Les nouvelles technologies pour l’enseignement des mathématiques
Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Jouons aux fléchettes avec la TI 83 !
Des algorithmes et leurs programmations (2)
Article mis en ligne le 12 décembre 2014
dernière modification le 14 décembre 2014

par Nordine Bernard Toumache

Autres articles de l’auteur

NDLR :
L’auteur, Nordine Bernard TOUMACHE, présente une activité basée sur la méthode de Monte-Carlo. La grande originalité de l’article réside dans le choix de l’outil pour la mettre en œuvre : une calculatrice !

Auteur : Nordine Bernard TOUMACHE
toumachebernart@yahoo.fr

Introduction :

Ce projet veut s’inscrire dans la continuité de l’article « Utilisation des listes sur la calculatrice en seconde : applications à la géométrie, algorithmes et programmation sur la calculatrice. » déjà publié dans la revue MathémaTICE. Dans ce premier article, mon objectif était de familiariser les élèves avec l’outil « liste » de leur calculatrice. Ils l’ont utilisé en géométrie, un point étant alors identifié à ses coordonnées c’est-à-dire à une liste de dimension 2. Ces listes n’ont pas encore révélées toutes leurs capacités, en particulier : comment construire une liste en programmation et comment en demander « le nuage de points », comment interpréter celui-ci…..

Toujours dans ce premier article, les algorithmes et programmes présentés ont toujours utilisé des instructions uniques, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas utilisé de boucles. Ce nouvel article veut donc explorer ces nouvelles possibilités à travers un exercice, revisité, proposé par le manuel « Sésamath » des élèves de seconde, qui est celui de mes élèves.

Il s’agit de l’exercice qui suit, il se trouve page 194.

Enoncé de l’exercice

Pourquoi cet exercice ? Le chapitre que nous abordions en cours était « coordonnées, milieu, distance » et il s’agit de l’un des exercices proposé par le manuel dans ce chapitre. Cet exercice a éveillé ma curiosité pour au moins trois raisons :

  • J’y ai vu la possibilité d’explorer avec les élèves certaines possibilités graphique de
     la « TI 83 » comme : créer un point, effacer ce point, créer un segment ou un cercle, utilisation d’un repère orthonormal……
  • Avec quelle probabilité la fléchette touche-t-elle la cible circulaire ? Ou bien, pour rester dans le contexte de l’exercice, quelle est la probabilité d’obtenir un gain de 50 points ?
  • Il m’a fait émettre une conjecture qui m’a fait construire un algorithme puis un programme dont le but était d’infirmer ou de valider cette conjecture. Le programme en question utilise ce qui est cité plus haut et qui manquait au premier article.

Voici la conjecture :
« La probabilité que la fléchette touche la cible circulaire est égale au quotient de l’aire de la cible circulaire par celle de la cible carrée ».

Elle m’a été suggérée par le fait que les générateurs de nombres aléatoires entre 0 et 1 engendrent des suites équiréparties sur [0 ; 1], c’est-à-dire que la probabilité que le nombre engendré soit dans [a ; b], pour a et b entre 0 et 1, est égale à la longueur de l’intervalle, b-a, c’est-à-dire $\frac {b-a} {1}$ . On pourra, à ce propos, consulter l’article de l’auteur « Quelques propositions sur le fonctionnement des générateurs de nombres aléatoires ».

Un quatrième aspect de l’article s’impose : la corrélation entre la conjecture que je propose et son traitement par simulations avec « la méthode de Monte-Carlo » que je ne connaissais pas auparavant.

L’activité commence ici : le thème principal est l’algorithme cité plus haut et « la méthode de Monte-Carlo » qu’il faut présenter à des élèves du lycée, en particulier à des élèves de seconde, ce qui soulève le problème du bagage théorique nécessaire à sa compréhension.

Remarque  :
Je signale une erreur dans l’algorithme proposé par l’exercice car celui-ci ne permet pas à la fléchette de toucher la cible carrée dans sa totalité mais seulement le quart supérieur droit, en effet : alea() étant un nombre aléatoire de [0 ; 1[, on a (x,y) $ \in $ [0 ; 1[ x [0 ; 1[, qui est le carré supérieur droit. Une instruction convenable peut-être « 2alea()-1 » qui est un nombre aléatoire de [-1 ; 1[.

