Les nouvelles technologies pour l’enseignement des mathématiques
Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Faire des mathématiques au moyen d’une station météo

Une station météo dans un lycée. Cette idée, déjà présentée dans cet article de MathémaTICE (http://revue.sesamath.net/spip.php?article1010) ;
), est née de l’envie d’un atelier scientifique de déterminer le mix énergétique le plus adapté pour rendre autonomes en énergie les deux salles dans lesquelles il travaille tous les jeudis de 15 à 18 heures. L’Atelier Scientifique Vilgénis regroupe des élèves de la Seconde à la Terminale, de l’enseignement général, technologique et professionnel, se retrouvant à raison de 3H par semaine sur leur temps libre pour travailler sur des sujets scientifiques qu’ils ont eux-mêmes choisis. Cette station nous a été prêtée dans le cadre du projet : « Météo à l’Ecole ». Cet article présente deux moyens de faire des mathématiques au moyen de cette station !

Article mis en ligne le 12 juin 2018
dernière modification le 9 juillet 2018

par Taillet Jacques

Une station météo dans un lycée. Cette idée, déjà présentée dans cet article de MathémaTICE, est née de l’envie d’un atelier scientifique de déterminer le mix énergétique le plus adapté pour rendre autonomes en énergie les deux salles dans lesquelles il travaille tous les jeudis de 15 à 18 heures. L’Atelier Scientifique Vilgénis regroupe des élèves de la Seconde à la Terminale, de l’enseignement général, technologique et professionnel, se retrouvant à raison de 3H par semaine sur leur temps libre pour travailler sur des sujets scientifiques qu’ils ont eux-mêmes choisis. Cette station nous a été prêtée dans le cadre du projet : « Météo à l’Ecole ». Cet article présente deux moyens de faire des mathématiques au moyen de cette station !

PREMIERE PARTIE : Les élèves de l’Atelier Scientifique Vilgénis utilisent les données de la station météo pour réaliser des prévisions !

N. B : Dans cette partie, le « nous » et « les élèves » sont utilisés pour désigner l’Atelier dans son ensemble.

Le point de départ était de connaître les données météorologiques sur le site de notre lycée, afin de déterminer quelles seraient les énergies les plus adaptées.
Nous n’imaginions pas la curiosité que cela allait entraîner.

Lors des bulletins météorologiques, on nous annonce la température maximale et la température minimale du lendemain. En observant les données, les élèves se sont demandés s’ils pouvaient prévoir la température maximale à venir.

Les premiers travaux de l’atelier ont consisté à déterminer la température maximale d’une journée, en essayant d’approcher la courbe des températures par une fonction polynôme. L’idée de la fonction polynôme vient de la forme arrondie de ces courbes ayant un maximum chaque après-midi et un minimum chaque matin. Ce qui fait penser à une fonction de degré 3 sur une journée, de degré 5 sur deux jours …

Devant l’imprécision obtenue, les élèves qui s’occupaient des prévisions ont baissé les bras. Et puis en juin 2017 nous avons tracé des courbes de température en fonction du temps jour par jour.

Il nous a semblé que plus la pente entre 9h et 12h était élevée plus la variation de température serait importante. Afin de déterminer la température maximale à partir de la température minimale, on a essayé d’établir un lien entre la pente des courbes ci-dessus et les variations de température au cours de la journée. Plutôt que de travailler sur la pente entre 9h et midi (ce qui correspondrait à une pente moyenne donc moins précise) nous avons travaillé sur la pente sur une durée d’une heure lorsque celle-ci est la plus forte, c’est-à-dire que nous avons indépendamment analysé les pentes de 9 à 10h, de 10h à 11h et de 11h à 12h.

Cela nous a amené à nous intéresser à la variation de Tmax-Tmin en fonction de ∆T/∆t. (Tmax : température maximale ; Tmin : température minimale ; ∆t correspond à une heure ; ∆T correspond à la variation de température sur ∆t, soit sur une heure, entre 9h et 12h). Autrement dit, notre travail a évolué de telle sorte que nous ne voulions plus uniquement comprendre comment déterminer Tmax à partir de Tmin mais bien d’effectuer des prévisions sur la température maximale qui sera atteinte au cours de journée à partir de l’évolution de la température aux différents (∆T/∆t).

Des élèves ont sélectionné les données utiles et calculé les Tmax-Tmin et (∆T/∆t)max entre 9h et 12h, ne tenant pas compte de la plage horaire à laquelle (∆T/∆t)max était obtenu – peu importe que ce dernier se produise entre 9h et 10h, 10h et 11h ou 11h et 12h.

