Les nouvelles technologies pour l’enseignement des mathématiques
Intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques

MathémaTICE, première revue en ligne destinée à promouvoir les TICE à travers l’enseignement des mathématiques.

Le graphisme vectoriel

Les TICE permettent de faire des graphiques de meilleure qualité que les outils traditionnels (nostalgie du Rotring !). Paradoxalement, cette capacité est largement sous-exploitée dans les écrits mathématiques, en particulier les manuels scolaires.

Article mis en ligne le 9 octobre 2010
dernière modification le 25 avril 2021

par Alain Busser

Hérité de l’antique table traçante, le dessin vectoriel raisonne en « pleins et déliés » au lieu des omniprésents pixels. Et permet même sur des écrans pixellisés, de faire de meilleurs graphiques que ceux qu’on voit usuellement dans des livres de maths...

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Exemple

Voici un graphique représentant les cercle de Ford (tangents entre eux, et au cercle extérieur), exporté au format Portable Network Graphics par CaRMetal :

On soupçonne que, entre deux tels cercles, il y en a une infinité, et pour mieux le vérifier, on est tenté de regarder de plus près, ou avec une loupe, ou de zoomer. Dans ce cas on obtient ceci :

Pas terrible ! Les pixels, une fois agrandis, font ressembler le graphique à une mosaïque, qui ressemble plus à une toile de Seurat qu’à un graphique mathématique ! On a du mal à deviner que les petits objets insérés le long du bord extérieur sont vraiment des cercles !

Si maintenant on exporte la même figure au format svg, une fois zoomé on voit ceci (on constate que mystérieusement, les couleurs ont changé, c’est vraisemblablement un bogue de CaRMetal) :

L’explication de cette extraordinaire qualité est visible dans cet extrait de la figure svg, qu’on peut ouvrir avec un éditeur de texte :

  1. <?xml version="1.0" encoding="utf-8"?>
  2. <!DOCTYPE svg PUBLIC "-//W3C//DTD SVG 1.1//EN"
  3. "http://www.w3.org/Graphics/SVG/1.1/DTD/svg11.dtd">
  4. <svg xmlns="http://www.w3.org/2000/svg" width="845" height="606">
  5. <ellipse cx="422.50000000000006" cy="302.99999999999994" rx="271.5920054950007" ry="271.5920054950007" style="fill:rgb(213,193,153);fill-opacity:0.5"/>
  6. <ellipse cx="422.50000000000006" cy="302.99999999999994" rx="271.5920054950007" ry="271.5920054950007" style="stroke:rgb(150,100,0);stroke-width:1;fill:none"/>

Télécharger

On lit que ce ne sont pas des informations sur les pixels qui sont stockées dans ce fichier, mais des informations sur les courbes (ici des ellipses dont les deux axes sont égaux, donc des cercles) : coordonnées du centre et rayon.

Pire : Souvent les fichiers en pixels sont enregistrés au format jpeg qui est compressé en annulant certains coefficients de la transformée de Fourier bidimensionnelle de l’image, ce qui, à l’affichage, produit des lignes grisées parallèles aux lignes du dessin, appelées artefacts jpeg :

Ces lignes fantômes fortement pixellisées, qui ne font pas très sérieux, se retrouvent pourtant souvent dans des manuels scolaires, en particulier des copies d’écran de tableur (bien regarder les lignes verticales). La parade (avoir des figures de meilleure qualité, même lorsqu’on les regarde à la loupe) c’est de créer d’emblée le document dans un format vectoriel comme postscript ou svg.

Lettres et chiffres

Depuis les polices de caractères réalisées par Luca Pacioli et Albrecht Dürer, on sait que les caractères, ou plus précisément les glyphes qui les représentent sur le papier, sont des tracés vectoriels. On les définit en général par des courbes de Bézier, ce qui, outre la qualité optimale de tracé qu’elles permettent, facilite le changement de taille de caractères (par homothéties), ou le passage aux style italique et gras (par des affinités).

