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Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Consommer mieux grâce aux mathématiques : des exercices de « vie réelle » pour le Collège, le Lycée professionnel et le Cycle 3
Article mis en ligne le 1er septembre 2010
dernière modification le 1er novembre 2019

par Gilles Damamme

L’ouvrage dont il est question dans cet article est une mine d’exercices issus de la vie réelle . Il est le fruit du travail collaboratif d’un groupe de l’IREM de Basse-Normandie. Il vient de paraître aux éditions Hermann. Il mérite sans conteste de figurer sur les étagères des CDI des Collèges et des Lycées professionnels, et dans les bibliothèques des Ecoles (Cycle 3). Jugez-en vous-mêmes ! G. Kuntz

Depuis quelques années notre groupe, «  Maths et consommation  », de l’IREM de Basse-Normandie, travaille sur des problèmes de mathématiques liés à la consommation.

Notre motivation initiale a tout d’abord été de donner du sens aux mathématiques que nous enseignons, de motiver un certain public d’élèves habituellement peu inspiré par les mathématiques, et aussi de faire acte de citoyenneté en rendant les élèves (et nous-mêmes !) plus autonomes face à notre société de consommation.

Nous avons développé de nombreuses activités (documents, stages, exposés, ateliers, brochure) sur ce thème et nous travaillons actuellement sur un ouvrage : «  Mieux consommer grâce aux mathématiques  » dont le premier tome vient de paraître aux éditions Hermann.

Le but de cet article est de présenter ce premier tome.

 1) Présentation générale du premier tome :

Le tome 1 de «  Mieux consommer grâce aux mathématiques  » propose de nombreux exercices, tous corrigés, sur le thème de la consommation. Les exercices peuvent être abordés par les élèves de Collège, et certains par des élèves de fin de Cycle 3. Il peut aussi intéresser des élèves de Lycée professionnel en recherche d’exercices concrets, et d’une manière générale, ce tome 1 a pour vocation d’être accessible au public le plus large possible.

Quelques exercices ont pour but d’initier aux crédits et utilisent comme outils les tableurs.

La plupart des exercices ont été conçus pour répondre à des situations réelles : faire des choix judicieux en faisant ses courses, calculer sa monnaie, regarder si tel achat est rentable, calculer les doses d’une recette de cuisine, calculer le coût d’un crédit, évaluer le coût d’un séjour en vacances, etc.

Les outils mathématiques utilisés pour la résolution de ces exercices sont assez simples :

Calcul mental, calcul de décimaux, proportionnalité, division euclidienne, calcul de pourcentage, utilisation du tableur, ....

Par contre la démarche pour passer d’une situation réelle à un exercice mathématique n’est pas si facile que çà : en premier lieu, elle demande de prendre le temps de s’arrêter et d’examiner le problème, puis d’effectuer certains choix.

Nous illustrerons cette démarche par deux exemples ci-dessous :

 2) Fabriquer du pain soi-même

L’exercice suivant a pour but de savoir si acheter une machine pour faire du pain soi-même est rentable et si c’est le cas, d’évaluer quelle économie on fait alors.

L’énoncé de l’exercice et sa correction sont disponibles ci-dessous :

Fabriquer du pain soi-même

Pour créer l’énoncé de l’exercice, nous avons fait le choix d’évaluer la rentabilité de la machine sur deux ans. Le prix de la machine et des préparations pour pains spéciaux correspondent à des prix réels. Par contre l’évaluation du prix des pains spéciaux dans le commerce a été plus difficile, car il y a de nombreuses sortes de pains spéciaux et leur prix varie selon le type de magasin ou selon la boulangerie.

Dans l’exercice, on a négligé le prix de l’eau et l’on n’a pas tenu compte du prix de l’électricité utilisée par la machine à pain, qui n’est pas négligeable, mais difficilement évaluable par l’utilisateur. Néanmoins il ne change pas la conclusion de l’exercice : fabriquer du pain soi-même de manière régulière est rentable, et permet même une économie substantielle.

Par contre, l’hypothèse faite dans l’exercice d’utiliser la machine pour faire des pains spéciaux est importante car le pain blanc a un prix inférieur et l’économie n’est alors pas la même.

Sa conclusion semble toute simple, mais en discutant récemment avec un ami ayant acheté une machine à pain 15 € dans une foire aux greniers, il m’a dit qu’il n’était pas persuadé que fabriquer soi-même son pain avec la machine qu’il avait acquise lui permettait de faire des économies.

Par contre l’exercice ne restitue qu’une information quantitative. Il ne dit rien par exemple sur la patience nécessaire pour que la fabrication du pain à l’aide d’une machine devienne une tache répétitive, sur la qualité du pain fabriqué et comment celle-ci peut évoluer avec l’acquisition d’un savoir-faire au fil du temps.

