Il y a cette petite histoire qu’on raconte souvent. Deux mathématiciens sont dans la brousse. Chaque soir, ils plantent leur tente sur un terrain dégagé. Un beau matin, l’un d’entre eux est réveillé par des bruits étranges. Intrigué, il glisse sa tête hors de la tente et voit son camarade qui court autour, en étant poursuivi par un lion. Il s’inquiète de son sort, mais l’autre lui répond d’une voix calme : « Ne t’en fais pas pour moi, mon ami, le danger est plus apparent que réel, car j’ai deux tours d’avance »…
Cet argument (qu’on n’est pas obligé de trouver rassurant) invite à interroger le statut des mathématiques : celles-ci sont-elles à la marge de la réalité empirique, confinées dans un monde séparé du monde physique ? Ou faut-il les inclure dans une sorte d’extension intégrale du réel ?
C’est un entretien d’Etienne Klein avec le mathématicien Alain Connes dans l’émission de France Culture, la conversation scientifique.