Voici un morphing, basé sur cet article sur les barycentres, permettant de passer progressivement de la lettre u à la lettre n :

<carmetal|doc=2275>


Voici un mot pixellisé comme on l’obtient en imprimant un fichier depuis le traitement de texte :

Et voici le même mot, exporté au format pdf, donc vectoriel :

Moralité : Si on veut un texte de qualité, on a intérêt à utiliser une imprimante laser, à mettre son texte au format pdf, et de préférence à le taper sous LaTeX qui est vectoriel par essence. On a également intérêt à éviter d’insérer des textes scannés, et à préférer les retaper ou les scanner avec un OCR.

formules mathématiques

Si les lettres sont des courbes de Bézier, les chiffres aussi, ainsi que les symboles monétaires ... et les formules mathématiques !


Tout d’abord, les symboles comme $\sum$, $\int \mbox{ }$, $\partial$, $\cup$, $\cap$ etc. sont bien des courbes (de Bézier toujours), sans parler de la célèbre lemniscate $\infty$ !

Plusieurs auteurs écrivent $\mathbb{R}$ avec deux lettres : IR. Sans commentaire...


Ensuite, de la géométrie analytique intervient aussi lorsqu’il s’agit de placer ces symboles entre eux :

  • Un exposant, c’est l’image d’un caractère normal par une homothétie dont le centre est au-dessus du caractère. Que l’on songe aux maux de tête que Léonard Euler a donné à son imprimeur lorsqu’il lui a soumis

    $$\frac{d}{dx}e^{e^{e^{e^x}}}=e^{e^{e^{e^x}}}e^{e^{e^x}}e^{e^x}e^x$$

  • De même, un indice est l’image d’un caractère par une homothétie dont le centre est en-dessous de celui-ci.
  • Le placement des indices et des exposants obéit à des règles un peu compliquées, avec des $\Sigma_{k=0}^n u_k$ et des $\sum_{k=0}^n u_k$
  • Les expressions imbriquées donnent aussi lieu à des réductions de taille des symboles, comme les racines carrées dans $\sqrt{1+\sqrt{1+\sqrt{1+1}}}$ ou les dénominateurs dans

    $$\frac{1}{4+\frac{1}{1+\frac{1}{1+\frac{1}{1+\frac{1}{1+\frac{1}{30+\frac{1}{4}}}}}}}$$


Pstricks

Les figures ci-dessous représentent toutes la même chose : La droite y=2x (en bleu) et le point (1 ;2) (en rouge). Mais les diverses versions de ces figures ont été produites par plusieurs logiciels de géométrie dynamique et agrandis 4 fois pour mieux voir comment les détails ont été affichés à l’écran par ces logiciels.

Tout d’abord, la version DrGeo :

Les marches d’escalier sont régulières mais très visibles.

Ensuite la version Kig :

Image très pixellisée (c’est du Python)

Puis la version Xcas :

L’épaisseur de la droite semble très variable.

Par contre, les deux logiciels écrits en java (langage) utilisent un antialiasing qui donne à la droite un aspect plus régulier (vu de près) et plus fin (vu de loin). Ces deux logiciels permettent d’ailleurs de régler la largeur du trait avec un curseur.

Tout d’abord, CaRMetal :

Et, tout aussi fine, la version GeoGebra :


Insérer dans un fichier texte, une telle image, va déteriorer sa qualité, et une fois photocopiée, celle-ci sera déplorable. La parade est là encore d’exporter l’image à un format vectoriel, et d’importer l’image vectorielle dans le traitement de texte. Les logiciels Kig et CaRMetal exportent en svg, format géré par Open Office, et DrGeo, Kig, Xcas et GeoGebra exportent en LaTeX.

Dans ce cas, la figure est décrite dans le langage Postscript par un paquet LaTeX nommé PSTricks, avec lequel on peut créer directement la figure avec un script interne au document LaTeX. Ce langage est assez facile à utiliser, à part que les fonctions sont écrites en notation polonaise, qui nécessite une certaine habitude...

Cependant, il existe d’autres logiciels permettant d’exporter des figures en LaTeX, comme JPictEd ou PstPlus. Et un livre qui explique comment on fait toutes sortes de figures directement en LaTeX : http://fr.wikibooks.org/wiki/LaTeX/Dessiner_avec_LaTeX.