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Le tour du monde en 80 jours
Article mis en ligne le 1er mars 2016
dernière modification le 2 avril 2019

par David Crespil

Cet article est dédicacé aux équipes de MathémaTICE et de Sésamath.

« Je parie vingt mille livres contre qui voudra que je ferai le tour de la Terre en quatre-vingts jours ou moins soit mille neuf cent vingt heures ou cent quinze mille minutes. » Phileas Fogg

Introduction

Voici un court extrait du tour du monde en 80 jours de Jules Verne :

DANS LEQUEL IL EST PROUVÉ QUE PHILEAS FOGG N’A RIEN GAGNÉ À FAIRE CE TOUR DU MONDE, SI CE N’EST LE BONHEUR

Oui ! Phileas Fogg en personne.
On se rappelle qu’à huit heures cinq du soir – vingt-cinq heures environ après l’arrivée des voyageurs à Londres –, Passepartout avait été chargé par son maître de prévenir le révérend Samuel Wilson au sujet d’un certain mariage qui devait se conclure le lendemain même.
Passepartout était donc parti, enchanté. Il se rendit d’un pas rapide à la demeure du révérend Samuel Wilson, qui n’était pas encore rentré. Naturellement, Passepartout attendit, mais il attendit vingt bonnes minutes au moins.
Bref, il était huit heures trente-cinq quand il sortit de la maison du révérend. Mais dans quel état ! Les cheveux en désordre, sans chapeau, courant, courant, comme on n’a jamais vu courir de mémoire d’homme, renversant les passants, se précipitant comme une trombe sur les trottoirs !
En trois minutes, il était de retour à la maison de Savillerow, et il tombait, essoufflé, dans la chambre de Mr. Fogg. Il ne pouvait parler.

Les cheveux en désordre, sans chapeau, courant, courant…

« Qu’y a-t-il ? demanda Mr. Fogg.

– Mon maître… balbutia Passepartout… mariage… impossible.

– Impossible ?

– Impossible… pour demain.

– Pourquoi ?

– Parce que demain… c’est dimanche !

– Lundi, répondit Mr. Fogg.

– Non… aujourd’hui… samedi.

– Samedi ? impossible !

– Si, si, si, si ! s’écria Passepartout. Vous vous êtes trompé d’un jour ! Nous sommes arrivés vingt-quatre heures en avance… mais il ne reste plus que dix minutes !… »

Passepartout avait saisi son maître au collet, et il l’entraînait avec une force irrésistible !

Phileas Fogg, ainsi enlevé, sans avoir le temps de réfléchir, quitta sa chambre, quitta sa maison, sauta dans un cab, promit cent livres au cocher, et après avoir écrasé deux chiens et accroché cinq voitures, il arriva au Reform-Club.

L’horloge marquait huit heures quarante-cinq, quand il parut dans le grand salon…

Phileas Fogg avait accompli ce tour du monde en quatre vingt jours !…

Phileas Fogg avait gagné son pari de vingt mille livres !

Et maintenant, comment un homme si exact, si méticuleux, avait-il pu commettre cette erreur de jour ? Comment se croyait-il au samedi soir, 21 décembre, quand il débarqua à Londres, alors qu’il n’était qu’au vendredi, 20 décembre, soixante dix neuf jours seulement après son départ ?

Nous montrerons qu’après un tour de Terre en bateau par exemple, ceux qui font ce voyage ont vu le Soleil passer au méridien une fois de plus que ceux qui sont restés au point de départ si le voyage s’est effectué en allant à la rencontre du Soleil.

Le décompte des jours en supposant que l’on va à la rencontre du Soleil

Pour comprendre ce qui s’est passé au cours du voyage de Phileas Fogg, mésaventure survenue aussi à Magellan, nous allons considérer le schéma suivant :

Soit $O$ le centre de la Terre, la demi-droite [$O$ Soleil) perce la Terre en $S_1$.

L’ensemble des positions de $S_1$ s’appelle l’écliptique : c’est le cercle jaune.

Au cours de la rotation diurne de la Terre, le Soleil occupe une position quasiment fixe sur l’écliptique et de fait décrit le cercle bleu.

Soit $S_2$, l’une de des positions et $S_3$ la projection de $S_2$ sur l’équateur.

Nous supposerons que $S_3$ parcourt de manière régulière l’équateur en 24 h.

Comme la Terre tourne dans le sens direct, le Soleil en apparence franchit les méridiens dans le sens des aiguilles d’une montre.

Appelons $A$ le bateau de Phileas Fogg et $A’$ sa projection sur l’équateur.