Je voudrais traiter cet exercice avec la calculatrice « TI 82,83,84 » des élèves comme support. A ma connaissance, les machines « Casio » n’ont pas les possibilités graphiques qui m’intéressent, celles utilisées ci-dessous.
Avant de commencer, je signale que si on ne sait pas où se trouve une instruction, on la trouve toujours dans le catalogue auquel on accède par les commandes :

Quelles sont, ici, les contraintes graphiques de la machine que j’utilise à savoir la « TI83 » du logiciel « TI-smartview », qui ne propose comme langage que l’Anglais alors que celle des élèves est, en général, en Français ? Les copies d’écran qui suivent tentent de répondre à cette question :

1) On demande à la machine de tracer le cercle de centre O et de rayon 0,4 dans « la fenêtre » proposée par l’exercice : de -1 à 1 pour la plage des x et la même plage pour les y. Les quatre écrans qui suivent donnent la procédure :













Le cercle est une ellipse et l’explication en est simple : le repère n’est pas orthonormal. Rappelons que l’exercice concerne des calculs de longueurs qui nécessitent un repère orthonormal.

Les fenêtres qui donnent un repère orthonormal sont données par les Zoom 4 ou 5 du premier écran suivant, le deuxième montre le repère obtenu et le troisième montre le cercle dans cette fenêtre :







Comme je veux simuler, graphiquement, le lancer d’une fléchette dans la cible circulaire ou en dehors, dans le dernier écran précédent, force est de constater que le cercle affiché ne permet pas de visualiser convenablement la situation. Il faut donc modifier la fenêtre tout en gardant un repère orthonormal : en faisant Zoom 6 suivi de Zoom 5, on obtient la fenêtre de gauche ci-dessous et en divisant par 10, on la remplace par celle de droite.







On va maintenant faire la cible dans cette fenêtre.
L’instruction du premier écran trace le côté gauche du carré. En complétant par trois instructions analogues, on termine la cible carré. L’instruction du deuxième écran trace la cible circulaire.







La cible est prête et bien lisible dans la machine des élèves.

Nous sommes prêts à simuler les jets aléatoires de la fléchette dans la cible carrée, qui va être « l’événement certain ».

L’instruction qui va simuler un nombre aléatoire entre -1 et 1 va être « 2Rand - 1 ».

On va commencer par simuler des lancers de fléchettes dans l’écran de calcul puis, la simulation étant bien comprise, on va faire un algorithme qui exécute une simulation. Nous le traduirons alors en un programme sur la machine qui va exécuter plusieurs lancers, à la demande.

Première approche 

Simulation graphique dans l’écran de calcul
Avec l’instruction « Pt-On(0.5,-0.7) » dans l’écran de calcul, par exemple, on crée le point de coordonnée (0,5 ; - 0,7). Avec l’instruction « Pt-Off(0.5,-0.7) », on efface le point précédent.

Le premier écran donne le protocole, ou algorithme, de simulation d’un lancer. Quant au deuxième écran, il présente le lancer correspondant, après avoir appuyé sur « Entrée ».







Ratée !
On remonte dans l’écran de calcul avec les commandes :

Cela permet d’exécuter les mêmes instructions, c’est-à-dire de « faire un nouveau tir » ; la première instruction de l’écran de gauche ci-dessus servant à effacer le point déjà fabriqué quand on fait un nouveau tir :

Ratée !

Touchée !

Je signale, ici, aux élèves que s’ils voient si la cible circulaire est touchée ou pas, la machine, elle, est aveugle et demande donc qu’on lui fournisse un test qui lui permette de répondre : « touchée » ou « pas touchée ».

Exercice  : avez-vous une réponse ?


Deuxième approche 

On fait un programme qui exécute l’algorithme précédent, ce qui est fait dans l’écran suivant. On ne manquera pas de demander aux élèves ce que vient faire ici la dernière instruction du programme :

Que fait le programme ?
Il simule un lancer et fait une pause. En appuyant sur « entrée », il affiche ensuite $ x^2 +y^2 $ , qui est la distance par rapport au centre de la cible.

Les écrans qui suivent donnent les résultats de deux exécutions du programme nommé « FLECHE2 ».






Touchée !






Ratée !

Question pour les élèves  :
Quel lien peut-on faire entre un tir et la valeur de $ x^2 +y^2 $ affichée ?


Troisième approche

On va maintenant faire un programme qui va répondre aux deux questions que l’on a posées au début.

