Tous les objets sont représentés analytiquement, de manière approchée ou exacte, au choix de l’utilisateur, les calculs approchés étant plus rapides (à privilégier pour faire des constructions dynamiques), les calculs exacts permettant de faire des preuves analytiques de propriétés géométriques.

Illustration 2 : un niveau de géométrie 2-d, le théorème de Napoléon

L’interface du tableur est moins complète que celle de logiciels comme OpenOffice, mais elle peut interagir avec le module de calcul formel ; on peut donc saisir des valeurs exactes dans une cellule (par exemple 1/3), ou des valeurs formelles (par exemple sin(x) en A1 et =diff(A1,x) en A2, si on modifie A1, la cellule A2 contient la dérivée correspondante).

Le module de programmation permet de définir des fonctions, avec des variables locales, des tests, des boucles. On dispose d’un débogueur interactif permettant d’exécuter une fonction, instruction par instruction, ce qui permet de corriger plus facilement des erreurs, mais peut aussi servir à expliquer le déroulement d’un algorithme.

Le module « tortue » permet d’initier dès le primaire à l’algorithmique en manipulant des notions mathématiques (repérage, angles...). On pilote une tortue laissant une trace de ses déplacements en lui donnant des ordres tels que « avance », « recule de n pas », « tourne à droite de x degrés », etc. Ces ordres peuvent être combinés au sein de programmes, ce qui permet de réaliser des figures complexes, composées de figures géométriques de base simples.

L’aide en ligne est entièrement rédigée en français, on y accède par l’index des fonctions ou par un des menus (qui regroupe les fonctions par thème) ou grâce à une recherche par mot clef. Les menus peuvent être redéfinis, par exemple pour masquer l’existence d’instructions et éviter que des élèves ne se perdent dans l’étendue des possibilités offertes. La version à télécharger contient d’ailleurs un menu Scolaire avec une sélection de fonctions de calcul formel pour le lycée, classées par niveau (seconde, première, terminale).

Xcas évolue encore notablement, en fonction des demandes des utilisateurs, par exemple certaines fonctionnalités comme la géométrie dans l’espace ou les interfaces vers d’autres logiciels (comme le logiciel PARI de théorie des nombres). La version actuelle (0.6) contient encore des bugs : elle devrait déboucher sur une version plus robuste (1.0), d’ici 2 ou 3 ans. Elle est néanmoins déjà utilisable par les candidats à l’agrégation externe, mais aussi dans nos classes, comme nous l’avons déjà dit.

L’atout majeur de Xcas, sur le plan pédagogique, et son originalité, résident dans le fait qu’il permet les allers-retours entre ses différentes fonctionnalités. Ceci permet d’aborder des notions mathématiques sous différents points de vue.

Prenons un exemple, au niveau de la classe de terminale S.

Il s’agit d’un TP dont l’objet est de construire, point par point, une courbe, constituée de segments, qui approche la courbe d’une certaine fonction f qui vérifie :
et f(0) = 1.

Pour ce faire, on utilise l’approximation :

Lors de ce TP, c’est d’abord l’aspect calcul formel , combiné au graphique , qui est privilégié, ensuite, c’est le tableur , combiné au graphique . Dans un premier temps, en effet, les élèves doivent définir un paramètre h , puis placer, dans un repère, successivement les points M0, M1, M2 … qui ont pour abscisses x0, x0+h , x0+2h …, et qui appartiennent à la représentation graphique de la fonction qui approche f (sachant qu’ici x0 = 0). Ils doivent saisir les formules successives qui permettent la construction des points M0, M1, M2… et des segments qui joignent ces points. Il apparaît alors qu’ils répètent toujours les mêmes instructions. Cette prise de conscience de la répétition est importante. On pourrait alors faire un programme pour obtenir successivement les points Mi, mais on peut aussi utiliser le tableur qui permet de recopier un grand nombre de fois une formule. A ce stade, les fonctions saisies dans le module formel sont conservées aussi pour le tableur. C’est un atout du logiciel.

Par ailleurs cette possibilité de combiner, de manière immédiate, calcul et graphique, d’une part, tableur et graphique, d’autre part, suscitent des questions qui n’apparaissent pas si l’on dispose d’un logiciel plus simple ou si l’on travaille en environnement papier-crayon.

Dans le TP déjà cité, la modification du graphique suivant le pas se voit en effet sous deux angles différents. Lors de la première étape, liant calcul formel et graphique, il apparaît un curseur lors de la définition du paramètre h , curseur qu’il suffit de déplacer pour voir changer le graphique « ligne-brisée ». Dans la deuxième partie du TP, le graphique se construit à partir des colonnes du tableur, calculées en fonction de la valeur de h qui se trouve dans l’une des cellules. Les graphiques que l’on construit suivant différentes valeurs de h restent à l’écran, peuvent devenir petits, voire invisibles : cela amène à réfléchir au fait que, pour avoir deux courbes qui correspondent à deux pas différents, tracées sur le même intervalle, il faut non seulement changer le contenu de la cellule qui correspond à h , mais aussi changer la plage de cellules correspondant au graphique. Ce n’est pas immédiat pour les élèves.

Voici plusieurs années que nous expérimentons, de manière régulière, des TP avec Xcas, dans nos classes de seconde, première S, terminale ES et terminale S (depuis la rentrée de septembre, une séance en terminale S avec Xcas a lieu au moins une fois tous les quinze jours, les élèves devant ensuite rédiger un compte-rendu du TP réalisé). Enfin il est clair que l’utilisation d’un tel logiciel change l’approche des programmes de mathématiques dans les diverses classes de lycée. Elle modifie la façon dont les élèves abordent un problème de mathématiques, si on les laisse autonomes face à la machine, la façon aussi dont le professeur peut présenter les notions du programme. Les élèves apprennent autrement que dans un environnement papier-crayon, autrement qu’avec des logiciels plus spécialisés, mais aussi autre chose.