Nous supposerons que $A’$ se déplace dans le sens inverse des aiguilles d’une montre autrement dit, que $A’$ va à la rencontre du Soleil.

Nous compterons les longitudes de 0° à 360 ° dans le sens rétrograde à partir de Greenwich désigné par G.

La figure manipulable doit être téléchargée. Vous devez installer le plug-in Cabri 3D (disponible uniquement pour Windows et Mac OS). Sous réserve d’utiliser FIREFOX ou INTERNET EXPLORER exclusivement.

Téléchargement du fichier Cabri 3D :

Faire fonctionner l’animation

  • Dans le coin supérieur gauche en dessous de fichier clic gauche sur la flèche
  • clic gauche sur manipulation
  • clic gauche sur le pont bateau
  • clic gauche sur fenêtre
  • clic gauche animation
  • choisir la vitesse du bateau à : 0,5
  • recommencer les étapes précédentes avec le point Soleil
  • choisir la vitesse du Soleil à : -1,25
  • Placer le bateau et le Soleil en A.
  • lancer l’animation

D’abord remarquons que si le Soleil met 24 h pour parcourir 360°alors 1° est parcouru en 1/15 h.

Posons : longitude de $A=a$ ; longitude de $B=b$ etc.

Supposons le départ en $A$ à midi, la trajectoire se faisant dans le sens trigonométrique et qu’en voyant le Soleil franchir le méridien chaque jour, le capitaine du navire avance la date d’un jour jusqu’à revenir au port de départ.

Nous supposerons que $D$ est le dernier point ou le capitaine voit le Soleil franchir le méridien de la position du navire avant de rejoindre le port de départ $A$.

Comme le Soleil se déplace dans son mouvement apparent dans le sens rétrograde,

le Soleil a mis pour aller de $A$ en $B$ le temps 24 h $- \dfrac{b-a} {15}$,

puis pour aller de $B$ en $C$ : 24 h $− \dfrac{c − b}{15}$

De $C$ en $D$ : 24 h $− \dfrac{d − c}{15}$

De $D$ en $A$, le bateau met un temps $t$.

Au total, le temps mis par le bateau pour faire un tour complet est en heures :

$24 − \dfrac{b − a}{15} + 24 − \dfrac{c − b}{15} + 24 − \dfrac{d − c}{15} + t =$

$3 × 24 − \dfrac{1}{15}(b − a + c − b + d – c)+t =$

$T = 3 × 24 − \dfrac{1}{15} \times (d-a) + t $

Remarque :

Puisque que $D$ est le dernier point tel que jusqu’en $A$, le méridien du Soleil ne rencontre pas par hypothèse le méridien du bateau on a :

1) alors $ t <$ 24 h.

2) le temps mis par le Soleil moyen pour parcourir l’arc $\widehat{AD}$ de $D$ vers $A$ en allant dans le sens rétrograde, est strictement plus grand que le temps mis par le bateau pour aller de $D$ vers $A$ dans le sens direct.

Prouvons que $48 \leq T < 3 \times 24$

C’est-à-dire que : $2 \times 24 \leq 3 \times 24 − \dfrac{1}{15} \times (a − d) + t < 3 \times 24$

$3 \times 24 − \dfrac{1}{15} × (d-a) + t < 3 \times 24$ résulte de $t ≪ \dfrac{1}{15} \times (d-a) $ d’après la remarque 2.

$2 \times 24 \leq 3 \times 24 − \dfrac{1}{15} \times (d-a) + t \Leftrightarrow - \dfrac{1}{15} \times (d-a) +t \geq -24$

Or $ - \dfrac{1}{15} \times (d-a) \geq -24$ donc $- \dfrac{1}{15} \times (d-a) +t \geq -24+t \geq -24$

Conclusion $48 \leq T < 72$

Autrement dit si le départ du bateau a lieu le lundi à 12 h

En $B$, il est mardi midi sur le cahier de bord.

En $C$, il est mercredi midi sur le cahier de bord.

En $D$, il est jeudi midi sur le cahier de bord.

Comme $48 ≤ T < 72$ alors le bateau est de retour le mercredi date de $A$ alors que le cahier de bord mentionne la date du jeudi. Un jour a été gagné.

Cette mésaventure s’est produite aussi avec Magellan à la recherche d’un passage en vue de relier l’Atlantique et le Pacifique.

Nous pouvons alors appliquer mot pour mot ce raisonnement au voyage de Jules Verne qui a duré moins de 80 jours, ce qui permît à Phileas Fogg de remporter son pari.