Voici le tracé des données (d’avril à juin 2017) :

A partir de ce nuage de points, il leur a semblé qu’une droite de régression ou un morceau de parabole pourrait servir d’approximation. Les premiers résultats à partir de cette approximation par une droite n’ont néanmoins pas été très satisfaisants.
Tous ces travaux ont été réalisés sur Excel. Naturellement, un élève a tracé la droite de régression. Nous avons ensuite vu ensemble ce que cela signifiait d’un point de vue mathématique.

Pour se familiariser avec ces notions de régressions et d’approximations par une parabole, des informations sont disponibles en utilisant les liens suivants :
https://cel.archives-ouvertes.fr/cel-01387713v3/document
http://www.fresnel.fr/perso/stout/Anal_numer/Cours2.pdf
https://www.math.u-psud.fr/ ecdoct/ecdoct/infos/science_ac/PierreCyril1_science_ac.pdf

Ils ont alors décidé de préciser leur étude en tenant compte du moment auquel avait lieu (∆T/∆t)max et ont tracé trois nuages de points en fonction du ∆T/∆t, suivant qu’il soit maximum entre 9h et 10h, 10h et 11h ou 11h et 12h. Afin de réaliser ce travail, ils ont réalisé un programme en Python pour trier les maximums de chacune des trois périodes 9h-10h, 10h-11h, 11h-12h. A partir des nuages obtenus, ils ont déterminé des droites de régression.

Voici le nuage de points et la droite de régression correspondante lorsque (∆T/∆t)max a lieu entre 10 et 11h :

Afin de vérifier leurs formules trouvées à partir des données de 2017, ils ont implémenté les données de 2016 dans leurs trois formules (9/10, 10/11, 11/12). Ils ont obtenu des écarts (Tmax-Tmin) de l’ordre de 2°C en valeur absolue.

Constatant que les imprécisions sont plus fortes aux extrémités de la droite de régression, l’idée est de réaliser une approximation non plus à partir d’une droite mais d’une parabole. La parabole est déterminée à l’aide du tableur Excel. Les calculs pour obtenir la meilleure approximation entre la droite et la parabole sont réalisés en comparant la somme des carrés des écarts à la courbe.

DEUXIEME PARTIE : L’essentiel de mes TD en classe de seconde sont réalisés à partir des données de la station

Station météo et classe de seconde : Généralisation des travaux au programme de seconde.

Tous ces travaux m’ont amené à utiliser les données de la station avec mes élèves de seconde et de terminale.

Les travaux réalisés à partir de notre station météo ont pour objectifs de donner du sens à mon cours et de l’envie aux élèves de faire des sciences. 25 des 35 élèves de ma classe n’ont, en arrivant au lycée, « pas envie de faire des sciences », quel dommage !

Avant de commencer, précisons que tous les TD de mes élèves se déroulent dans notre salle informatique, équipée du logiciel Scientific Work Place (SWP). Celui-ci permet de faire du latex sans rentrer de code et de calcul formel. En outre, les TD sont « tout numérique ». Cela signifie que l’énoncé est numérique, écrit avec SWP et que les élèves répondent directement sur ce fichier, à partir de leurs calculs effectués dans ce même fichier ou avec un tableur ou du logiciel de géométrie Geogebra. Ces TD permettent également aux élèves d’échanger entre eux : ils discutent, s’entraident et lorsqu’une remarque me semble utile pour le groupe, je l’ajoute au dossier commun de la classe.

Vocabulaire sur les fonctions : Image, antécédent, repère

Ce travail suit une voie évolutive, se complétant au cours du temps et dans différents environnements. En salle informatique, les élèves découvrent le site contenant les données de notre station [https://www.infoclimat.fr/pedagogie/stations.php?id=113]

En travail maison, par exemple, il est demandé d’aller chercher les données de température extérieure du 7 septembre de 0 h à 16 h et de les représenter dans un graphique. On obtient alors des travaux très variés : des « repères » non gradués, des points, des courbes… C’est donc l’occasion de parler de repère et d’être précis dans le vocabulaire utilisé.

Pour le cours suivant, il est demandé en travail maison d’aller chercher les données des relevés de température extérieure en °C sur la station de Vilgénis le lundi 8 septembre 2017 de 0h00 à 16h00, de tracer la représentation graphique de la température extérieure en fonction du temps, en heures. L’origine du temps est lundi 8 septembre 2017 à 0h00. On tracera des segments ayant pour extrémités deux points d’abscisses successives. On travaille le respect des consignes, puis en classe, le vocabulaire « image et antécédent » et « courbe représentative ».