Algorithme :

  • On saisit N qui est le nombre de lancers ;
  • On efface toutes les listes (pour qu’il n’y ait pas de conflit entre les nouvelles et les anciennes) ;
  • On met tous les entiers de 1 à N dans la liste L1 qui va être la liste des abscisses ;
  • On initialise un compteur F à 0 ; ce compteur va dénombrer le nombre de tirs dans la cible circulaire pour les N lancers ;
  • Pour chaque valeur de A qui varie de 1 à N, avec un pas de 1, on effectue un lancer ;
  • Si celui-ci est dans la cible circulaire F augmente de 1 ;
  • On met F/A dans le terme de rang A de la liste L2 ; F/A est donc la fréquence des tirs au but pour A lancers ;
  • On affiche F/N qui est la fréquence des tirs au but pour les N lancers ;
  • On fait une pause ;
  • On demande le nuage de points de coordonnées (A,F/A) qu’on compare graphiquement avec la droite Y= « quotient de l’aire du disque par l’aire du carré ».

Le montage des copies d’écran qui suit donne le programme qui exécute cet algorithme ; au préalable on aura ouvert le plot 1, et demandé le nuage de points comme graphique, mis L1 en X et L2 en Y.
Dans l’écran de fonction on aura entré la valeur du quotient des aires, c’est-à-dire : $ \frac {0,4^2 \times \Pi} {4} $ .

On exécute ce programme : au préalable, comme dit plus haut, on a étalonné le graphique statistique (écran de gauche ci-dessous), on a entré le rapport des aires dans Y1(écran de droite ci-dessous).







L’écran de gauche ci-dessous donne la fréquence des lancers réussis pour une série de 500 lancers. Quant à l’écran de droite, il donne le nuage de points pour N = 500 et la droite graphe de Y1.







On exécute plusieurs fois ce programme pour des valeurs de N suffisamment grande pour que le résultat soit significatif ; N≥500 me semble raisonnable. Attention, N ne pourra excéder 999 qui est la taille maximum d’une liste pour la machine.

On peut comparer avec le quotient des aires qui vaut 0,125…….mais le graphique fait beaucoup mieux. On recommence plusieurs fois.

Le graphique est éloquent : la conjecture concernant la probabilité des lancers apportant un gain de 50 points est validée.


Je termine l’article en faisant une comparaison entre deux « outils », la calculatrice TI83 qu’on vient d’utiliser d’une part et le tableur Excel d’autre part.

Quatrième approche 

Le même exercice mais traité avec le tableur Excel comme support.

On peut télécharger le document Excel ici :

Appuyer plusieurs fois sur F9 pour faire fluctuer l’échantillon de tirs qui est ici de taille 5 000.

Le graphique est aussi éloquent.


Annexe : La méthode de Monte-Carlo

La copie d’écran qui suit provient de Wikipédia :

Pour les besoins de l’article, je me borne à l’application de la méthode qui concerne les calculs d’aires ou d’intégrales.

Dans le manuel Sésamath de mes élèves, page 64, dans le chapitre « probabilités », un TP est proposé ; son but est de trouver une approximation du nombre $ \Pi$ .
Je suppose que ce TP s’est inspiré de celui-ci, vu dans Wikipédia et qui est un exemple « historique » ou plutôt « classique » d’application de la méthode :

Je signale aussi celui-ci que l’on peut réaliser en classe pour calculer l’aire d’un domaine tracé de façon arbitraire dans l’écran de la calculatrice :

Je préfère présenter un autre exercice aux élèves, dans le but de les faire acquiescer au résultat mathématique qui fonde la méthode.

Exercice  :
Calculer avec la « méthode de Monte-Carlo » l’aire sous la parabole d’équation $y =x^2 $ pour x compris entre 0 et 1.

Pourquoi cet exercice ?
L’aire en question est une intégrale «  $ \int_{0}^{1} x^2 \, \mathrm{d}x $  » pour les élèves de Terminales, mais elle s’obtient aussi par une méthode due au mathématicien Pierre de Fermat (1601-1665) :

L’aire vaut $\frac {1} {3} $ et la méthode précédente permet de soumettre l’exercice à des élèves de première S et même à des élèves de seconde. Pour les élèves de première, l’exercice peut entrer dans le cadre « initiation à la notion de limite d’une suite » de leur programme et pour les élèves de seconde on peut les faire acquiescer au «  $\frac {1} {3} $  » en utilisant les « nuages de points » des deux suites qui encadrent l’aire cherchée.