 3) Le récupérateur d’eau :

Le but de cet exercice est d’observer sur un exemple comment fonctionne un récupérateur d’eau. L’exemple construit de manière fictive (la récupération de l’eau d’un bâtiment pour alimenter les toilettes d’une classe) peut tout-à-fait correspondre à une situation réelle : à titre d’exemple, un hôtelier a récemment installé des récupérateurs d’eau pour arroser ses plantes et alimenter les toilettes de son sous-sol (cf http://www.solarhotel.fr/fr/, rubrique Un concept simple 100% économique ).

La rentabilité de l’installation n’est pas étudiée, on s’intéresse plus à la quantité de pluie récupérée par rapport à la quantité de pluie tombée. Un prolongement possible de l’exercice serait de réfléchir sur la taille de la citerne à installer.

Voici l’énoncé de l’exercice, sa solution ainsi que le tableau de données utilisées pour le problème :

Le récupérateur d’eau

Tableau du récupérateur d’eau :

Tableau du récupérateur d’eau

Les données de pluviométrie utilisées sont les données réelles de la région de Caen en 2007. Il est intéressant de noter sur cet exemple, combien de distorsions sont nécessaires pour approcher un peu la réalité à l’aide des mathématiques. La modélisation du tableau effectue certains choix. On fait aussi le choix d’utiliser le réseau habituel d’eau courante si la citerne contient moins de 450 litres, alors qu’on a évalué la quantité d’eau nécessaire en moyenne par jour de classe à 421,2 litres. C’est une manière d’illustrer qu’il peut y avoir un écart par rapport à la moyenne, même si aucune statistique n’est faite dans l’exercice. De plus, l’étude faite sur 2007 ne permet pas de présager de se qui se passera en 2012 ou 2017 par exemple ; néanmoins, en utilisant le tableur pour faire varier la capacité de la citerne, on peut évaluer grossièrement quelle taille devrait avoir la citerne pour que les toilettes fonctionnent presque exclusivement avec l’eau de la citerne, et qu’en même celle-ci ne soit pas trop grosse.

Cet exercice, qui demande une certaine préparation, a été testé avec des élèves regroupés par deux, qui ont étudié le fonctionnement du récupérateur d’eau pour un mois donné de l’année. Puis une mise en commun a été faite avec l’ensemble de la classe pour obtenir les résultats sur une année.

 4) Conclusion

Ces deux exemples illustrent notre démarche d’accompagner les élèves (et les professeurs) afin qu’ils utilisent les mathématiques qu’ils ont apprises dans des situations réelles.

Ils montrent le travail nécessaire en amont pour adapter l’exercice à la réalité. Ils montrent aussi que certains choix et approximations sont effectués avec la part d’arbitraire que cela implique. Le professeur devra donc guider par moment les élèves vers ces choix, tout en étant à l’écoute de solutions alternatives proposées par les élèves.

Ce long travail de défrichage offre ensuite un terrain propice aux réflexions didactiques.

De nombreux exercices sont en lien avec le programme du socle commun. Dans beaucoup de cas, les unités sont conservées, avec l’objectif que cette conservation des unités apporte plus de sens à l’exercice.

Les exercices ayant été pour la plupart tirés de la vie courante, ils correspondent à l’esprit « Real life » des études PISA. Ils abordent aussi parfois les thèmes de convergence (problème d’énergie, de santé, d’écologie) ce qui est un objectif des programmes depuis quelques années.

Plusieurs exercices offrent l’occasion de pratiquer le calcul mental, plus de manière réfléchie qu’automatique, avec parfois des approximations à faire qui offriront une grande diversité dans la manière d’effectuer le calcul.

Enfin rappelons que notre but est de montrer que les mathématiques peuvent aider à une démarche citoyenne en permettant par exemple de déjouer les pièges de la société de consommation.

Le tome 2 poursuivra cette démarche en abordant de manière plus précise un phénomène ayant une responsabilité dans plus de 80 % des situations de surrendettement en France : les crédits renouvelables. Discrètement abordés dans ce premier ouvrage en raison de leur difficulté technique, ils seront étudiés plus en profondeur.

Cette démarche citoyenne dépasse bien sûr le cadre mathématique, et nous avons essayé de la prolonger par une réflexion éthique en guise de conclusion du tome 1 : la difficulté a été de garder une certaine neutralité dans nos propos.

Outre les trois auteurs de l’ouvrage, de nombreuses personnes ont contribué plus ou moins indirectement à son élaboration, et cet esprit collectif rejoint celui qui existe sur Sésamath. Aussi je suis heureux de pouvoir parler de notre travail dans la revue en ligne MathemaTICE et remercie Gérard Kuntz de me l’avoir proposé.