La parution de l’ouvrage d’Alain Busser Jeux et graphes : la théorie des graphes de 5 à 95 ans est un événement important pour la rédaction de MathémaTICE.
Les lecteurs de la revue connaissent les qualités mathématiques de l’auteur et son enthousiasme communicatif ! Dans ce livre, ces qualités sont évidemment présentes, mais le désir de faire entrer dans une démarche mathématique complexe des enfants dès leur plus jeune âge y occupe une place centrale.
L’idée (et la possibilité) de communiquer sa passion à des enfants très jeunes repose sur des expérimentations réalisées lors des fêtes de la Sciences à La Réunion et dans le cadre de sa vie familiale.
Cela n’exclut pas la volonté de donner aux enseignants une solide formation théorique, et de nombreux exemples d’usage des graphes.
Cet ouvrage peut figurer très utilement dans les CDI des établissements scolaires.
Editeur : Ellipses
ISBN : 978-2-340-04103-5
240 pages
Format : 19 cm × 24 cm
Cet article reprend la préface de l’ouvrage, dans laquelle Marie Duflot-Kremer, Maître de conférences en informatique à l’Université de Lorraine et lauréate du prix Serge Hocquenghem 2018 souligne en peu de mots l’importance du thème des graphes et les qualités particulières d’Alain Busser pour les mettre en valeur.
La préface du livre
Que l’on s’intéresse aux mathématiques ou à l’informatique, les occasions sont nombreuses pour rencontrer et étudier les graphes.
Ils sont tout d’abord des outils remarquables pour représenter des choses (un cube, l’ensemble de ses amis sur un réseau social, un plan. . .) et leur évolution (comme par exemple la description d’un système informatique sous forme d’un ou plusieurs automates). Ils permettent une description précise et formelle, sur laquelle on peut ensuite raisonner pour prouver des propriétés du système de départ. Et justement, leur puissance réside dans le fait que la théorie des graphes est riche de nombreux résultats que l’on peut utiliser pour étudier nos graphes.
Quand Alain Busser m’a demandé de rédiger cette préface, je me suis d’abord demandé - pourquoi moi - ? Nous sommes clairement en de bons termes les graphes et moi, mais je pense sincèrement qu’il y a plus expert.e. Et puis j’ai commencé à lire le livre, et j’ai compris que sa nouveauté ce n’était pas tant les graphes, mais la façon de les aborder.
Ce livre nous propose tout d’abord un voyage, dans le temps et dans l’espace, à la rencontre de ceux et celles qui ont découvert l’intérêt des graphes et en ont fait un sujet d’études. On peut remonter jusqu’à l’antiquité romaine au travers de jeux de poursuite, et se promener au fil des âges et des problèmes étudiés de Bâle à Saint-Petersbourg en suivant Leonhard Euler, avec des détours par le Royaume-Uni d’Alan Turing, ou en ajoutant du hasard aux déplacements dans la Russie d’Andreï Markov.
On va de jeux transmis depuis l’antiquité aux découvertes d’enfants du 21e siècle. Ce voyage se fait au travers de problèmes concrets : une promenade dans la ville de Königsberg, ou encore réfléchir au nombre de poignées de mains échangées lors d’une fête. Ils peuvent avoir l’air futiles, mais ont, comme le montre ce livre, des applications importantes et utiles qu’on ne soupçonne pas au premier abord.
Mais le domaine d’application principal illustré dans ce livre, ce sont les jeux. Ils sont partout et nous guident pendant la lecture, que l’on a envie de mettre en pause le temps de les tester. Les graphes ne sont pas illustrés par des jeux, mais ils sont au service des jeux. On découvre des notions quand on en a besoin, on y revient quand les jeux le demandent. Les graphes servent non seulement de support, pour montrer où l’on peut mettre des pions et matérialiser les déplacements possibles, mais ils sont également un outil pour décrire les parties, en prenant maintenant les configurations en guise de sommets, et comme arcs les coups possibles qui nous font passer d’une configuration à une autre. C’est alors l’analyse de ce graphe des parties qui permet de déterminer les situations gagnantes et les éventuelles stratégies.
Les jeux présentés sont très variés. Le livre permet de découvrir des jeux, oubliés depuis des siècles ou peu connus, et donne envie d’en savoir plus sur eux. Mais on y retrouve des jeux plus classiques, comme le Sudoku, décrit avec un graphe, ou différents jeux de Nim, en abordant les stratégies gagnantes et en découvrant leur origine.
Ce livre peut intéresser les novices en graphes, pour qui les exemples de jeux rendent concrètes les notions introduites, ainsi que les gens ayant déjà des notions et qui y trouveront des applications et illustrations nouvelles.
Il pourra également s’avérer très précieux pour les enseignants, car il contient notamment un important catalogue de jeux directement utilisables avec leurs élèves. L’étude des graphes n’est certes pas au programme de primaire :o) mais permet de travailler des compétences au cœur des apprentissages à tout âge, comme le fait de raisonner, d’expliquer ses solutions, d’analyser celles de ses camarades et bien d’autres.
Sur ce je vous laisse (re)découvrir des résultats sur les graphes, tout en retrouvant votre âme d’enfant pour vous laisser emporter et émerveiller par tous les jeux présentés. À vos crayons. Prêts ? Jouez !
Marie Duflot-Kremer
Maître de conférences en informatique à l’Université de Lorraine
Lauréate du prix Serge Hocquenghem 2018
La table des matières de l’ouvrage annonce les développements qu’Alain Busser donne à son thème. Nous la reproduisons pour en souligner l’étendue, la diversité et l’érudition : elle pourrait (c’est notre vœu le plus cher) intéresser de nombreux enseignants de mathématiques pour leur culture personnelle, mais aussi pour leur travail (qui peut être ludique) avec leurs classes.
Il me reste à souhaiter une belle carrière à ce livre, entre les mains de très nombreux enseignants, de la Maternelle à l’Université, et pour le plus grand bien de leurs élèves.
Ps. Quelques graphes manuels dessinés par des enfants
- Automate réalisé par des élèves de CM2 lors de la fête de la science 2019, et reconnaissant leurs prénoms.