Au cours des séances travaillées ainsi de jour en jour, en plus du travail quotidien, nous allons introduire, les notions de fonctions monotones sur un intervalle, de tableau de variations.

N.B : Les élèves n’ayant pas forcément accès à Internet à la maison peuvent aller au CDI, leurs cours se terminant à 16h.

Points positifs du travail  

- Faire des mathématiques à partir du quotidien : Les élèves vont chercher les données. Celles-ci ont un sens pour eux car chacun a le ressenti des températures au quotidien.

- La répétition, une méthode pour comprendre et apprendre : La répétition amène un très bon niveau de résultats. Tous les élèves ont une bonne maîtrise de la lecture graphique et du vocabulaire de base au bout de 15 jours. Ce qui n’était pas le cas les années passées. Depuis 10 ans, je débute l’année en posant le même type de petites questions (permettant ainsi les comparaisons sur plusieurs années). Cela m’a permis de constater que cette méthode est efficace et que la maîtrise des notions est plus rapide.

- Travailler sur ordinateur : Les premiers travaux réalisés à la main sont suivis de travaux sur SWP et Géogebra.

Exemple de travail en salle informatique

(Une partie des travaux est faite en salle info, voir le fichier ci-contre). Il s’agit aussi d’enregistrer le travail effectué dans le bon dossier, de savoir utiliser des logiciels …

- Unité et entraide : Ces TD sont l’occasion pour les élèves d’échanger entre eux, et donc de progresser ensemble.

Calculs à partir des données météo

- Détermination de fonctions affines : le travail est réalisé sur SWP

Traitement latex et calcul formel intégré

(traitement latex et calcul formel intégré, voir le fichier ci-contre). Comme les élèves ne maîtrisent pas la résolution des systèmes, les calculs sont faits à l’aide du logiciel. Il va de soi qu’en parallèle, sur plusieurs semaines, nous travaillons la résolution à la main. Ce qui m’intéresse est la méthode, la notion d’image, d’intervalle, de système d’équations. Les mêmes activités sont reprises lors du travail sur les équations de droites, les représentations de fréquences cumulées croissantes.

- Statistiques : Les calculs sont faits à l’aide du tableur. Certains « élèves ont des tableaux de plus de 1000 lignes. On réalise des études statistiques avec les températures extérieures, les précipitations, les pressions. On arrive naturellement aux notions d’étendue, de moyenne.

Travail sur les moyennes

Voir le Travail sur les moyennes dans le fichier ci-contre.
Questions ouvertes : travail sur les températures extérieures.

Existe-t-il une relation entre les moyennes quotidiennes et les étendues quotidiennes

Existe-t-il une relation entre les moyennes quotidiennes et les étendues quotidiennes (voir le fichier ci-contre) ?

- Vecteurs : La notion de vecteur a été introduite à l’aide des informations données par la station sur le vent : sa vitesse, son orientation. J’ai donc tracé un représentant de cet élément vent que j’ai appelé vecteur. Nous avons fait cela en cours à de nombreuses reprises, en début d’heure par tranches de 5 minutes, avant de commencer le chapitre Vecteurs. J’ai ainsi introduit le vecteur v. Le vocabulaire longueur, sens, direction se fait naturellement. Dans l’exemple ci-dessous, c’est un vent venant du Sud-Ouest de 3 m/s qui est représenté dans un cercle de 3 carreaux de rayon. Cela permet de visualiser ce que sont des vecteurs égaux !!!

Bilan pédagogique

Le nombre d’élèves maîtrisant le vocabulaire de base sur les fonctions est plus élevé que les autres années.
Les plus faibles se repèrent par rapport à leurs connaissances sur la station météo.
Les élèves savent utiliser des données numériques.
Le fait de travailler en tout numérique sur les TD me permet d’avoir des élèves actifs et des notions bien travaillées avant de commencer le cours.
Différents travaux sont réalisés en terminale, en prolongement des années précédentes : valeurs moyennes, lois des grands nombres.

Le travail réalisé sur la station météo est en pleine symbiose avec les notions mathématiques des programmes. Les mathématiques de la station donnent sens à celles des programmes et en soulignent l’utilité. Les élèves qui passent de l’une aux autres sont plus motivés et font preuve d’une meilleure maîtrise des mathématiques enseignées. Raison de plus pour continuer à mener de front les deux activités !