La méthode est connue. Pour ma part, je propose dans le montage des copies d’écran qui suit un programme dont l’algorithme est clair :

Sur ce montage, le vilain carré noir masque « C » puis « F ».

J’ai rajouté l’instruction ClrAllLists en début de programme sinon il peut y avoir des conflits entre les listes. C’est systématiquement le cas si on passe d’une valeur de N, 500 par exemple, à une valeur plus petite, 50 par exemple ; la liste L2 reste de dimension 500 en gardant les 500-50=450 valeurs restantes.

Que fait ce programme ?

  • Dans le carré de sommets (0 ; 0) (0 ; 1) (1 ; 1) (1 ; 0), il trace la parabole $ y = x^2 $ et la droite d’équation y = $\frac {1} {3} $ , puis il crée N points au hasard et fait une pause.
  • Il crée ensuite le nuage de points (A,F/A) pour A variant de 1 à N, F/A étant la fréquence des points sous la parabole pour A points ; le nuage est comparé avec la droite y = $\frac {1} {3} $ .

Pour N = 500 le programme donne :







On peut naviguer sur le nuage de points en utilisant la fonction « trace » de la machine.

L’écran précédent à gauche rappelle l’écran « du problème du lac » ; bien sûr pour N = 500 il est difficile de compter « à l’œil » les points sous la parabole mais pour des petites valeurs de N, 50 ou 100 par exemple, on peut faire ça avec les élèves, en faisant remarquer qu’avec des petites valeurs de N on s’éloigne de la probabilité et donc de la précision du résultat cherché.

Au préalable, on a entré $ y = x^2 $ et y = $\frac {1} {3} $ dans l’écran de fonctions, premier écran suivant, puis on a étalonné le graphique statistique (1), deuxième écran suivant :







Dans ce vilain carré noir, il y a « x » pour le premier écran et « On » dans le deuxième.

Conclusion :

1) Quelle corrélation y a-t-il entre ce que je propose, qui concerne la conjecture que je formule, la tentative de sa validation et la « méthode de Monte-Carlo » ?
D’un côté il y a un résultat mathématique que je ne connaissais pas, mes élèves non plus, mais résultat que je pressens et que la curiosité me pousse à valider avec les moyens dont je dispose, moi et mes élèves. De l’autre coté, il y a une méthode connue basée sur ce résultat dont je ne doute pas que la démonstration mathématique existe ; résultat que je formule ainsi : en créant un point « au hasard » dans un rectangle dans lequel est inclus un domaine donné, la probabilité que ce point soit dans ce domaine est égale au quotient de l’aire de ce domaine par celle du rectangle ; si toutefois on peut parler d’aire pour le domaine en question.
Je pense ne pas me tromper en disant que la « méthode de Monte-Carlo » est fondée sur cette propriété ; dans l’exemple du calcul issu de Wikipedia, il est bien dit « la probabilité que le point soit dans le disque est $ \frac {\Pi} {4} $  ».
Mais, si on présente la méthode comme ça, pourquoi l’élève devrait-il adhérer à cette propriété sans interrogation ? Les deux exemples que je traite devraient suffire pour les convaincre ; après la méthode pourra être utilisée sans réticence.

2) Dans quel contexte faire l’activité précédente avec les élèves ?
Les deux heures de TP où la classe de seconde et les classes de première et terminale scientifiques sont dédoublées me semblent être exploitables.
En MPS aussi, pour les secondes, mais alors il faudrait solliciter l’accord de l’inspecteur car, en principe, en MPS il y a un travail en commun avec les autres matières scientifique.
Pour ma part, j’ai commencé l’activité avec mes élèves de seconde, classe d’un bon niveau où les élèves ont leur machine pour la plupart, ici, pour ceux équipés d’une « Casio » ou ceux qui n’en ont pas, le lycée dispose d’un lot de « TI83 » à la disposition des élèves.
La mise en place est assez laborieuse et nous en sommes au stade où la cible a été faite et les premières simulations faites, dans l’écran de calcul. Les élèves ont l’air d’apprécier et je crois pouvoir dire : le « prof » s’amuse mais les élèves aussi.

L’expression peut laisser perplexe mais elle est donnée uniquement pour souligner l’aspect ludique de cette partie de l’activité.
Je reprendrais ce travail plus-tard car il faut aussi que je pense à terminer le programme.