À toute l’équipe Mathématice dont la collaboration m’a été des plus précieuses.
John Harrison
Introduction
L’histoire de la longitude est une aventure passionnante à laquelle se son attelés les plus grands esprits du dix huitième siècle.
La détermination de la latitude fut assez vite réglée. On se souvient par exemple que la latitude d’un lieu est pratiquement égale à la hauteur de l’étoile polaire sous réserve que l’étoile polaire ne soit pas trop éloignée du pôle nord céleste.
Au seizième siècle par exemple, la junta dos mathematicos (assemblée d’astronomes et de mathématiciens) sous le règne du roi Jean II du Portugal mit au point le règlement de la polaire en vue d’apporter les corrections à la mesure de la hauteur de l’étoile polaire.
La latitude pouvait aussi être déterminée par la hauteur méridienne du soleil et sa déclinaison.
Voici ce que nous en dit Fréderic BRETTAR dans sa thèse de doctorat sur la détermination de la longitude :
On consultera avec profit la formule de la latitude méridienne dans l’onglet Eratosthène pour comprendre le principe de la détermination de la latitude par le soleil ou par l’étoile polaire.
Tables de déclinaison du soleil d’Abraham ZACUTO. (Salamanca 1491)
Il a fallu pour la longitude attendre le dix huitième siècle avec l’invention du chronomètre de marine par Georges Harrison pour déterminer la longitude avec précision.
Sur le longitude act qui précisait les conditions drastiques de la détermination des longitudes, on consultera wikipedia
Cette méthode fut en concurrence avec la méthode des distances lunaires que nous expliciterons dans ce document : la fiabilité des instruments de Georges Harrison donna le coup de grâce à la méthode des distances lunaires.
Le labeur effréné de Georges Harrison pour construire son chronomètre force l’admiration : Il ne lui fallut pas moins de 30 ans pour construire son chronomètre qui devait répondre aux conditions drastiques du longitude act.
Sur Georges Harrison, wikipedia
Les autres méthodes dont celle des distances lunaires sont admirables dans leur principe comme par ailleurs la méthode des satellites de Jupiter issue des observations de Galilée qui mit à mal par la même occasion la théorie géocentrique de l’univers.
Sur Galilée, wikipedia
Le principe en était élégant : il s’agissait d’observer un phénomène céleste et de déterminer le temps solaire vrai relatif à l’apparition de ce phénomène puis de consulter des tables permettant de dire le temps vrai de l’apparition simultanée de ce phénomène par rapport à un méridien de référence Paris ou Greenwich.
Pour la méthode des satellites galiléens, on observait l’éclipse du satellite Io par exemple. On consultait les éphémérides pour savoir à quelle heure solaire vraie avait lieu cette éclipse simultanément à Paris, Paris servant de méridien de référence.
La différence des temps solaires vrais donnait alors la longitude.
Explication :
Voir schéma 1 : Appelons o le centre de la sphère céleste locale
L’angle horaire de l’astre F par rapport à L est l’angle $ \widehat{foa}$
L’angle horaire de l’astre F par rapport à Greenwich est l’angle $\widehat{fog}$
Alors la différence des deux angles est l’angle $\widehat{aog}$ c’est-à-dire la longitude du lieu A.
Schéma 1
Voici par exemple les satellites galiléens observés avec le logiciel Stellarium le 5 janvier 2016.
Le satellite IO est désigné par la flèche en rose un peu avant son éclipse.
L’éclipse de IO se produira pour stellarium à 4 h 55 min 45 s soit
à 3h 55 min 45 s TU le 5 janvier 2016.
Un autre logiciel permet de prévoir les différents phénomènes afférents aux satellites de Jupiter.
L’éclipse est prévue à 4 h 40 min 17 s le 5 janvier 2016.
Si nous nous référons aux éphémérides de l’IMCCE
Le temps est donné en TT temps terrestre dont il faut retrancher 68 sec temps pour avoir le temps TU en janvier 2016.
L’éclipse est prévue alors à : 4h 35,8 min TT
En TU 4 h 35,8 min -68 s = 4 h 34 min 48 s
Pourquoi une telle différence avec stellarium !
Faisons la différence : 4h 34 min 48 s – 3 h 55 min 45 s = 39min 3 s
Ce temps est très proche du temps qu’il faut à la lumière pour venir de Jupiter jusqu’à nous.
La distance sera en janvier 2016 égale à 4,986 UA et donc la lumière mettra 41,5min pour nous parvenir.
Nous allons aborder dans les pages qui suivent la méthode du chronomètre liée à l’équation du temps puis la méthode des distances lunaires avec la magistrale formule de Borda qui relève de la virtuosité calculatoire et enfin la méthode des satellites naturels de Jupiter appelés satellites médicéens ou satellites galiléens.
L’inconvénient de ces deux dernières méthodes est le temps de calcul exigé et heureusement allégé grâce à l’utilisation des logarithmes.
Le chevalier de Borda put ramener à 30 minutes le calcul de la distance lunaire contre 2 heures par la méthode de Maskelyne, astronome royal à l’observatoire de Londres.
L’abbé La Caille proposera une méthode graphique pour éviter les calculs qui rebutent les marins : c’est la méthode du châssis de réduction.
On ne mesurera jamais assez à quel point fut héroïque l’entreprise de ces calculs qui aujourd’hui ne demanderaient que quelques secondes mais l’impérieuse nécessité de déterminer la longitude se faisait sentir : que de navires fracassés contre les côtes faute d’une meilleure connaissance de la position des navires.
La couronne britannique releva le défi et put ainsi s’assurer la maîtrise des mers.
Méthode des satellites galiléens ou médicéens
Cette méthode est impraticable en mer et sera utilisée sur terre rendant de grands services aux cartographes.
En 1610 Galilée observe que les satellites constituent une horloge céleste visible de tout point de la terre tel que Jupiter soit visible au-dessus de l’horizon.
Cassini publie en 1668 « les éphémérides bolognaises des astres médicéens » qui serviront à la détermination des longitudes.
Les éclipses ont lieu quand le satellite passe dans l’ombre de Jupiter.
Les occultations ont lieu quand le satellite passe derrière Jupiter pour un observateur terrestre.
Le passage correspond au fait que le satellite passe dans la partie éclairée du
disque de Jupiter.
Le passage à l’ombre correspond à l’ombre projetée du satellite sur le disque de Jupiter.
L’instant de l’observation d’une immersion depuis n’importe quel point de la terre d’ou la planète est visible est le même pour tous les observateurs, c’est cet instant qui joue le rôle de signal horaire pour la détermination de la longitude.
On pourra consulter les éphémérides des satellites de Jupiter
Source IMCCE
Annexe
Le chronomètre H5 de Georges Harrison (Collection of the Worshipful Company of Clockmakers)